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UE – L’Efsa encore critiquée
Les procédures d’évaluation suivies par l’Agence européenne de Sécurité des aliments seraient lacunaires et défaillantes. Voici la conclusion en substance d’un récent rapport [1] publié par l’Institut Testbiotech, sous la plume de Christoph Then, anciennement chargé de campagne agriculture à Greenpeace Allemagne et Christof Potthof, ancien membre du réseau Gen-Ethic. Pour ces auteurs, le problème de fond vient du postulat de base de l’évaluation des PGM, à savoir qu’une PGM ne présente pas plus de risques sanitaires et environnementaux que sa contrepartie non transgénique. Les auteurs expliquent que, selon l’Efsa, la preuve des risques doit être apportée avant que toute analyse complémentaire ne soit conduite, contrairement à ce qui se pratique pour les pesticides, les médicaments ou les aliments irradiés. Il en résulterait plusieurs erreurs d’évaluation de la PGM entière mais aussi de la protéine transgénique en elle-même, comme le rapport le détaille avec notamment l’exemple du maïs Mon810. Ce maïs produit une protéine Bt qui, en se liant spécifiquement à des récepteurs présents dans l’estomac des insectes cibles, tue ces derniers. Les deux auteurs expliquent que ces dernières années, de nouvelles données scientifiques ont rendu caduque l’évaluation de la protéine Bt dans le maïs Mon810, réalisée en 1998 pour la première demande d’autorisation : en 2007, le professeur Hibleck a démontré que la protéine Bt produite par la PGM était différente dans sa structure à sa forme bactérienne d’origine ; également en 2007, le professeur Pigott a démontré qu’il n’existe aucun modèle cohérent expliquant le mode d’action de la protéine Bt de manière exhaustive et complète ; les professeurs Kaatz en 2005, Kramars en 2007 et Broderick en 2009 ont publié des résultats montrant que l’action de la protéine Bt serait également influencée par des facteurs extérieurs. Tous ces auteurs dénoncent la non prise en compte, par l’Efsa, de leurs publications dans son avis sur le renouvellement du maïs Mon810, publié en 2009.
De ce constat d’insuffisance des procédures scientifiques suivies par l’Efsa, C. Then et C. Potthof tirent quelques propositions d’amélioration. Notamment que l’Efsa applique une procédure d’évaluation des risques complète et non plus basée sur le postulat cité plus haut de risque équivalent entre la PGM et sa contrepartie non GM sauf preuve du contraire. Des analyses plus poussées à partir d’expérimentations en milieu confiné devraient être requises pour les demandes d’autorisation avec notamment : exposition des PGM à des conditions « stressantes », analyse de composition de la plante à différentes étapes de son développement et sous conditions environnementales différentes, interactions avec différents facteurs externes… L’accès au matériel végétal (en clair, les PGM appartenant aux entreprises) pour les laboratoires indépendants travaillant sur l’évaluation des risques devrait être garanti ; les PGM contenant plusieurs transgènes empilés les uns aux autres devraient être évalués non pas en additionnant les évaluations de chaque transgène mais comme de nouvelles PGM à part entière.
Ce rapport est rendu public alors que justement, l’Efsa effectue une révision de ses procédures d’évaluation des PGM. Mais les premiers retours sur la future politique de l’Agence, dont Inf’OGM a déjà rendu compte, montre que celle-ci semble aller dans le sens opposé à celui préconisé par les auteurs. L’Efsa pourrait en effet valider en 2010, par exemple, que les analyses de toxicologie ne soient nécessaires que dans les cas ou la non équivalence entre une PGM et sa version non GM aurait été démontré (cf. Inf’OGM ACTU n°25, novembre 2009). Justement ce que dénoncent par avance Christoph Then et Christof Protthof….
[1] Christoph Then et Christof Potthof, « Risk Reloaded, Risk analysis of genetically engineered plants within the European Union », TestBiotech, octobre 2009, http://www.testbiotech.org/sites/de…