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OGM – Procès historique de la mutagénèse à Dijon

Par Christophe NOISETTE

Publié le 20/11/2018

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Près de 45 000 euros d’amendes au total requis à l’encontre des Faucheurs volontaires suite au fauchage d’une parcelle de colza de BASF rendu tolérant à un herbicide par mutagénèse : c’est le montant réclamé par le procureur, lors du procès de Dijon des 15 et 16 novembre, suite à la plainte de la coopérative Dijon Céréales, propriétaire de la parcelle. Le verdict, mis en délibéré, sera rendu le 17 janvier.

Les 15 et 16 novembre 2018, s’est tenu à Dijon le procès de 38 membres du collectif des Faucheurs volontaires, suite à leurs actions de « neutralisation », en novembre 2016, de plusieurs parcelles de colza Clearfield (technologie de BASF) rendu tolérant à un herbicide par une technique de mutagénèse [1]. Ces trois essais – Darois, Marsannay le Bois et Fromenteau près de Dijon – avaient été mis en place par Dijon Céréales, qui a donc porté plainte pour « destruction de bien d’autrui en réunion ». BASF n’a pas souhaité se porter partie civile. Les inculpés sont des hommes et des femmes de tous âges, de toute profession dont une quinzaine d’agriculteurs, aux revenus généralement modestes. Environ 140 personnes sont venus soutenir les militants et une déambulation a été organisée dans les rues de Dijon.

37 inculpés sur les 67 qui voulaient être jugés

Ils étaient 67 personnes à avoir fauché ces plants de colza en novembre 2016. Maître Jérôme Bouquet Elkaïm, l’un des avocats des Faucheurs, a demandé la comparution volontaire de l’ensemble des personnes impliquées dans cette action politique revendiquée : « Nous ne sommes pas dans le cas d’un attroupement où les forces de police auraient identifié certaines personnes au hasard. Il s’agit d’une action collective revendiquée dont les noms ont été remis aux autorités. Si vous ne retenez que la moitié des auteurs de ces infractions, cela veut dire que leurs auteurs n’ont qu’une chance sur deux d’être sanctionnés. Une disparité difficile à expliquer ». Malgré cette plaidoirie, la présidente du tribunal, Hélène Collier, n’a pas retenu cette demande.

Les Faucheurs nous précise que, pour eux, « ce fut un beau procès, les trois juges ayant laissé le débat de fond s’installer, malgré la position de Dijon Céréales qui se limitait à sa plainte pour « destruction de biens appartenant à autrui », et qui répétait que ces variétés n’étaient pas des OGM ».

Comme nous le rapporte Jean-Luc Juthier, un des comparants volontaires, membre de la Confédération paysanne et administrateur d’Inf’OGM, le directeur de Dijon Céréales a annoncé, au cours du procès, que sur les 3800 adhérents de la coopérative, 20 % vont bien, 30 % moins bien, et 50 % sont en difficulté. « Peut-on parler de réussite du système ? », se demande le militant.

Ce procès a aussi été marqué par la présence d’une vingtaine de personnes, salariés et agriculteurs adhérents de Dijon Céréales portant une veste bleue marine, sur laquelle on pouvait lire « agriculteurs volontaires ». Ils entendaient montrer leur solidarité avec les autres « victimes » des Faucheurs. Mais ces derniers se sont bien gardés de parler du fond du sujet. Cités par Reporterre [2], ils précisent que « le procès concerne une intrusion dans une propriété privée. Les OGM, c’est un autre débat, on ne va pas entrer dans le sujet aujourd’hui ».

Dijon Céréales demande un euro symbolique par Faucheur, 15 000 euros de frais d’avocat et 2000 euros pour l’agriculteur dont le champ avait été ensemencé avec ces variétés mutées tolérant un herbicide.

17 janvier : un délibéré très attendu

Un des inculpés a finalement été exclu du procès du fait d’un cafouillage entre les différents fauchages qui ont été organisés et réunis dans cet unique procès [3]. Le Procureur a donc requis une amende de 1000 euros par Faucheur non récidiviste (35 Faucheurs concernés), et 1500 et 2000 pour deux militants déjà condamnés. Le refus du fichage ADN et/ou refus des empreintes digitales est laissé à la sagesse de la Cour, sauf pour les récidivistes. Le procureur a à leur égard requis 500 euros par condamnation antérieure. Au final, le collectif estime que le montant des amendes requises au pénal s’élèverait à 44 500 euros…

Le délibéré sera rendu le 17 janvier. Il est très attendu par tous les acteurs concernés par ces questions car il s’agit du premier procès suite à l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) le 25 juillet 2018 qui confirmait que la mutagénèse produisait bien des OGM [4]. Les plantes fauchées sont donc bien des OGM.

[3Paradoxe à noter : la Justice a décrété qu’il n’avait pas fauché, mais comme il avait refusé le prélèvement ADN, il sera jugé pour cela. Or on ne peut pas prélever l’ADN d’une personne qui n’a pas fait d’acte répréhensible… Affaire à suivre

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