OGM : de l’art de l’amalgame
Réponse à Emmanuel Lechypre, éditorialiste à BFMTV
Monsieur,
Dans votre chronique sur BFMTV, du 21 mai [1], consacrée à la loi d’interdiction des OGM adoptée par le Parlement français, vous vous demandez si cette loi n’est pas « rétrograde ». Or, pour défendre votre opinion, vous vous permettez quelques amalgames. Les chiffres que vous produisez sont sortis de leur contexte et au final les faits que vous égrainez, côte à côte, ne peuvent pas, rationnellement, être liés. Il ne s’agit que de données juxtaposées et non d’une démonstration.
Deux points méritent particulièrement notre attention.
Premièrement vous affirmez que les OGM (on devrait plutôt parler des plantes génétiquement modifiées, PGM, mais passons…) représentent 13% des surfaces cultivées mondiales. Ce chiffre n’est pas faux mais sans explication, il laisse croire à un développement des PGM exagéré. En parlant de surfaces cultivées, vous pouvez ainsi ne pas tenir compte de l’ensemble des surfaces agricoles mondiales comme les prairies permanentes ou l’ensemble des surfaces utiles à l’alimentation des hommes. Si nous comparons les cultures GM à l’ensemble des terres agricoles, elles ne représentent plus que 4%, et si nous les comparons aux surfaces utiles à l’alimentation humaine et animale, ce pourcentage passe sous la barre des 2% [2]… Convenez-en, le contexte est important à préciser…
Deuxièmement, et là la juxtaposition de deux idées s’avère manipulatrice, vous parlez du développement des OGM et enchainez en affirmant, je vous cite : « dans le même temps on voit que la France recule dans le rang des puissances agricoles mondiales et même européennes ». Sous-entendu : la France, en interdisant les OGM, perd des parts de marché. Or, il aurait été pertinent d’indiquer à vos auditeurs que les deux pays qui sont passés devant la France en matière d’exportations agricoles, les Pays-Bas et l’Allemagne, sont moins impliqués dans le développement des PGM. Les Pays-Bas n’en ont jamais cultivées, et l’Allemagne en a cultivées en même temps que la France (c’est-à-dire avant 2008) mais sur des surfaces 10 fois plus faibles : quand, en 2008, 22 000 hectares de maïs transgénique étaient recensés chez nous, nos voisins avaient emblavé à peine 2300 hectares. Depuis, l’Allemagne a rejoint les pays qui ont adopté un moratoire sur les PGM…
Cordialement
Christophe Noisette
Rédacteur en chef, Inf’OGM