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Des brevets contestés
La Déclaration de Berne (DB), une ONG suisse, et le Centre Africain pour la biosécurité, une ONG sud-africaine, ont déposé conjointement un recours [1] contre deux brevets accordés à l’entreprise allemande Schwabe auprès de l’Office européen des brevets (OEB) : l’un concerne la méthode d’extraction de la substance active et l’autre le droit exclusif d’utilisation du pélargonium contre le sida. Schwabe a développé un médicament contre la bronchite, nommé umckaloabo®, grâce au pélargonium du Cap (une espèce de géranium sud-africaine). Or, des extraits de ces plantes sont utilisés en Europe depuis plus de 100 ans. Selon le site SwissInfo.com [2], « l’umckaloabo® est autorisé en Suisse depuis 2007. Selon l’ONG Déclaration de Berne, le produit des ventes s’est monté à environ 6 millions de francs en Suisse et environ 40 millions en Allemagne ». Ainsi, la communauté de la ville d’Alice, en Afrique du sud, via le Centre Africain pour la biosécurité, conteste l’octroi de ces brevets : « La population a accès à ces plantes depuis des temps immémoriaux ; elle utilise les racines pour traiter différentes affections de manière traditionnelle, tant chez les humains que les animaux », a déclaré Miriam Mayet, directrice de l’ONG, ajoutant que désormais cette plante était surexploitée. Ce recours est aussi soutenu par le professeur Fritz Dolder, spécialiste du droit des brevets à l’Université de Bâle (Suisse), qui soutient qu’il n’existe aucune base pour établir un brevet sur l’extraction, étant donné que ce processus n’est ni nouveau ni innovant. Quant à l’utilisation de pélargoniums contre le sida, il ajoute que ceci ne pourrait faire l’objet d’un monopole, car ces plantes ont déjà été utilisées de manière traditionnelle pour le traitement de maladies en relation avec le sida. Bien entendu, l’entreprise se défend et Traugott Ullrich, directeur du marketing et des ventes auprès de Spitzner Pharmaceuticals – une filiale de Dr Willmar Schwabe, a précisé à SwissInfo que « l’utilisation d’extraits de pélargoniums n’a pas seulement une longue tradition en Afrique, mais aussi en Europe, où ils sont utilisés dans le domaine médical depuis plus de 100 ans. Après 50 à 60 ans d’utilisation dans toute l’Europe pour différentes préparations, nous avons acheté le produit et l’avons développé plus avant. […] Nous disposons désormais d’une procédure d’extraction très complexe et très sophistiquée qui a été développée grâce à nos recherches et à nos investissements ; cette procédure ne peut pas être comparée à d’autres méthodes ».
Third World Network, une ONG internationale, a découvert récemment un autre cas de biopiraterie : « Des pays comme l’Indonésie, la Thaïlande ou le Viêt-nam ont remis de bonne foi des virus de la grippe aviaire à l’Organisation mondiale de la santé pour permettre le développement de vaccins. Mais ces virus se sont retrouvés chez des multinationales pharmaceutiques qui ont déposé des brevets sur ces ressources génétiques, sans même en informer les pays donateurs. Le partage des bénéfices, pourtant prescrit par la Convention sur la biodiversité, n’a jamais eu lieu ».
[2] http://www.swissinfo.ch/fre/swissin…
Informations complémentaires sur :
– le cas du pélargonium : http://www.evb.ch/fr/p14223.html
– le cas du virus de la grippe aviaire : http://www.evb.ch/fr/p14224.html