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Des députés français font entendre leur voix sur les OGM

Par Antoine Vépierre

Publié le 17/01/2024, modifié le 22/01/2024

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Quatre députés français souhaitent que le gouvernement français agisse pour que « les plantes produites via les nouvelles techniques génomiques demeurent au moins aussi encadrées que le sont aujourd’hui les OGM ». Ils viennent donc de déposer une proposition de résolution sur le bureau de la Commission des Affaires européennes de l’Assemblée nationale. Adoptée, elle imposerait au gouvernement de justifier de la position défendue par la France à Bruxelles devant les députés.

La proposition faite par la Commission européenne le 5 juillet 2023 n’en finit pas de faire des remous. Après avoir mis en évidence les différends entre États membres [1] et fait l’objet d’une critique par l’Anses sur son absence de fondement scientifique [2], cette proposition mobilise maintenant des députés français qui veulent se faire entendre. Alors que la Commission des Affaires européennes du Sénat travaille déjà sur la question, c’est au tour de l’Assemblée nationale se pencher dessus.

Respecter le principe de précaution

Dans la résolution proposée le 8 janvier 2024 à la Commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale, Lisa Belluco, Sébastien Peytavie, Nicolas Thierry et Marie Pochon (« écologistes/NUPES ») demandent au gouvernement de se « mobiliser diplomatiquement auprès des États membres de l’Union et de la Commission européenne afin que les plantes produites via les nouvelles techniques génomiques demeurent au moins aussi encadrées que le sont aujourd’hui les OGM […] de ne pas entraver l’échange de semences entre paysans et paysannes […] de bannir les OGM ainsi que les variétés rendues tolérantes aux herbicides du territoire européen, s’agissant des productions comme des importations » [3].

Ils rappellent que les plantes obtenues par de nouvelles techniques de modification génétique sont définies juridiquement comme des OGM réglementés, encadrés par la directive 2001/18. Cette dernière « établit des règles protectrices concernant la culture d’OGM, en termes d’évaluation des risques, de traçabilité et d’étiquetage ». Or, les députés considèrent que la proposition de la Commission européenne ne respecte pas les principe de précaution et d’action préventive pourtant inscrits dans le Traité de fonctionnement de l’Union européenne ainsi que dans la Constitution française.

Car l’existence de risques liés à l’utilisation des plantes OGM/NTG a été renseigné à plusieurs reprises. Les députés s’appuient ainsi sur les avis du Conseil économique social et environnemental [4], du Comité consultatif national d’éthique, ou encore l’opinion récente de l’Anses sur l’absence de fondement scientifique quant aux critères proposés par la Commission européenne pour dérèglementer les OGM.

Des conséquences importantes

Pour les députés, une absence d’évaluation des risques, de traçabilité et d’étiquetage de ces plantes n’est pas concevable. D’autant qu’à cela s’ajoute le problème des brevets détenus par les entreprises. Une situation qui sera problématique pour les paysans « cultivant des plantes obtenues via des NTG sans le vouloir, [qui] seraient alors, ou bien hors‑la‑loi en produisant des aliments qu’ils n’ont pas choisi de faire pousser, ou bien obligés de verser des royalties aux multinationales pour s’acquitter du droit de cultiver ce qui était auparavant leurs propres semences ». Les députés soulignent que « la plupart des entreprises semencières sont menacées » également.

Alors que la Commission européenne a également présenté une proposition de règlement sur l’encadrement du matériel de reproduction végétal, les quatre députés estiment que la concomitance n’est pas un hasard : « d’un côté les plantes obtenues via des NTG vont ouvrir la voie à davantage d’accaparement du vivant, et de l’autre ce règlement menace l’autonomie semencière des paysans et paysannes en répondant à la seule demande des multinationales ». Ce second texte proposé aboutirait à restreindre encore plus les possibilités d’échanges de semences entre paysans. D’après les députés qui ont déposés cette proposition, les deux textes, s’ils étaient adoptés, aboutiraient à être « le cheval de Troie d’une transformation débridée du vivant ».

La Commission des Affaires européennes de l’Assemblée nationale va maintenant voter sur cette proposition de résolution. Adoptée, elle continuerait son chemin dans les procédures internes de l’Assemblée nationale jusqu’à arriver au gouvernement. Ce dernier, non lié à la résolution, pourrait alors se voir demander de venir justifier sa position.

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