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FRANCE – OGM : une interdiction de mise en culture. Mais quid des cultures déjà semées ?
Inf’OGM déplore l’attitude du ministère de l’Agriculture. Vendredi 16 mars, le ministère nous précisait, au téléphone, que l’arrêté concernerait la culture de maïs MON810 et non la mise en culture, précisant ainsi qu’aucune culture transgénique ne serait légale sur le territoire national [1]. Or, l’arrêté, publié aujourd’hui 18 mars au Journal Officiel, est intitulé : « Arrêté du 16 mars 2012 suspendant la mise en culture des variétés de semences de maïs génétiquement modifié (Zea mays L. lignée MON810) ». Ainsi, la question de la rétroactivité de cet arrêté se pose entièrement.
Si des militants pro-OGM ont semé du maïs MON810 avant la publication officielle de cet arrêté au JO, profitant d’une météo favorable et souhaitant mettre les autorités dans l’embarras, la question se pose de la légalité de ces parcelles cultivées avec des PGM.
En principe, les actes administratifs, et donc les arrêtés, ne peuvent pas avoir d’effet rétroactif, ce que nous a laissé entendre notre source. Mais comme pour beaucoup de principes, il existe des exceptions, notamment « lorsque la rétroactivité de l’acte est exigée par la situation qu’il a pour objet de régir (par exemple, pour le règlement d’une campagne de production agricole édicté après le début de celle-ci : Conseil d’État, 8 juin 1979, Confédération générale des planteurs de betteraves, n°04188) » [2]. Selon cette décision du Conseil d’État, « compte tenu des conditions particulières dans lesquelles s’exercent les activité agricoles, les dispositions réglementaires fixant le régime applicable à un produit agricole pour une campagne déterminée doivent nécessairement produire effet pour l’ensemble de la campagne considérée ». Ce sera probablement au juge de déterminer si cette jurisprudence sera applicable au cas des cultures de maïs MON810, et si l’arrêté porte sur une « campagne déterminée ». Les agriculteurs avaient, il faut le souligner, été prévenus qu’un tel arrêté serait pris.
En tout état de cause, la situation sur ces cultures est très floue et le ministère essaie tant bien que mal de ménager la chèvre et le chou, mais ce petit jeu trouve actuellement ses limites.
Le ministère de l’Agriculture cite « les observations recueillies lors de la consultation du public organisée du 20 février au 6 mars », mais ces observations n’ont toujours pas été communiquées. Inf’OGM regrette, une fois de plus, le mutisme du ministère sur ces résultats. Aucune mention n’est faite dans les considérants à la décision de la CJUE qui rend le miel contenant du pollen de MON810 impropre à la vente, ce qui aurait constitué un argument essentiel pour justifier cette mesure conservatoire d’interdiction… Le ministère a tout de même introduit dans les considérants l’étude réalisée par la professeur Hilbeck [3]. Globalement, la ligne de défense du ministère consiste à démontrer que l’évaluation du maïs MON810 n’est pas conforme aux nouvelles exigences et que le débat général sur l’évaluation des PGM n’est pas clos. Au final, pourquoi le ministère a-t-il adopté un arrêté aussi tardif et aussi fragile ?