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Des associations de consommateurs demandent la réglementation des OGM/NTG

Par Antoine VEPIERRE

Publié le 21/05/2024, modifié le 29/05/2024

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Des associations de consommateurs françaises ont peu à peu pris position contre la proposition de déréglementation des OGM émise par la Commission européenne. S’appuyant sur les perceptions et positions exprimées par les consommateurs, elles soulignent toutes le droit des citoyens à savoir ce qu’ils consomment.

Agréées par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) du ministère de l’Économie, les associations de consommateurs peuvent agir en justice pour, entre autres, traiter un dossier de litige. Parmi elles, sept ont d’ores et déjà pris position contre la proposition de la Commission européenne de déréglementer les OGM/NTG, que ce soit lors d’auditions parlementaires, auprès de l’Anses ou via des courriers au gouvernement. Elles rejoignent ainsi d’autres organisations de consommateurs en Europe qui se sont également exprimées contre cette proposition.

Des associations à l’unisson

Quatre de ces associations ont publiquement exprimé un avis, lors de prises de parole publiques ou via des communiqués de presse.

Le 12 juillet 2023, le Conseil national des associations familiales laïques (CNAFAL) était ainsi auditionné par l’Anses dans le cadre de son auto-saisine sur les bases scientifiques de la déréglementation proposée1. Lors de cette audition, Julien Léonard, président du CNAFAL, a rappelé que son association défend « fermement la transparence ». Pour le CNAFAL, « le sujet de l’information des consommateurs constitue le cheval de bataille de notre association. […] Pour que les consommateurs puissent choisir, ils doivent exercer cette faculté de manière éclairée. […] En ce sens, nous insistons sur les questions d’information du consommateur, de transparence, de traçabilité, qui sont des principes raisonnables ».

Autre motif de rejet de la déréglementation des OGM par le CNAFAL, les brevets. Selon Julien Léonard, « on nous fait un peu rêver avec des solutions globales qui sont gérées au niveau mondial avec des brevets qui sont souvent possédés par les autres », ce qui semble incohérent « dans un contexte où la France manifeste le souci d’avoir une certaine maîtrise de sa production ». Et d’ajouter que, si les OGM/NTG étaient autorisés sans encadrement réglementaire tout en restant soumis à des brevets, « nos agriculteurs pourraient se retrouver alors moins libres qu’ils ne le sont actuellement. C’est la raison pour laquelle le CNAFAL et d’autres associations de consommateurs défendent une position en faveur de la non-brevetabilité du vivant ».

L’Union fédérale des consommateurs-Que choisir (UFC-Que Choisir), par la voix de son chargé de mission pour l’alimentation, Olivier Andrault, s’est également exprimée, cette fois lors d’une conférence organisée au Parlement européen le 26 octobre 2023 par l’eurodéputé socialiste Christophe Clergeau. A cette occasion, l’UFC-Que Choisir, a clairement soutenu que les OGM/NTG doivent être évalués, étiquetés, et présenter de réels bénéfices, notamment pour le consommateur final. Olivier Andrault avait conclu son intervention en indiquant qu’en l’état, l’UFC-Que Choisir « n’est pas favorable à ces OGM/NTG et demand[e] que tous les NTG passent devant une procédure d’autorisation complète, que les États membres puissent s’opposer à de tels OGM/NTG, qu’une traçabilité complète et un étiquetage sur les emballages pour tous les NTG de la catégorie 1 et catégorie 2 soient obligatoires ».

Le 28 novembre 2023, c’était l’Association pour l’information et la défense des consommateurs salariés (Indecosa-CGT) qui, par une lettre adressée au Président de la République et à la Première ministre, alertait « sur les risques liés au projet de règlement européen sur les nouvelles techniques génomiques (NTG) ». Rappelant sur son site Internet que l’organisation défend « le droit des consommateurs européens de savoir ce qu’ils consomment », l’Indecosa-CGT estime avec les autres organisations que « cette proposition aurait pour conséquence d’exclure une large part des nouveaux OGM (NTG) de toute évaluation des risques, publication de méthode d’identification, étiquettes et de suivi, pour ne leur imposer qu’une déclaration volontaire et un étiquetage des seules semences et pas des aliments »2. Des conséquences qui vont à l’encontre du « principe constitutionnel de Précaution [qui] impose une telle évaluation des risques comme il impose de surveiller l’environnement en cas d’apparition de risques non anticipés pour un retrait éventuel d’un produit défectueux ». Enfin, l’Indecosa-CGT pointe elle aussi la problématique des brevets, qui faciliteraient encore plus « la concentration capitalistique des entreprises semencières américaines ».

Le 7 décembre 2023, ce sont l’Association de Défense, d’Éducation et d’Information du Consommateur-Union Laïque et Citoyenne des Consommateurs (ADEIC ULCC), par la voix de son secrétaire général adjoint Jean-Louis Blanc, et l’UFC-Que Choisir, toujours via Olivier Andrault, qui étaient reçues au Sénat pour exposer, à nouveau, leurs positions. Comme le mentionne un communiqué de l’ADEIC ULCC3, les trois organisations représentées par l’ULCC (ADEIC, CNAFAL et ALLDC) ont exprimé une opposition claire au projet de déréglementation au nom de « l’information et la défense des consommateurs ». Plusieurs raisons justifient leur position. Elles sont contre la suppression de l’évaluation des risques et la non prise en compte du principe de précaution. Elles soulignent également le risque de contamination des filières « sans OGM », notamment l’agriculture bio, et refusent catégoriquement la suppression de l’étiquetage.

Selon nos informations, la Confédération Syndicale des Familles (CSF) a envoyé un courrier à la Première Ministre, Elisabeth Borne, pour lui signifier son rejet de la déréglementation des OGM/NTG. Un rejet qui s’inscrit dans la continuité des positions de la CSF sur les OGM transgéniques. En 2006, Jo Weber, alors responsable de la CSF, déclarait qu’avec « la pollinisation, il y a un risque de colonisation de l’ensemble de écosystème, ce qui pourrait mettre en cause l’agriculture bio et les différents labels »4.

Enfin, Foodwatch, dernière association de consommateurs agrémentée par la DGCCRF, en 2022, appelle depuis 2020 la Commission à « mettre en œuvre complètement l’arrêt de la CJUE, et non pas le contourner en amendant la Directive européenne sur les OGM »5. Elle rappelle elle aussi « le droit à l’information des consommateurs, la liberté de choix des agriculteurs et éleveurs et le contrôle démocratique des décisions de l’UE sur les OGM ». Et met également en avant la problématique des brevets en déclarant que « les droits de propriété intellectuels sur les nouveaux OGM sont aux mains de quelques multinationales », accélérant ainsi « la concentration de l’industrie des semences, et bloquent l’indispensable développement de variétés adaptées à l’échelle locale, par les agriculteurs ».

Des positions basées sur l’avis des consommateurs

Les prises de position des associations de défense des consommateurs contre la proposition de déréglementation des OGM/NTG n’ont rien de surprenantes. En effet, cela répond à une analyse pragmatique des desiderata des consommateurs.

Comme le rappelle l’Indecosa-CGT, « près de 500 000 citoyens ont […] signé une pétition contre l’autorisation des nouveaux OGM en Europe, demandant à leurs représentants français et européens de défendre l’intérêt commun et d’adopter une position ferme face à cette tentative de dérégulation »6. Le CNAFAL a également rappelé un sondage, effectué en 2022 par Greenpeace, montrant qu’une « majorité écrasante, de plus de 90 %, souhaitait que la présence des OGM et des nouveaux OGM soit indiquée sur les emballages de produits alimentaires »7. Le même sondage expliquait que nombreux étaient les consommateurs « à penser que les enseignes de la grande distribution devaient faire preuve de transparence et indiquer clairement la présence d’OGM et de nouveaux OGM sur les produits ». D’autre part, « un sondage européen d’opinion Ipsos réalisé au début de l’année 2021 dans 27 pays de l’UE montre que la grande majorité (86 %) des Européens qui ont entendu parler des cultures génétiquement modifiées (GM) souhaitent que les aliments produits à partir de ces plantes soient étiquetés comme tels »8.

Certains États membres de l’UE, une majorité des parlementaires européens, des petits et moyens semenciers français, des chercheurs ainsi que nombre d’organisations de la société civile française s’étaient déjà prononcés pour l’étiquetage des OGM et avaient alerté sur un déferlement de brevets si les OGM sont déréglementés selon la proposition de la Commission européenne. A l’instar de ces différents acteurs, les associations de défense des consommateurs, fidèles à leur mission, prennent donc en compte les avis de leurs adhérents et représentent une opposition de plus à la déréglementation des OGM/NTG.

  1. Sénat, « Verbatim du groupe de travail NBT – Audition du CNAFAL », 12 juillet 2023. ↩︎
  2. Indecosa-CGT, « Lettre de Christian Khalifa à la Première Ministre », 4 décembre 2023. ↩︎
  3. ADEIC ULCC, « Législation sur les Nouvelles Technologies Génomiques : L’Adéic défend sa position au Sénat », 9 décembre 2023.
    Voir aussi :
    ADEIC ULCC, « Alerte sur les nouvelles générations d’OGM », 2juin 2022.
    ADEIC ULCC, « Nouveaux OGM : l’ANSES appelle à la prudence, le gouvernement fait la sourde oreille », 8 mars 2024. ↩︎
  4. Jonathan Barbier, « Les députés saisis par les anti-OGM », 20 minutes, 4 avril 2006. ↩︎
  5. Foodwatch, « OGM : la politique européenne doit respecter le Pacte vert », 29 septembre 2020. ↩︎
  6. Pétition portées par plus de 50 organisation de 17 pays de l’UE : « Les nouveaux OGM doivent être strictement réglementés en Europe ». ↩︎
  7. Indecosa-CGT, « Nouveaux OGM : Alerte ! », 5 décembre 2023. ↩︎
  8. Etude Ipsos pour Les Verts/ALE, « Opinion poll on the labelling of GM crops », 30 mars 2021. ↩︎
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