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Veille juridique Inf’OGM du 10 juin au 1er juillet 2024

Par Denis MESHAKA

Publié le 03/07/2024

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UNION EUROPÉENNE

La Hongrie prend la présidence du Conseil de l’Union européenne (UE)

Le 1er juillet, la Hongrie a succédé à la Belgique à la présidence du Conseil de l’UE pour un mandat de six mois. Avec le slogan « Rendre l’Europe à sa grandeur » (en anglais « Make europe Great again »), la Hongrie entend travailler sur les programmes élaborés par l’Espagne et la Belgique depuis le 1er juillet 2023. Parmi les 7 priorités de la présidence hongroise, celle relative à l’agriculture veut « placer les agriculteurs au centre des réflexions sur la future Politique agricole commune ». La Hongrie souligne que de nombreux défis menacent cette profession, comme le changement climatique et les coûts croissants, et que la sécurité et la souveraineté alimentaires sont essentielles pour l’autonomie stratégique de l’UE. Elle ajoute également vouloir « poursuivre les négociations sur les propositions législatives relatives aux matériels de reproduction des plantes… et les nouvelles techniques génomiques (NTG) ».

Un sujet qui anime plus particulièrement l’État hongrois concerne les brevets dans le secteur des NTG. Depuis le début de la présidence belge, les États membres du Conseil européen essayent en effet de trouver un terrain d’entente sur cette question qui bloque l’adoption de la proposition de dérégulation des NTG. La Hongrie, comme la Pologne qui prendra la présidence en janvier 2025, requière des dispositions spécifiques encadrant la brevetabilité des NTG. Elle souligne ainsi des risques liés aux brevets : une concentration du marché, une augmentation des prix et une nuisance aux intérêts des petits obtenteurs.

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Ultime échec de la présidence belge dans l’obtention d’un accord sur la législation NTG

Le 26 juin, quelques jours avant la fin de sa présidence, la Belgique a tenté, lors d’une réunion du Coreper (ambassadeurs de l’UE), de faire adopter in extremis une proposition pour aboutir à un accord du Conseil sur la législation NTG, notamment sur le sujet clivant des brevets. Cette démarche n’a pas abouti en raison d’un nouveau blocage des représentants de la Pologne.

Des voix s’élèvent aussi au sein du Parlement pour critiquer cette tentative de la présidence belge d’obtenir une majorité qualifiée sur les nouveaux OGM sans attendre l’avis imminent de l’AESA et le débat contradictoire qui s’ensuivrait. Cet avis a été requis suite à un rapport de l’Anses dénonçant le manque de base scientifique de la proposition de la Commission. Selon le député Christophe Clergeau (groupe S&D), « la présidence belge propose de rendre non brevetables les plantes bénéficiant du régime dérogatoire (NGT catégorie 1) pour obtenir le soutien de la Pologne, alignant cette position avec celle du Parlement qui s’oppose unanimement à la brevetabilité des NTG ». Le parlementaire français critique cependant l’incohérence de permettre des essais en plein champ sans vérifier l’absence de brevets et demande que cette absence soit un préalable pour l’autorisation. Il rejette en outre la distinction proposée par la présidence belge entre les brevets sur les plantes et ceux sur les procédés d’obtention, exigeant la non brevetabilité totale des NGT.

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La présidence belge présente un état des lieux de la proposition législative sur le matériel de reproduction végétal (« règlement semences »)

Le 24 juin, la présidence belge a présenté une note faisant état des discussions sur la proposition législative concernant le matériel de reproduction végétal (MRV). Ce document montre notamment que les États membres seraient globalement favorables à des règles plus strictes que celles qui ont été proposées par la Commission européenne (voir article Inf’OGM) à l’égard des échanges de MRV entre agriculteurs. Ainsi, alors que la proposition initiale de la Commission exempte des exigences règlementaires les échanges de semences faits sans but lucratif, plusieurs États proposent la suppression de cette mesure. Pour d’autres délégations, il faut conserver cette exemption mais modifier les définitions des termes « agriculteurs » et « niveau local ».

Le Parlement européen avait de son côté, en avril 2024, approuvé les dispositions visant l’échange de semences en petites quantités dans un but de conservation sans que cette activité soit considérée comme de la commercialisation. Le Parti populaire européen (PPE) avait également affirmé, par l’intermédiaire de son rapporteur sur ce dossier, que cet échange contribue à la biodiversité et à la richesse agriculturale de l’UE. Pour sa part, Euroseeds, le lobby de l’industrie semencière européenne, avait critiqué ces propositions qui, selon lui, mettent en péril la qualité et le contrôle des échanges de semences en Europe. Inversement, l’organisation ECVC (Via Campesina Europe) affirme que toute restriction sur les échanges de matériel de semences par les agriculteurs viole les droits des producteurs à échanger de tels produits à partir de leur récolte, comme le prévoit la déclaration UNDROP. Ce dossier est à présent dans les mains de la nouvelle présidence hongroise.

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Le Conseil approuve le règlement sur la restauration de la nature

Le 17 juin, le Conseil de l’UE a adopté in extremis un règlement sur la restauration de la nature. Le texte impose des objectifs juridiquement contraignants pour restaurer divers écosystèmes (habitats terrestres, marins, urbains et d’eau douce) pour lutter contre le changement climatique et ses effets. Cette législation ambitionne de restaurer au moins 20 % des zones terrestres et marines de l’UE d’ici 2030 et tous les écosystèmes nécessitant une restauration d’ici 2050, en priorité les sites Natura 2000. Des mesures spécifiques protègent les pollinisateurs et divers écosystèmes comme les terres agricoles et les forêts. Les États membres devront en outre supprimer les obstacles à la connectivité des cours d’eau et veiller à ce qu’il n’y ait pas de perte nette d’espaces verts urbains. Les plans nationaux de restauration devront être présentés à la Commission, avec un suivi des progrès basé sur des indicateurs de biodiversité.

Le vote au Conseil de l’UE de ce règlement aurait dû normalement se faire sans encombres. Mais un changement de position de la Hongrie, en mars 2024, a généré des incertitudes auprès d’autres pays (Suède, Finlande, Pologne, Italie, Pays-Bas). Le vote fut donc reporté de plusieurs mois. Vingt pays représentant une majorité qualifiée (66%) au Conseil de l’UE ayant cependant voté favorablement pour le texte proposé, le règlement fut adopté.

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Le Conseil est prêt à discuter avec le Parlement sur la Directive sur les allégations écologiques

Le 17 juin, le Conseil de l’UE a adopté sa position sur la directive visant à lutter contre l’écoblanchiment, afin de fournir aux consommateurs des allégations environnementales fiables, comparables et vérifiables. Une étude de 2020 a révélé que plus de la moitié des allégations environnementales étaient vagues ou trompeuses. La directive fixe des exigences minimales pour la justification, la communication et la vérification des allégations écologiques. Les entreprises doivent utiliser des preuves scientifiques pour justifier leurs allégations, qui doivent être vérifiées par des experts indépendants avant publication. Les labels environnementaux publics réglementés par l’UE ou le droit national peuvent être exemptés de vérification. La directive introduit également des exigences spécifiques pour les allégations liées au climat, notamment celles basées sur les crédits carbone. Les négociations avec le Parlement européen commenceront lors du prochain cycle législatif sous présidence hongroise.

L’écoblanchiment, qui consiste à donner une fausse impression ou à fournir des informations trompeuses sur les efforts environnementaux d’une entreprise, peut concerner le secteur des nouvelles techniques génomiques (NTG). Souvent présentées par le secteur des biotechnologies comme plus précises et sûres que les méthodes traditionnelles, les NTG pourraient bénéficier de discours d’écoblanchiment vantant leur avantages environnementaux sans que des preuves solides soient pourtant fournies. Consommateurs et décideurs politiques seraient ainsi induits en erreur. Les NTG n’ont, par exemple, pas été en mesure d’apporter une résistance à la sécheresse, un trait de plantes insaisissable et recherché depuis longtemps dans le contexte de la dégradation du climat.

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La Roumanie accède à la JUB

Le 31 mai, la Roumanie a déposé son instrument de ratification auprès de la JUB. Cette intégration sera effective le 1er septembre 2024. La Roumanie devient ainsi le 18ème pays membre de la JUB.

La Roumanie a émis des réserves concernant la proposition de dérèglementation des NTG, défendant notamment un étiquetage obligatoire pour permettre le choix éclairé des consommateurs. En octobre 2023, le pays soutient l’exclusion de la brevetabilité des plantes obtenues par des processus naturels et celles déjà dans le domaine public, ainsi que les gènes d’intérêt de la biodiversité. Elle propose aussi que les variétés NTG1 et NTG2 (voir Annexe 1 de la proposition de règlement sur les NTG) soient protégées par des brevets spécifiques réglementés de sorte à ne pas entraver l’accès des sélectionneurs aux ressources génétiques et techniques. Elle demande, par ailleurs, que les questions de brevetabilité ne nuisent pas à la compétitivité de l’industrie biotechnologique de l’UE.

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