n°175 – avril / juin 2024

Pas de consensus sur la proposition de dérèglementation des OGM/NTG

Par Eric MEUNIER

Publié le 01/04/2024, modifié le 10/04/2024

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En juillet 2023, la Commission européenne a mis sur la table de l’Union européenne sa proposition de déréglementation des OGM. Celle-ci contenait tous les éléments souhaités par les multinationales : changement de définition d’un OGM, fin de l’évaluation des risques, fin de l’étiquetage et de la traçabilité, interdiction faite aux États membres de prendre des mesures nationales… Prévoyante, la Commission a même adopté une sémantique visant à anticiper les futurs développements biotechnologiques à venir et encore inconnus.

Le Pacte Vert devait être un paquet législatif complet. Las, les aléas politiques faisant, les lois de restauration de la Nature ou de contrôle des produits chimiques utilisés en agriculture ont été fortement réduites, voire rendues caduques. Dans cette dynamique de rétrécissement du Pacte Vert, le texte de déréglementation des OGM a tenu la barre coûte que coûte.

Un postulat de base contesté

Pour déréglementer les OGM, la Commission européenne a deux raisonnements de base, clefs de voûte de tout son déroulé législatif. Le premier est que les « produits obtenus par mutagénèse dirigée pourraient ne pas différer de ceux obtenus par méthodes de production conventionnelles ». Le second en découle directement, puisqu’elle considère que les végétaux NTG qui pourraient également apparaître naturellement ou être produits au moyen de techniques d’obtention conventionnelles « et leur descendance […] devraient être traités comme des végétaux apparaissant naturellement ou produits au moyen de techniques d’obtention conventionnelles, étant donné qu’ils sont équivalents et que leurs risques sont comparables, ce qui permet de déroger entièrement à la législation de l’Union sur les OGM ».

Partant de ces deux affirmations pourtant très contestées, la Commission souhaite faire adopter à l’Union européenne (UE) un cadre législatif qui revient, de fait, à déréglementer les OGM.

Des mesures pour une déréglementation complète

Le premier volet de la proposition est de changer la définition même d’un OGM. Actuellement, selon la directive 2001/18, un OGM est « un organisme, à l’exception des êtres humains, dont le matériel génétique a été modifié d’une manière qui ne s’effectue pas naturellement par multiplication et/ou par recombinaison naturelle ». La Commission souhaite que les OGM soient dorénavant définis de manière à ne concerner uniquement que les OGM contenant un ou des transgènes dans le produit final. Exit les OGM obtenus par des techniques sans historique d’utilisation et provoquant des mutations, délétions de séquences ou autres insertions décrétées non transgéniques. Ces OGM seraient désormais nommés selon un nouvel acronyme : NTG, pour Nouvelles Techniques Génomiques.

Le second volet serait de ne plus requérir aucune évaluation des risques sanitaires ou environnementaux, ni imposer d’autorisation pré-commercialisation. Seul un dossier descriptif minimaliste serait demandé aux entreprises et une vérification administrative conduite. Surtout, une vérification conduite par un seul État membre en vue d’un essai expérimental au champ, par exemple, vaudrait validation pour l’essai comme pour une commercialisation future et s’imposerait à tous les États membres de l’UE. Ces derniers n’auraient également plus le droit de prendre des mesures nationales d’interdiction de telle ou telle plante OGM/NTG.

Le dernier volet serait de ne plus requérir d’étiquetage de la part des entreprises, ni de méthode de détection et traçabilité de leur produit et des séquences génétiquement modifiées qu’ils contiennent. Avec cette mesure, les transformateurs, distributeurs et consommateurs ne seraient plus informés de ce qu’ils consomment. Et, avec l’absence de méthode d’identification des plantes OGM/NTG, les brevets produits et/ou procédés permettant d’obtenir une caractéristique deviendraient des outils d’appropriation du vivant très puissants. Une problématique qui a rebuté de nombreux semenciers, organisations syndicales, États membres..

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