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OGM : méganucléases ou Talen, Cellectis renforce sa position
Comme avec la transgenèse et les transgènes, les techniques de biotechnologies donnent des brevets aux États-Unis mais aussi dans l’Union européenne. Ainsi, plusieurs brevets viennent d’être octroyés sur les protéines Talen [1], et sur les protéines « endonucléases ». Du fait d’un accord exclusif, l’entreprise française Cellectis voit deux de ces brevets tomber dans son giron… Elle a aussi signé un accord de licence croisée avec la Fondation TwoBlades, son principal concurrent. Acteur déjà impliqué dans les méganucléases, Cellectis s’implante donc sérieusement dans le développement des nouveaux ciseaux à ADN que sont les Talen.
Le brevet européen (EP2510096), qui couvre la modification de l’ADN via l’utilisation des protéines Talen, a été déposé dans l’Union européenne par les Universités étasuniennes du Minnesota et d’Iowa le 4 novembre 2014 [2]. Et le brevet étasunien (US8921332) qui concerne la modification d’ADN par utilisation de nucléases (qu’il s’agisse de méganucléase, nucléase à doigt de zinc, Talen ou Crispr) a été déposé par l’Institut Pasteur (France) et l’hôpital pour enfant de Boston (États-Unis) [3]. Mais, du fait d’accords signés respectivement en 2011 et 2000, c’est l’entreprise Cellectis qui détient les droits exclusifs sur ces deux brevets qui couvrent tant le domaine médical que la sélection variétale. Une précision d’importance car, si Cellectis est effectivement spécialisée, au départ, dans le domaine médical, elle entend utiliser, via sa filiale Cellectis Plant Science, dans le Minnesota, « ces technologies, [pour] développe[r] des produits agro-alimentaires » [4].
Cellectis possède directement ou indirectement plusieurs brevets sur « l’utilisation des [Talen] pour effectuer des coupures spécifiques dans l’ADN », comme nous le détaillait, en mars 2013, le chercheur Adam Bogdanove de l’Université d’Iowa. Mais d’autres organisations se sont aussi intéressées à cette technologie. Ainsi, la Fondation TwoBlades revendique, sur son site internet, être « le propriétaire exclusif d’une licence sur les utilisations commerciales des protéines [Talen] sur les plantes » [5]. Cette fondation a d’ailleurs obtenu deux brevets en mai et juin 2013 aux États-Unis [6], lesquels couvrent des modifications du génome par utilisation de protéines Talen. La Fondation TwoBlades apparaît donc comme un concurrent direct de Cellectis en matière de propriété industrielle sur ces protéines. Ainsi, ayant sans doute à cœur de résoudre tout potentiel conflit lié à ces droits de propriété industrielle dans le domaine du végétal, Cellectis annonçait, le 18 décembre 2014, avoir signé un accord « non exclusif de licence croisée portant sur les nucléases effectrices TAL » avec la Fondation TwoBlades [7], c’est-à-dire que les deux structures ont un accès à la technologie de l’autre et ont le droit, légal, de les utiliser commercialement…
Avec ces deux brevets et l’accord avec la Fondation TwoBlades, Cellectis renforce sa position dans le domaine de l’utilisation des Talen. Elle renforce aussi un portefeuille de brevets qui, au 1er janvier 2015, concernait « 87 familles de brevets, 51 brevets déposés et 155 demandes en cours d’examen ». Des brevets qui assurent, au dire de l’entreprise, « trois types de protection en couvrant les produits, leurs améliorations et leurs différentes applications pour l’ensemble de ses activités » [8]. Forte de cette position, Cellectis a même entrepris des démarches pour être autorisée à émettre des actions aux États-Unis. Elle a ainsi demandé à l’Autorité étasunienne du marché financier (Securities and Exchange Commission – SEC) à être enregistrée, étape préalable et obligatoire pour que Cellectis puisse être cotée en bourse (NASDAQ) [9]. La démarche, initiée en février 2015, est toujours en cours. L’entreprise est déjà cotée à la Bourse de Paris [10].
[1] , « Quel talen(t) ! Des nouvelles techniques pour modifier le génome des plantes », Inf’OGM, 5 mars 2013
[2] Communiqué de presse de Cellectis, 4 novembre 2014
[3] Communiqué de presse de Cellectis, 6 janvier 2015
[4] cf. note 3
[5] cf. note 1
[6] Communiqués de presse de 2Blades, 13 mai 2013 et 25 juin 2013, http://2blades.org
[7] Communiqué de presse de Cellectis, 18 décembre 2014
[9] Communiqué de presse de Cellectis, 20 février 2015