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Soutien citoyen pour un moratoire sur les « OGM cachés »
Neuf organisations de la société civile française viennent de recevoir le soutien de plusieurs citoyens dans leur appel pour que des OGM « cachés » soient soumis à la réglementation européenne sur les OGM. Seul moyen selon les signataires d’une tribune publiée sur Euractiv, pour que les agriculteurs et les consommateurs soient informés de ce qu’ils cultivent et consomment.
Élus européens et français, chercheurs et responsables d’ONG, plusieurs citoyens soutiennent la demande d’un moratoire sur les « OGM cachés » ou « nouveaux OGM » portés par neuf organisations de la société civile française [1]. Une prise de position publique, publiée initialement sur le site euractiv.fr [2], qui intervient alors que la Cour de Justice (CJ) (un des juridictions de la Cour de Justice de l’Union européenne – CJUE) vient d’être saisie du dossier par le Conseil d’État français.
Des OGM cultivés en toute liberté
Dans leur tribune publiée le 30 janvier 2017, les signataires rappellent que certains OGM sont cultivés sur le sol de l’Union européenne sans pour autant être soumis aux exigences de la législation. Des variétés de colza et de tournesol, modifiées artificiellement et génétiquement pour tolérer des herbicides (VrTH), sont « arbitrairement exclu[e]s du champ d’application de la réglementation européenne sur les OGM, sous le seul prétexte qu’[elles] ont été obtenu[e]s par mutagenèse, une vaste famille de techniques autres que la transgenèse pour la majorité non naturelles ». En conséquence, ces plantes et les produits qui en sont issus ne font l’objet d’aucun étiquetage et traçabilité, d’aucune évaluation des potentiels risques sanitaires et environnementaux liés à leur utilisation ni de suivi une fois mises en culture. Or, les signataires de la tribune expliquent que ces VrTH sont « de véritables éponges à pesticides puisque, à l’instar de la plupart des OGM transgéniques, elles sont faites pour survivre aux pulvérisations d’herbicides qu’elles absorbent ».
Le Conseil d’État en appelle à la justice de l’Union européenne
En 2015, les neuf organisations soutenues par cette tribune saisissaient le Conseil d’État français pour « obtenir un moratoire sur la commercialisation et la culture » de variétés rendues tolérantes aux herbicides (VrTH). Une demande de moratoire qui se justifie pour les organisations par le fait que ces variétés sont ce qu’elles nomment des « OGM cachés », qui plus est fortement consommatrices de pesticides. Et les signataires d’expliquer que les neuf organisations ont pu argumenter devant le Conseil d’État sur « la violation du principe de précaution et les défauts de transcription de la réglementation internationale en droits européen et français, et au niveau scientifique, sur les études qui démontrent les risques de ces « OGM cachés » pour la santé et l’environnement ». Avant de rendre sa décision, le Conseil d’État a décidé de saisir la justice de l’Union européenne.
L’enjeu est d’importance selon les signataires : aujourd’hui, la Cour de Justice (CJ) est dans une position où elle va devoir « déterminer si elle met fin à l’exception qui permet aux OGM issus des manipulations génétiques au laboratoire par mutagénèse in vitro d’échapper à toute réglementation, et donc si elle décide de faire rentrer ces OGM dans le champ d’application de la directive européenne 2001/18 qui réglemente les OGM ». Mais cette saisine de la Cour de Justice par la Conseil d’État est d’ores et déjà une « très grande victoire » pour Me Guillaume Tumerelle, avocat des organisations signataires, car la CJ va devoir dire si l’absence d’obligation de traçabilité, de suivi et d’évaluation des risques liés aux nouvelles techniques de modification génétique respecte le principe de précaution ou non.
Des enjeux éthiques et de transparence
Dans leur tribune, les signataires rappellent que la décision de soumettre les produits issus de toutes techniques de modification génétique non naturelles doit « se faire dans la recherche de ce qui est vital pour tous ». Car pour ces organisations, « une considération d’ordre éthique, et plus particulièrement dans le cadre de l’éthique globale, devrait encadrer cette prise de décision ». Et de considérer que « les agriculteurs et les consommateurs ont le droit d’être informés de ce qu’on leur vend pour cultiver ou pour manger. Seule la traçabilité rendue obligatoire par l’application de la réglementation permettra d’identifier ces semences et les aliments qui en sont issus ».
Tous les OGM doivent enfin être réglementés
La tribune publiée soutient ceux qui veulent obtenir que les plantes « issues de mutagénèse in vitro [pratiquée sur culture de cellules, pas sur plante entière, graine ou pollen] et brevetées » soient soumises aux exigences d’évaluation, d’étiquetage et de traçabilité énoncées par la réglementation européenne.
La décision de la Cour est attendue pour les mois qui viennent. Sans nul doute, sa décision provoquera des remous, d’un côté ou de l’autre.
[1] Amis de la Terre France, Collectif vigilance OGM et Pesticides 16, Confédération paysanne, CSFV 49, Fédération Nature et Progrès, OGM Dangers, Réseau Semences Paysannes, Vigilance OG2M, Vigilance OGM 33