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Haut Conseil des biotechnologies : quel avenir ?

Par Eric MEUNIER

Publié le 10/07/2019

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Le 1er juillet 2019, le mandat du Haut Conseil des biotechnologies (HCB) entrait dans les six derniers mois de son mandat. Nommés pour cinq ans, les membres actuels du HCB ne le seront officiellement plus le 31 décembre 2019. Mais, en attendant son renouvellement par le gouvernement français, force est de constater que le HCB a de moins en moins de ressources pour remplir ses missions de manière exhaustive.

En janvier 2019, le bureau du Haut Conseil des biotechnologies (HCB) décidait, par manque de ressources humaines suffisantes du côté de son Comité économique, éthique et social (CEES), de reporter son travail sur la question du saumon transgénique. Plus largement, depuis deux ans et demi, le HCB ne publie plus que des avis partiels en réponse à des demandes d’autorisation, avis composés du seul avis de son comité scientifique (CS), sans la recommandation du CEES sur les aspects éthiques, économiques et sociaux.

Audit du HCB : des conclusions bien gardées

Avant l’été 2018, un audit des deux premiers mandats du HCB était ordonné par les cinq ministères de tutelle de cette instance [1] pour faire un bilan de son travail et proposer des perspectives d’évolution. Le fruit de cet audit était attendu pour fin 2018 voire début 2019. Or le rapport final n’a toujours pas été rendu public ni communiqué au HCB et aux personnes anciennement membres du HCB également auditionnées. Selon nos informations, ce rapport d’audit a bien été remis aux ministères mais ces derniers sont toujours en train d’analyser les conclusions à en tirer. À ce jour, personne ne connaît donc les éventuelles «  perspectives d’évolution » du HCB.

Des perspectives d’évolution qui sont finalement simples : soit le HCB est maintenu dans sa forme actuelle, soit il est déstructuré mais avec comme obligation que ses missions soient toujours remplies. En 2017 justement, l’Office Parlementaire sur les enjeux liés aux choix scientifiques et technologiques (OPECST) recommandait par exemple « le transfert de toutes les missions confiées aujourd’hui au comité scientifique du HCB à l’ANSES  ». Le HCB deviendrait alors un collège unique – l’actuel CEES – dont la mission serait d’animer « le débat entre les acteurs, [faire] un état régulier de la situation sanitaire et environnementale, [évaluer] les données sur la biovigilance et [proposer] des évolutions éventuelles de l’encadrement règlementaire » [2].

Selon nos informations, le gouvernement actuel serait très sensible à l’importance des missions exercées par le HCB, et attaché à leur bonne réalisation. Une position qui ne préjuge donc en rien du futur de ce comité. Mais une difficulté apparaît car les missions aussi bien que la structure même du HCB sont fixées par la loi française de 2008 [3]. Une éventuelle évolution conduisant à modifier ou remplacer le HCB actuel impliquerait donc de changer la loi, et ce, avant le 31 décembre 2019. Un calendrier pour le moins serré d’autant que différents problèmes dans le fonctionnement actuel devront être pris en compte dans ces éventuelles évolutions.

Une composition incomplète depuis trois ans

Début 2016, un membre du Comité Scientifique et sept organisations membres du CEES ont démissionné du HCB. Une démission qui laissait également vacant un des deux postes de vice-Président du CEES occupé jusque là par Patrick de Kochko, alors représentant du Réseau Semences Paysannes. Ces organisations expliquaient faire «  le constat amer que tout débat sur la question des nouveaux OGM est forcément tronqué au sein du HCB » [4]. En réaction, le HCB avait notamment effectué un rappel interne de ses règles de fonctionnement pour permettre notamment que « les avis [adoptés] délivrent non seulement des messages clairs mais proposent un état des lieux de la question […] et rendent compte des discussions et controverses qui ont eu lieu en son sein » [5].

En 2017, le Président du CEES, Claude Gilbert, et la Présidente du HCB, Christine Noiville, démissionnaient à leur tour. Confiante, la Présidente sortante expliquait alors que « tout [était] mis en œuvre en haut lieu pour la nomination dans des délais proches d’un nouveau président pour le HCB. Il est vraisemblable que celle d’un nouveau président pour le CEES sera concomitante. De nombreuses personnalités ont été approchées » [6].

Pourtant, en juillet 2019, rien n’a changé. Aucun décret de nomination d’un nouveau Président n’a été pris, le poste étant, depuis le 1er janvier 2018, occupé par intérim par Jean-Christophe Pagès, en tant que Président du Comité scientifique. De son côté, le CEES est toujours plus qu’amputé de ses ressources puisque les sept sièges vides depuis 2016 sont toujours vacants, de même que le siège de vice-Président et celui de Président.

Moins de salariés et moins d’espace

En 2018, un des ministères de tutelle du HCB, le ministère de l’Agriculture, décidait, selon le HCB, de ne pas remettre un de ses salariés à la disposition du CEES, en remplacement du précédent salarié qui avait démissionné en début d’année 2018. Le CEES, déjà amoindri en termes de membres, perdait alors un de ses deux salariés mis à disposition pour préparer des dossiers. Contrairement au CS qui ne rencontre pas de difficulté à voir renouvelés les postes des salariés mis à sa disposition.

Le nombre de salariés à disposition n’est pas la seule réduction que le HCB a connu. Depuis le début de son second mandat, le HCB était logé dans les mêmes locaux que le Ministre de la transition écologique et solidaire, boulevard Saint-Germain à Paris. Mais, après une réduction progressive du nombre de bureaux mis à disposition [7], c’est finalement un déménagement qui a eu lieu en 2019. Aujourd’hui, le HCB est logé dans des locaux décrits comme plus petits et surtout, sans espace de travail alors « prévu pour accueillir le président de l’instance et les présidents des deux comités » comme cela était rapporté début 2019 [8]. Une situation annoncée comme temporaire en attendant un autre déménagement bien que « sans plus de précisions sur le lieu et la date de ce nouveau déménagement » mais avec possibilité pour le CS de continuer à se réunir Bd Saint-Germain [9].

Un avenir en pointillé

Moins de salariés, moins d’espace, une présidence par intérim et un comité économique, éthique et social partiel et sans présidence, aucun appel à candidature encore publié, un rapport d’audit non communiqué… Le constat n’est pas au beau fixe pour cette construction d’une expertise nationale souvent décrite comme originale (voir encadré ci-dessous). Ce qui l’amène à remplir sa mission de manière « étriquée ». Outre le report de son travail sur le saumon, le HCB ne rend plus d’avis puisque son CEES n’est pas en mesure de produire des recommandations. Concernant les réponses à des demandes d’autorisation d’OGM en 2018, seuls les avis du comité scientifique, sans recommandation du CEES, sont affichés sur le site Internet du HCB. Et de fait, le HCB ne publie plus que des avis partiels ou des réponses du comité scientifique à des sollicitations directes reçues des experts européens. Autant dire que la mission du HCB de fournir au gouvernement un éclairage complet incluant une évaluation des risques et une analyse des aspects sociétaux sur les OGM n’est plus remplie. Les six mois restants au gouvernement pour résoudre cette situation seront-ils suffisants ?

Le HCB, une création originale

Au sein de l’Union européenne, le Haut Conseil des biotechnologies est une originalité. Ce comité d’experts a été construit, sur la base notamment de la recommandation de la conférence de citoyens sur les OGM de 1998, de manière à ne pas fournir au gouvernement qu’un avis scientifique mais également une recommandation sur les questions sociétales que tel ou tel dossier OGM peut soulever. Deux comités le composent donc : le comité scientifique, regroupant des scientifiques représentant différents domaines d’expertise et le comité économique, éthique et social, regroupant des « élus, de représentants d’organisations professionnelles, de salariés, d’associations de protection de l’environnement, d’associations de défense des consommateurs et de personnalités qualifiées ». C’est ce qui fait l’originalité de cette organisation, non centrée sur la seule parole scientifique, du moins dans les textes.

[1Les ministères de tutelle du HCB sont les ministères de la transition écologique et solidaire, de l’agriculture, de l’économie et des finances, de la recherche et de la santé.

[2www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/rap-off/i4618-tI.pdf, recommandation n°20, page 286.

[3Loi n° 2008-595 du 25 juin 2008 relative aux organismes génétiquement modifiés.

[6Procès-verbal du Bureau du HCB du 22 novembre 2017.

[7Procès-verbal du Comité scientifique du 19 septembre 2018.

[8Procès-verbal du Bureau du HCB du 11 mars 2019.

[9Ibid.

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