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Nouveaux OGM : la Commission européenne répond aux Faucheurs volontaires
A l’heure où doit se préciser le statut des « nouveaux OGM », les Faucheurs volontaires ont précisé à la Commission européenne leur position : selon une interprétation stricte de la réglementation en vigueur, les produits issus des nouvelles techniques de manipulation génétique (NTMG) doivent être considérés comme des OGM. La réponse officielle, décevante pour les Faucheurs, souligne qu’aucune décision n’a encore été prise et que l’interprétation sera exclusivement juridique.
Le Collectif des Faucheurs volontaires a écrit au président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, à propos des nouvelles techniques de modification génétique du vivant. Ces nouvelles biotechnologies sont, pour les Faucheurs volontaires, des OGM au sens strict, et donc au sens de la réglementation européenne (directive 2001/18). Ainsi, écrivent-ils : « Il est facile en effet de comprendre que si les techniques et les produits sont définis comme non OGM ou sont exclus de l’application de la directive, ils ne seront ni testés, ni étiquetés et donc non traçables mais ils seront toujours brevetés ».
Le Collectif dénonce, dans cette lettre, plusieurs affirmations que l’industrie s’emploie à populariser auprès des institutions nationales et européennes. Par exemple, souligne-t-il, « l’argument de similarité ou « d’équivalence en substance » (sic !) soutenu par les firmes pour comparer les produits issus des NBT avec ceux issus du milieu naturel n’est scientifiquement pas recevable. Similarité ne veut pas dire identité : affirmer que les plantes obtenues par les NBT sont équivalentes à celles présentes dans la nature ou à celles cultivées classiquement est un mensonge et un piège. Ce qui se produit dans la nature ne peut être comparé à ce qui est réalisé en laboratoire (…). La notion de similarité ne résiste pas à une remise en contexte. Quelle similarité entre des plantes brevetées issues des NBT mises en culture de façon rapide et massive dans les champs et des plantes nées d’innovations génétiques spontanées non brevetées et réduites à quelques éléments isolés ? Ont-elles le même impact sur l’équilibre de nos écosystèmes ? ».
Les Faucheurs soulignent le caractère peu scientifique et controversé de plusieurs propos tenus par des industriels, comme le fait que les produits issus de ces nouvelles biotechnologies seraient similaires à ceux obtenus par croisement sexué, ou l’idée répandue que le ciblage de la modification est plus sûre avec ces biotechnologies qu’elle ne l’a jamais été.
Dans une réponse reçue le 15 mars 2016, la Commission européenne a pris soin de ne pas répondre aux questions précises posées par le courrier du collectif des Faucheurs volontaires. Elle s’est donc contentée de répéter que « l’analyse juridique de la Commission est encore en cours et il ne peut être préjugé de ses résultats ». La réponse, rédigée par la direction générale de la Santé, souligne qu’étant donné que la Commission donnera une « interprétation quant au champ d’application de la législation européenne sur les OGM », elle fournira « des éléments d’interprétation utiles pour clarifier le statut des organismes produits par les nouvelles techniques et (…) permettre aux États membres de l’UE d’harmoniser leur approche sur ces techniques » et ainsi, son objectif, précise-t-elle, « n’est donc pas de réviser la législation existante, mais d’expliquer, sur la base de considérations juridiques, la façon dont la législation actuellement en vigueur doit être interprétée. Comme il s’agit d’une interprétation juridique, d’autres aspects, tels que l’impact sur l’agriculture, sur les investissements publics ou privés, la recherche ou les consommateurs, ne seront pas abordés ».
Contactés par Inf’OGM, les Faucheurs volontaires regrettent tout d’abord que les ministères français – à qui la lettre a aussi été envoyée – n’aient pas daigné répondre. En ce qui concerne la réponse de la Commission, il est important, aux yeux des Faucheurs, que la Commission sache que « des militants se préoccupent de ce problème des nouvelles techniques de manipulation du vivant et qu’ils s’appuient sur un argumentaire précis ». Cependant, ils estiment que cette réponse manifeste une « une prise en considération des problèmes de plus en plus segmentaire et restrictive ». Il ne s’agit donc que d’une analyse juridique, mais cette dernière « consistera-t-elle à analyser chaque mot et à leur redonner un sens différent pour servir l’intérêt des multinationales » ? Et pourquoi se contenter d’une analyse juridique, demandent-ils ? Est-ce que cela présuppose que « la Commission ne tiendra pas compte des impacts et que les dangers potentiels des NBT ne seront pas abordés » ? Pour ces militants opposés à toute forme de manipulation génétique et de marchandisation du vivant, « ce charabia politique ne sert qu’à noyer le poisson et ne présage rien de bon ».