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UE – La politique de « tolérance zéro » adoptée
Les États membres, réunis au sein du Comité permanent de la chaîne alimentaire et de la Santé animale (CP CASA), ont adopté à la majorité qualifiée la proposition de règlement de la Commission européenne, établissant une tolérance jusqu’à 0,1% de présence de plantes génétiquement modifiées (PGM) dans les lots d’importation à destination de l’alimentation animale. Ce vote avait été reporté lors de la précédente session du CP CASA, les 8 et 9 février 2011.
Le règlement tel qu’il était proposé dans l’ordre du jour de la réunion fixe les conditions dans lesquelles des PGM non autorisées seront tolérées par l’Union européenne lorsque présentes à moins de 0,1% dans des lots destinés à l’alimentation animale : une méthode de détection et de traçabilité validée par le Centre Commun de Recherche (CCR), une demande d’autorisation commerciale en cours de traitement au sein de l’Union européenne depuis au moins trois mois et, nouveautés depuis la réunion du 9 février, une autorisation préalable de la PGM dans le pays exportateur et aucun risque pour la santé et l’environnement identifié par l’Autorité Européenne de Sécurité Alimentaire (AESA), dans la mesure où la plante sera présente à moins de 0,1%. Par rapport au travail habituel de l’AESA, on ignore encore si évaluer une PGM présente à moins de 0,1% implique une différence avec la procédure d’évaluation conduite dans le cadre de demande d’autorisation commerciale. Toujours est-il que les deux dernières conditions (autorisation de la PGM dans le pays exportateur et conduite d’une évaluation de risques) correspondent notamment à la position de la France qui faisait partie des pays ayant demandé un report du vote. Interrogée par Inf’OGM avant le vote, la France avait fait savoir qu’elle souhaitait notamment qu’une évaluation nationale des risques puisse être conduite. La Commission européenne a donc répondu à cette demande en instaurant une évaluation européenne. S’agissant d’une proposition de règlement, donc d’un texte législatif, la proposition doit maintenant être présentée au Parlement européen et au Conseil européen qui auront trois mois pour objecter ou proposer des modifications.
Qui a voté quoi Sept États (…)
Qui a voté quoi
Sept États membres ont voté contre la proposition : Lituanie, Lettonie, Grèce, Malte, Slovénie, Pologne, Chypre. Le Luxembourg s’est abstenu. Et les 19 autres États membres ont donc voté en faveur de la proposition.
Rappelons que du côté de l’industrie alimentaire, les pressions étaient fortes pour qu’une telle tolérance soit présentée par la CE et adoptée. En 2009, un rapport non signé et nommé « Le dossier de la chaîne alimentaire humaine et animale au vue de la présence d’évènements GM non encore autorisés dans l’Union européenne dans les produits d’importations, notamment soja et graines de soja » a été diffusé aux représentants nationaux d’industries agroalimentaires par le biais de la Confédération des Industries Agro-alimentaires de l’UE (CIAA), la Fédération européenne des aliments composés (FEFAC) et le Comité du Commerce des céréales, aliments du bétail, oléagineux, huile d’olive, huiles, graisses et agrofournitures (Coceral). Ce rapport visait à convaincre les différents destinataires de demander la remise en cause de la politique de tolérance zéro [1]. Un peu plus d’un an plus tard, le travail de lobbying paraît avoir été efficace même si la CE se refuse à considérer que cette politique de tolérance zéro est remise en cause par ce projet d’évolution de la législation [2].
Sur un autre plan, ce vote pourrait presque être qualifié d’historique puisque c’est la première fois que le Comité permanent de la chaine alimentaire atteint la majorité qualifiée en faveur d’une proposition de la Commission Européenne concernant les OGM ! Ce comité est au contraire plutôt habitué à botter en touche (non atteinte de la majorité qualifiée) et donc à renvoyer les dossiers au Conseil des ministres.
Enfin, la décision d’aujourd’hui s’inscrit dans un moment chargé du dossier OGM au niveau européen. Dans le même temps, le Parlement européen travaille de son côté sur une proposition de la CE de fournir aux Etats membres les outils pour interdire nationalement ou localement la mise en culture de PGM au cas par cas [3]. Par ailleurs, la CE continue de présenter au comité permanent et conseil des ministres des propositions d’autorisations commerciales de PGM [4]. Et l’AESA travaille elle à de nouvelles lignes directrices d’évaluation des risques liés aux plantes transgéniques. Autant dire que le dossier OGM est plutôt actif en ce moment et que les années 2011 et 2012 laissent présager de possibles nouvelles règles du jeu.
[1] cf. Inf’OGM n°24, octobre 2009, http://www.infogm.org/spip.php?arti…
[3] cf. http://www.infogm.org/spip.php?arti…. Inf’OGM détaillera cette proposition dans Inf’OGM n°109, à paraître début mars 2011