Maïs MON863 : l’innocuité toujours en débat
Autorisé pour l’alimentation humaine et animale depuis début 2006, mais pas pour la culture dans l’Union européenne (UE), le maïs MON863 n’en finit pas d’être sujet à controverse. Pour certains, ce maïs, génétiquement modifié par Monsanto pour résister aux attaques de certains insectes, induit des effets sur la santé des rats l’ayant consommé. Pour d’autres, il ne pose aucun problème.
Une controverse ancienne
En 2005, la demande d’autorisation déposée par Monsanto est contestée par Greenpeace. En Allemagne, suite à une action de Greenpeace en justice, l’entreprise est obligée de rendre publics les résultats de son étude de toxicologie sur rats. Sans précédent dans l’histoire des PGM, cette décision allait à l’encontre de la politique de l’Union européenne qui considère que ces études contiennent des informations confidentielles. Mais la justice a tranché et, rendue publique, l’étude a été analysée par les Pr. Arpad Pusztaï et Gilles-Eric Séralini en 2005. Ils concluaient alors que la consommation de ce maïs par des rats provoque des effets non négligeables sur la santé. Qu’allait-il en être pour l’Homme ? Le 13 janvier 2006, la Commission européenne, sur avis de l’EFSA (l’agence européenne de sécurité sanitaire des aliments), autorisait cependant la commercialisation du MON863 pour l’alimentation humaine. Comment, sur la base de données identiques, des scientifiques pouvaient ne pas être d’accord ?
Nouvelle analyse, même réponse…
Les choses auraient pu en rester là si le Pr. Séralini, membre du Comité de Recherche et d’Informations Indépendantes sur le génie GENétique, n’avait pas décidé de refaire l’analyse statistique des résultats de Monsanto en utilisant un modèle plus élaboré. La publication en mars 2007, dans une revue scientifique internationale de ses conclusions [1] fait du bruit : pour le Pr. Séralini, le maïs MON863 induit des effets secondaires négatifs. En France, le gouvernement soumet cette étude à la CGB (Commission du Génie Biomoléculaire) alors que la Commission européenne fait de même à l’EFSA. Et les deux organismes répondent que le travail du Pr. Séralini est plus complet que celui de l’entreprise mais que pour autant, il ne remet pas en cause les avis précédemment émis par ces commissions, du fait d’une insuffisance des tests statistiques utilisés [2] ! Une conclusion qui fait réagir le Pr. Séralini car une telle réponse n’avait pas été faite à Monsanto dont l’analyse statistique était moins complète. Dans une lettre du 10 juillet, le Pr. Séralini affirme que tout le monde est donc d’accord sur la présence de différences entre rats ayant mangé du MON863 et ceux ayant mangé du maïs non GM mais que les avis divergent sur l’interprétation de ces différences.
Qu’en est-il aujourd’hui ? L’autorisation est maintenue puisque les experts considèrent qu’il n’y a pas lieu de chercher plus loin. Mais tout ceci n’est guère rassurant. Car même si le Pr. Séralini avait tort dans ses conclusions, il semble avoir eu raison dans sa démarche, démarche que l’entreprise n’avait pas adoptée et qu’on ne lui avait jamais demandée.
D’autres instances réfléchissent aussi au dossier. Le 28 juin, lors du Conseil des ministres de l’Environnement, l’Autriche et douze Etats membres [3] demandaient à la Commission de prendre des mesures pour “suspendre ou limiter l’autorisation du MON863” [4]. Une nouvelle étude sur le long terme, basée sur des méthodes appropriées pour évaluer les impacts sur des animaux nourris avec ce maïs, était demandée. Sans réponse à ce jour.
[1] “New Analysis of a Rat Feeding Study with a Genetically Modified Maize Reveals Signs of Hepatorenal Toxicity”, G.E. Séralini et al., Arch. Environ. Contam. Toxicol. 52, 596–602, 2007
[3] Irlande, Italie, Pologne, Luxembourg, Belgique, Rép. Tchèque, France, Chypre, Hongrie, Malte, Grèce et Slovaquie