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57 organisations s’opposent à la Commission sur les nouveaux OGM

Par Eric MEUNIER

Publié le 21/09/2021

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Dans une lettre adressée à la Commission européenne début septembre 2021, plus d’une cinquantaine d’organisations européennes ont exprimé leur opposition à déréglementer les nouveaux OGM. Elles pointent du doigt un projet favorable uniquement aux grandes entreprises et demandent à remettre le citoyen, consommateur, paysan… au cœur du débat. « Il faut absolument soumettre ces nouveaux OGM aux requis de la législation européenne », affirment-elles.

En avril 2021, la Commission européenne présentait son projet d’initier une réflexion sur la directive 2001/18 jugeant cette dernière inadaptée aux nouvelles techniques de modification génétique. Sa proposition ? Ne plus soumettre aux requis de la législation OGM les produits obtenus par les nouvelles techniques de modification génétique lorsqu’ils ne sont pas issus de transgenèse [1]. Début septembre, 57 ONG, organisations paysannes et associations professionnelles ou commerciales ont rendu publique une lettre [2] pour signifier à la Commission européenne leur ferme opposition à cette déréglementation du fait des « risques inacceptables » que cela poserait à la santé et à l’environnement et de l’absence d’informations qu’elle engendrerait puisque ces produits ne seraient plus étiquetés.

Des arguments maintes fois répétés

Les organisations signataires reprochent en transversale à la Commission européenne de se faire la porte-parole des arguments d’entreprises pro-OGM. Elles considèrent en premier lieu que la Commission se repose trop sur des promesses faites par des entreprises que ces nouveaux OGM contribueront à rendre l’agriculture plus durable… alors même que la plupart n’en sont qu’au stade de recherche et développement et que rien ne permet de croire qu’elles rempliraient les mêmes promesses que celles faites pour les OGM au début des années 2000. Les organisations notent d’ailleurs que sur les seize produits cités en exemple par la Commission, six d’entre eux ont été modifiés génétiquement pour tolérer des herbicides et qu’aucune modification ne concerne l’adaptation aux conditions climatiques ou à la salinité du sol. Cela démontre, pour ces organisations, que l’adaptation au changement climatique est simplement une promesse qui n’engage que ceux qui y croient.

Outre ce décompte, elles se montrent frappées par la forte similitude entre le raisonnement de la Commission et celui présenté par les entreprises qui réclament une telle déréglementation. Les deux affirment en effet que les modifications génétiques réalisées en laboratoire peuvent apparaître spontanément dans la nature ou être obtenues par des méthodes conventionnelles. En conséquence de quoi, affirment-elles, ces produits ne présenteraient pas plus de risques que les plantes naturelles et ne devraient donc pas être soumis à la législation OGM. Ce raisonnement est non justifié scientifiquement pour les organisations qui rappellent surtout qu’une déréglementation sous ce prétexte concernerait des produits dont la nature des modifications et leur quantité sera diverse et non similaire à ce qui peut être produit naturellement.

Des aspects plus scientifiques sont également au cœur du désaccord présenté. Les 57 organisations reprochent à la Commission d’ignorer sciemment les risques liés aux effets non intentionnels de ces techniques. Des risques que l’industrie pharmaceutique a elle-même souligné à la Commission précisent les organisations. Plus généralement, les organisations affirment dans leur lettre qu’il « n’existe aucune base scientifique pour déréglementer des classes entières de nouvelles techniques de modification génétique et leurs produits ».

Un désaccord scientifique qui concerne également la traçabilité des produits obtenus par ces nouvelles techniques de modification génétique. Pour la Commission, ces nouveaux OGM ne sont pas traçables. Ce que les organisations contestent. Elles rappellent ainsi que la traçabilité est d’ores et déjà requise par la législation et mise en œuvre avec des techniques de laboratoire adaptées lorsqu’il s’agit d’identifier les variétés végétales [3] [4]. Elles précisent également qu’une telle traçabilité est notamment documentaire. Sur cette question, les organisations se montrent finalement offensives quand elles rappellent à la Commission son refus durant des années de tout travail de son réseau de laboratoires spécialisés pour développer les protocoles de traçabilité adéquats [5]. Elles dénoncent le raisonnement circulaire de la Commission qui, en opposant son refus à toute velléité de travail de ses experts, conclut aujourd’hui à une théorique incapacité de tracer ces nouveaux OGM.

Brevets : un quasi-monopole de Corteva

Les 57 organisations signataires demandent donc que les produits issus des nouvelles techniques de modification génétique soient encadrés par la réglementation actuelle sur les OGM, dont la directive 2001/18. Cet encadrement permettra de « maintenir et améliorer la protection de l’environnement comme de la santé humaine et animale ». Une demande renforcée par leur constat que ce projet de la Commission, présenté sous les promesses non vérifiées de l’adaptation au changement climatique et de la réduction de l’utilisation des pesticides, profitera par contre avant tout aux détenteurs de certains brevets. Elles affirment en effet que « le paysage des brevets est aujourd’hui dominé par Corteva qui contrôle l’accès à ses propres brevets mais également à d’autres brevets nécessaires à ceux souhaitant utiliser la technologie Crispr/Cas ». Leur constat est donc simple : déréglementer les nouveaux OGM ne profitera pas aux petites et moyennes entreprises (comme cela est affirmé par les lobbyistes de l’industrie et certains responsables de la Commission) mais renforcera simplement la situation de quasi-monopole de Corteva.

La Commission européenne a annoncé vouloir lancer en septembre une consultation publique sur une pré-étude d’impact de son projet de déréglementation des nouveaux OGM, une pré-étude qui devrait sortir quelques jours avant la consultation. La procédure complète de révision de la législation, si elle devait être menée au bout, pourrait encore prendre quelques années.

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