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Nouveaux OGM : la Commission européenne en mal de soutien
Du 24 septembre au 22 octobre 2021, la Commission européenne a consulté les citoyens européens sur son intention de déréglementer certains OGM. Le texte à commenter, nommé « analyse d’impact initiale », a fait l’objet d’un nombre important de retours des citoyens. Des retours très largement défavorables.
La Commission européenne répète, depuis plusieurs mois, considérer que la législation sur les OGM n’est « plus adaptée et [qu’]il est nécessaire de l’adapter aux progrès scientifiques et technologiques pour certaines [nouvelles techniques de modification génétique] et leurs produits ». Comme Inf’OGM l’a rapporté [1], cette affirmation repose sur quatre arguments : la législation actuelle comporterait une incertitude juridique due à un vocabulaire imprécis, les modifications génétiques obtenues par mutagénèse ou cisgénèse présenteraient moins de risques que celles obtenues par transgénèse, il serait impossible de différencier certains nouveaux OGM de plantes améliorées conventionnellement et, enfin, la législation actuelle ne prend pas « en compte [la possibilité] des produits potentiels (…) de contribuer à résoudre des défis sociaux, notamment celui de la durabilité ». La Commission européenne a donc lancé, fin septembre, son initiative visant à proposer un nouvel encadrement réglementaire des produits issus de certaines techniques de modification génétique. La première phase qui vient de s’achever consistait à organiser une consultation électronique du public pendant quatre semaines, avant de formuler dans les mois à venir une proposition plus concrète.
Plus de 70 000 commentaires
En un mois, 70 879 commentaires ont été reçus et considérés valides (sur un total 70 894) par la Commission européenne, soit plus de 2 300 par jour [2]. Plusieurs organisations de la société civile estiment que plus de 69 000 contributions (soit plus de 73%) expriment une opposition au projet de la Commission européenne visant à déréglementer certains des nouveaux OGM. Ces organisations [3] avaient en effet mis à disposition des internautes un outil facile d’utilisation pour leur permettre d’exprimer leur position sur le texte de la Commission européenne. Cet outil fournissait un modèle de message modifiable à souhait, basé sur une opposition à « la déréglementation de tout OGM (dont les nouveaux OGM) non seulement pour le risque sanitaire, mais aussi pour l’enjeu politique (perte d’autonomie des paysans), l’enjeu juridique (brevets sur le vivant), l’enjeu environnemental (la grande majorité de ces nouveaux OGM servent à utiliser davantage de pesticides), l’enjeu éthique ».
Alors que la Commission européenne va maintenant analyser les contributions reçues, elle fournit d’ores et déjà des statistiques qui montrent que 96,2 % des réponses reçues proviennent de citoyens européens. Les autres contributions, représentant chacune moins de 0,2 %, proviennent d’institutions de recherche, d’entreprises, d’associations d’entreprises, d’ONG, d’autorités publiques… Géographiquement, la majorité des réponses reçues viennent d’Allemagne (46%) et de France (36%). A noter que plusieurs contributions ont été adressées depuis d’autres pays que ceux de l’Union européenne. La Commission liste par exemple des contributions venues du Royaume-Uni (663), de Suisse (749), des États-Unis (196), d’Argentine (141), du Japon (85), d’Inde (26) ou encore de Syrie (1).
Quelle suite ?
Suite à cette première consultation publique clôturée, la Commission européenne va maintenant aborder la prochaine phase de son initiative lancée le 24 septembre dernier. Cette phase va consister à produire une analyse d’impact complète qui sera à son tour soumise à consultation publique. Selon le calendrier de la Commission, cette seconde consultation publique devrait intervenir au deuxième trimestre 2022. La fin de la procédure, annoncée pour le printemps 2023, pourrait voir une proposition législative adoptée par la Commission européenne.
Le résultat de cette première consultation publique, s’il était confirmé dans la tendance annoncée par les organisations de la société civile, contribue à fragiliser encore plus la position de la Commission européenne. Trois jours après la fin de la consultation publique, une audition de la Commission des pétitions du Parlement européen avait lieu pour discuter d’une pétition déposée par la Confédération Paysanne et la Fédération Nationale de l’Agriculture Biologique. Comme Inf’OGM l’a expliqué [4] , cette audition a surtout été marquée par l’absence de soutien politique à l’analyse portée par la Commission européenne qui estime, dans la lignée de son initiative législative en cours, que la mutagénèse aléatoire in vitro serait exemptée des requis de la législation OGM.
[1] , « La Commission lance une procédure pour déréguler certains OGM », Inf’OGM, 7 octobre 2021
[2] https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/13119-Legislation-for-plants-produced-by-certain-new-genomic-techniques/feedback_en?p_id=26519622
[3] En France, il s’agit de structures comme Objectif Zéro OGM, Agir pour l’Environnement, Les Amis de la Terre, ASPRO-PNPP, Bio Consom’acteurs, Collectif anti-OGM 66, Collectif Les pieds dans le plat, Combat Monsanto, Comité de Soutien aux Faucheurs Volontaires 49, Comité de soutien aux faucheurs de Pithiviers, La Confédération Paysanne, Faucheurs Volontaires d’OGM, Fédération Nationale d’Agriculture Biologique (FNAB), Générations Futures, Greenpeace France, Intelligence Verte, Loiret sans OGM, Mouvement de l’Agriculture Bio-Dynamique, Nature & Progrès, OGM Dangers, Réseau Semences Paysannes, Sciences Citoyennes, Vigilance OG2M, Vigilance OGM et Pesticides 16, Vigilance OGM 33, Vigilance OGM 36.
[4] , « OGM : deux organisations françaises contre la Commission européenne », Inf’OGM, 26 octobre 2021