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La contradiction du WWF sur la question du soja au niveau mondial

Par Christophe NOISETTE

Publié le 31/01/2009, modifié le 27/02/2025

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« Oui à l’exportation du soja par les pays du Sud… mais n’en mangeons pas au Nord ». Telle semble être la position ambiguë de l’organisation écologiste WWF, qui vient de publier un rapport intitulé «  Vers plus d’indépendance en soja d’importation pour l’alimentation animale en Europe : le cas de la France » [1]. Ce rapport rappelle, en introduction, que « l’agriculture française est la première consommatrice européenne de soja avec 4,5 millions de tonnes importées chaque année. Sachant qu’un Français mange en moyenne 92 kg de viande, 250 œufs et une centaine de kilos de produits laitiers chaque année, cela nécessite une surface cultivée en soja de la taille d’un terrain de basket par habitant, dont 16 m2 de forêt amazonienne. La production de viande absorbe à elle seule 84 % du soja importé ». Le rapport précise que « seulement 1/5 du soja utilisé pour nourrir nos animaux d’élevage est certifié non GM, alors même que 70 % des Français sont opposés à l’utilisation d’OGM dans l’alimentation  ». Pour le WWF, l’importation massive du soja est donc une « impasse ». Il considère que « des solutions alternatives existent » : remplacer la moitié des importations françaises de soja par des protéines végétales produites sur place (pois, luzerne …). Ce rapport apporte des éléments chiffrés, mais n’est pas en soi novateur. Que ce soit par le réseau Agriculture Durable [2] ou par la campagne « soja contre la vie » [3], de nombreuses publications ont déjà abordé en France cette thématique.
Le WWF propose ensuite quelques recommandations simples : « consommer moins souvent de la viande (2 à 3 fois par semaine) au profit des protéines végétales (lentilles, pois…), des œufs, des laitages ou des poissons certifiés MSC [4] » ; «  privilégier les produits issus d’animaux nourris à l’herbe ou par des cultures locales et ceux dont l’alimentation animale est certifiée (AB par exemple) » ; « demander aux entreprises de s’engager contre la déforestation liée au soja en signant la pétition sur http://www.protegelaforet.com » ; et « demander aux entreprises d’afficher sur les produits concernés la provenance de l’alimentation animale et son caractère GM ou non ».

Ce rapport semble être en contradiction avec une autre initiative de WWF… au Brésil [5]. En effet, en mars 2005, une « conférence sur le soja durable », avait été organisée par le WWF. A cette époque Via Campesina et le Grupo de Reflexion Rural considéraient que cette conférence qui n’envisageait pas la diminution de la production de soja, servirait de caution au « modèle soja », délibérément non durable, autant pour l’Amérique du Sud (déforestation, perte de la biodiversité, etc.) que pour l’Europe. Ces organisations précisaient que la conférence était co-organisée notamment par André Maggi Group (producteur de soja), Coop Suisse et Unilever. Plus récemment, le 25 janvier 2009, GMWatch, une association britannique anti-OGM, émettait un communiqué de presse intitulé « maintenir la pression sur le WWF ». En effet, cette association participera à la troisième table ronde sur le soja durable. GMWatch affirme « qu’il ne peut y avoir de production durable avec des PGM car l’expansion du soja GM menace la biodiversité en Argentine, au Paraguay, au Brésil et en Bolivie ». S’appuyant sur les travaux de l’agronome argentin Walter Pengue et de l’agro-écologiste de l’université de Berkeley Miguel Altieri [6], GMWatch évoque aussi les problèmes de concentration des terres, l’expulsion des populations rurales aux frontières de l’Amazonie, et la mobilisation des subventions gouvernementales qui pourraient être utilisées à l’éducation, la santé et le développement de méthodes agro-écologiques.

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