n°143 - janvier / février 2017

Vignes et vins OGM : pas encore !

Par Christophe NOISETTE

Publié le 03/03/2017

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L’Union européenne n’a autorisé ni porte-greffe, ni greffon, ni micro-organisme transgénique en œnologie. Mais, pour la vigne et le vin, différentes solutions biotechnologiques ont été (et sont encore) testées, voire autorisées, sans avoir réussi à pénétrer le marché.

Le vin, c’est un simple jus de raisin… fermenté. La fermentation se fait d’abord par des levures (Saccharomyces cerevisiae) qui transforment le sucre en alcool puis par des bactéries (Oenococcus oeni) qui dégradent l’acide malique en acide lactique. Ces « bêtes » microscopiques se nourrissent du raisin et sont nativement présentes. Dans les années 70, levures et bactéries exogènes ont été sélectionnées et sont désormais largement utilisées. Cependant, plusieurs vignerons nous affirment qu’ « il n’y a aucune obligation d’introduire des levures si le moût est issu de vignes saines et suffisamment diversifiées ». S’il n’existe aucune version transgénique des bactéries lactiques, en revanche deux levures transgéniques destinées à l’œnologie ont été autorisées en Amérique du Nord. ML01 est une levure modifiée pour réaliser les deux fermentations en une seule fois. Cette levure génétiquement modifiée (GM) n’est, pour l’heure, plus produite – faute de marché et de pertinence gustative.

Et ECMo01, censée réduire le taux de carbamate d’éthyle, composé classé « probablement cancérigène » par l’OMS et qui n’a jamais été produite industriellement. Actuellement des travaux sont en cours pour modifier cette levure en utilisant Crispr/Cas9.

Pour Aline Lonvaud, de l’Université de Bordeaux, « les levures sont des auxiliaires technologiques, et à ce titre l’UE n’exige pas d’indiquer leur utilisation sur l’étiquette ». Mais, comme le souligne l’avocate Nicole Courtesis, « savoir si cet OGM est employé comme ingrédient de la denrée finie ou comme auxiliaire technologique [est une] question [qui] se pose avec une particulière acuité s’agissant des produits de fermentation (levures et autres) obtenus à l’aide de micro-organismes génétiquement modifiés (…). La sécurité juridique [de cette question] est loin d’être assurée ». En revanche, le vigneron qui achèterait de telles levures en connaîtra l’origine transgénique. Seule une réponse de la Direction des fraudes – que nous attendons toujours – permettra de trancher.

Porte-greffe ou greffon GM

En théorie, il n’y a pas d’échange génétique entre le porte-greffe – le pied de la vigne – et le greffon. Donc un porte-greffe transgénique ne donne pas juridiquement du raisin génétiquement modifié. Les modifications génétiques du porte-greffe visent principalement à le rendre résistant à des virus, notamment à celui du court-noué, comme à l’Inra de Colmar. L’Inra a reconnu tardivement devant Inf’OGM que la voie transgénique semblait être une impasse. Des porte-greffes GM résistants au court-noué, à la maladie de Pierce et à des insectes suceurs ont été testés aux états-Unis et d’autres censés résister au froid au Canada. Aucun n’a été commercialisé. En Afrique du Sud, l’essai autorisé n’a jamais vu le jour.

Les autres essais concernent les greffons, la partie qui porte les fruits. Le vin qui en serait issu devrait être étiqueté, dans l’Union européenne, comme « issu de raisin OGM ». Les recherches portent principalement sur la résistance à des champignons : mildiou, oïdium, botrytis. Des essais ont eu lieu en 1999 en Allemagne. Et là encore Inf’OGM a appris que « ces expériences ont été arrêtées prématurément car la vigne GM n’avait pas la résistance fongique espérée ». On trouve de tels essais, aussi peu concluants, aux États-Unis et au Chili.

En Italie, entre 2001 et 2006, un essai de greffons GM devait évaluer les effets du transgène responsable de la synthèse d’auxine – qui permet d’obtenir des fruits sans pépin – sur le développement, la fécondité et la qualité des raisins.

Et l’Australie a fait pousser des vignes GM pour en modifier la couleur des grappes, leur composition en sucre, le développement des fruits, et aussi étudier le flux de pollen. Au final, actuellement, les États-Unis sont le seul pays où des essais en champs de vignes, porte-greffes ou greffons transgéniques sont encore en cours.

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