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FRANCE – OGM : Information et participation du public : un encadrement juridique a minima
Après plusieurs rebondissements et une dizaine d’années d’attente, vient enfin d’être publié au Journal Officiel (JO) le texte qui encadre l’information et la participation du public aux décisions sur les OGM [1]. Entre le texte proposé au moment de la consultation publique et le texte final, il n’y a que quelques différences, par ailleurs décevantes.
L’objet de cette ordonnance n’est pas nouveau : depuis 2001, la France attendait la transposition de la directive 2001/18 en ce qui concerne l’information et la participation du public. Une première transposition plus globale est intervenue en 2007 par décrets [2], mais les dispositions touchant l’information et la participation du public ont finalement été annulées en 2009, par le Conseil d’État [3]. Motif : l’information et la participation du public sur les décisions concernant l’environnement sont du domaine de la loi et non du domaine règlementaire.
En 2011, c’est finalement par le biais d’une ordonnance que le gouvernement a décidé de faire cette transposition, ordonnance publiée au JO le 6 janvier 2012. Bien que légale, cette voie a évacué tout débat parlementaire. Cela est d’autant plus dommage que seul le retard pris par la France justifie aujourd’hui cette procédure d’urgence. Une consultation publique a été ouverte fin octobre 2011, consultation à laquelle la veille juridique d’Inf’OGM a participé. Les résultats de la consultation, eux, n’ont toujours pas été rendus public, mais les services du ministère de l’environnement ont affirmé que notre participation avait retenu toute leur attention. Difficile alors de savoir les différentes suggestions présentées sur ce texte, et les raisons du gouvernement de retenir ou non telles ou telles propositions.
La veille juridique d’Inf’OGM [4] a demandé à la ministre de l’Environnement [5] plus de transparence autour de ce texte, notamment en publiant les résultats de la consultation et les justifications quant aux choix du gouvernement.
Le texte publié est en fin de compte peu différent de celui proposé lors de la consultation à une exception notable près. Parmi les différentes propositions de la veille juridique d’Inf’OGM (notamment celles conduisant à une information rapide, précise et complète [6]), aucune n’a intéressé le gouvernement. Au contraire, les points dont se félicitait Inf’OGM dans la consultation ont été simplement supprimés du texte final : adieu la prise en charge des frais liés à l’information par le demandeur d’une culture ou d’un essai. Toutes références à cette possibilité ont été consciencieusement éliminées du texte publié au JO.
Le texte finalement retenu modifie le code de l’environnement et précise l’étendue de l’information du public ainsi que les modalités de sa participation.
L’article 2 énonce ainsi que, « sous réserve des informations reconnues comme confidentielles », devront désormais être rendus publics, une fois la procédure d’autorisation arrivée à son terme, les rapports d’évaluation, les décisions d’autorisation ou de refus, les avis du HCB, et les décisions de la Commission européenne (si une objection a été formulée par un État ou la Commission européenne). L’ensemble de ces informations doivent être regroupées dans un registre disponible sur internet.
Concernant les demandes d’autorisation pour un essai, l’article 3 précise le contenu de la « fiche d’information du public » : le but de la dissémination, le nom et l’adresse du demandeur, la localisation de la dissémination, la description de l’OGM, le résumé de l’évaluation des risques pour l’environnement, et le plan de surveillance et d’intervention en cas d’urgence. Cette fiche est affichée en mairie.
Pour les essais, cet article impose également une consultation du public par « voie électronique » et une annonce de cette consultation par publication dans le journal officiel.
L’ordonnance précise a minima la composition du dossier de demande d’autorisation ainsi que du dossier technique, mais elle renvoie à une précision ultérieure : le dossier de demande d’autorisation doit être précisé « par la voie réglementaire » et le dossier technique doit être précisé par décret en Conseil d’État.
L’ordonnance précise donc utilement la participation et l’information sur les OGM mais il est dommage qu’un texte attendu depuis une dizaine d’années se contente du strict minimum et ait été adopté dans une grande opacité. Plutôt ironique pour un texte supposé apporter un peu de transparence dans le processus décisionnel sur les OGM !
Au citoyen donc d’être vigilant, d’aller régulièrement en mairie et consulter le journal officiel pour être correctement informé et pouvoir faire valoir son droit de participation. Pas si simple dans les faits, d’autant que rien n’est fait pour faciliter sa tâche. Rappelons que la consultation qui portait sur le projet d’ordonnance, aujourd’hui publiée, s’intitulait « Projet d’ordonnance portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la prévention des pollutions et des risques ». Mais tout le monde aura compris qu’il s’agissait d’information et de participation du public en matière d’OGM bien sûr ! Nous voilà rassurés sur l’avenir de la démocratie participative en matière d’OGM.
[1] Ordonnance n° 2012-8 du 5 janvier 2012 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la prévention des pollutions et des risques
[2] Les décrets n°2007-358 et 2007-359 du 19 mars 2007, Information et participation du public sur les OGM : ouverture d’une consultation publique
[3] Arrêts du Conseil d’État du 24 juillet 2009 (n°305314 et 305315)
[4] représentant les Amis de la Terre, la Confédération paysanne, la FNAB, Inf’OGM, Nature & Progrès et l’UNAF