Partie Recherche et Environnement
Clonage : Le gouvernement de Tony Blair a récemment donné son aval à un rapport officiel concluant que le clonage de tissus cultivés à partir de jeunes cellules ouvrirait la voie à de nouveaux traitements. Cette décision d’autoriser le clonage thérapeutique doit maintenant être ratifiée par le Parlement à l’automne. De même, aux USA, le gouvernement a autorisé les recherches sur des cellules d’embryons humains En réaction, la ministre allemande de la Santé s’est dite opposée à l’idée d’autoriser le clonage à des fins thérapeutiques : « Je ne veux pas encore me prononcer définitivement, a-t-elle ajouté, mais l’argument de l’utilité ne suffit pas en soi ». En outre, le « besoin d’embryons ne pourra qu’augmenter et où en trouvera-t-on », a-t-elle ajouté. Les parlementaires allemands ont engagé une discussion afin d’adapter une loi vieille de dix ans. Mme Fischer a appelé à « ne pas prendre de décision précipitée ».
AFP, 17 août 2000 et Reuters, 23 août 2000
France : Bertrand Hervieu, président de l’INRA, a déclaré que « si la France doit rester une grande puissance agricole, elle doit rester une grande puissance semencière. Le risque est grand aujourd’hui de ne plus être autonome en matière de détention de matériel génétique ». Il a donc décidé d’orienter davantage les recherches vers la génomique végétale. Pour les financer, l’INRA appelle la profession agricole à participer aux orientations et au financement : « Que préfèrent les agriculteurs ? Constituer un fond de financement à la création des variétés qu’ils souhaitent […] ou bien verser […] des redevances à des sociétés internationales de semences qui leur imposeront les variétés à cultiver ? ». Enfin, l’INRA est opposé à la brevetabilité des variétés et défend le système des certificats d’obtention végétale.
AgraPress, n°2766, lundi 19 juin 2000
Des scientifiques de l’Université de Manchester, financés par le Ministère de l’Agriculture britannique, ont comparé l’ADN de 80 000 organismes différents et ont ainsi découvert qu’un gène appelé « mariner » avait passé 7 fois la barrière des espèces durant l’évolution. Or, ce gène est actuellement utilisé dans les constructions génétiques expérimentales. Par exemple, l’Institut Roslin l’a inséré dans des poulets afin que les œufs produisent des médicaments. Les chercheurs mettent en garde contre les risques que représente l’utilisation d’un tel gène.
New Scientist, vol 16, n°2244, 24 juin 2000
Rendements : D’après une étude du P. Elmore de l’Institut d’Agriculture et des Ressources Naturelles de l’Université du Nebraska, les rendements du soja transgénique ont été moindres que ceux du soja conventionnel. Monsanto a aussitôt qualifié cette étude de « scientifiquement invalide » et a rappelé que ses propres études ont montré que les rendements sont sensiblement les mêmes.
The Independant, 11 juin 2000
Lutte biologique : En 1999, dans le Haut-Rhin, 10 000 ha de maïs ont été protégés avec succès contre la pyrale, grâce à la lutte biologique réalisée par des lâchers d’un autre insecte : le trichogramme. Preuve s’il en est qu’il existe des alternatives au maïs transgénique résistant à la pyrale.
L’Alsace, 10 juin 2000
Alimentation animale : À la demande du ministère britannique de l’agriculture, l’Université de Leeds a mené une étude pour déterminer le degré de dégradation de l’ADN dans les aliments pour animaux. Les auteurs se sont penchés sur le transfert des gènes introduits dans les cultures génétiquement modifiées, en particulier les gènes marqueurs de résistance aux antibiotiques, susceptibles d’ôter toute efficacité au traitement des maladies infectieuses courantes. Ils en ont conclu que l’ADN n’est pas dégradé dans la plupart des conditions de transformation des produits commerciaux, ni au cours de l’ensilage.
MAFF Report CS0116 « Effect of feed processing conditions on DNA fragmentation »
Projets
En France, l’INRA va planter 2500 plants de vigne transgénique, pour la résistance au court noué, dans la région de Colmar au lieu du sud de la France – lieu prévu initialement – où les risques de destructions par les activistes sont plus grands. Les producteurs alsaciens ont demandé que l’essai se déroule hors des parcelles d’appellation (AOC). L’essai se fera sur des terres indemnes de ce virus : il faudra donc volontairement les contaminer auparavant.
Un autre projet consiste à modifier génétiquement des melons Cantaloup Charentais afin de retarder leur mûrissement. Or, la modification entraîne aussi une réduction de la production d’arôme.
Des chercheurs britanniques se proposent de modifier génétiquement des moustiques pour lutter contre le paludisme.
Des généticiens cherchent à utiliser le venin d’une araignée australienne pour rendre une céréale capable de tuer les insectes nuisibles. Ce venin ne sera pas produit entièrement par la plante car le venin « total » est mortel pour l’homme. Des chercheurs craignent que ce type d’OGM accroisse la résistance des insectes aux pesticides et que l’arachnogène se dissémine dans l’environnement.
La Vigne, n° 111 – juin 2000, ENSAT, Cyberscience, 22 juin 2000, Agence science presse, 19 juin 2000
Décodage du génome humain et course aux brevets
Le vendredi 23 juin, Celera Genomics et les membres du Human Genome Project sont parvenus à un accord pour l’annonce commune de la réalisation de la carte complète de l’ADN. Après des luttes concurrentielles, les deux entités, la première privée, basée dans le Maryland, et la seconde publique, rassemblant des chercheurs du monde entier, ont choisi de mettre leurs efforts en commun. L’ADN humain a été déchiffré à plus de 90 % et il est disponible sur l’Internet, dans la base de données Genbank. Pour obtenir une séquence complète et exacte à 99,99 %, trois années sont encore nécessaires. Mais ce séquençage n’est qu’une toute première étape, car il reste à comprendre comment s’organise le génome. Non seulement un gène peut avoir plusieurs fonctions, mais il peut aussi jouer un rôle différent selon qu’il est transmis par le père ou la mère ou selon sa place sur le chromosome. Les gènes interagissent les uns sur les autres, avec parfois jusqu’à 100 gènes différents impliqués dans une réaction métabolique. Enfin, dernière difficulté, un même gène peut produire des protéines différentes, selon l’organe ou l’organisme qui le porte.
Cette compétition sur le génome risque maintenant d’être alimentée par une course économique aux brevets. Aux Etats-Unis, la simple description d’un gène, même sans identification d’une de ses fonctions, suffit à le breveter. L’autre source de revenus proviendra des tests génétiques sur les risques de maladie. « Les entreprises vont se ruer pour localiser chaque gène caché dans cette carte. Ce dont le public n’a pas conscience, c’est que, dès que ces gènes seront isolés, localisés et définis, ils seront brevetés comme des inventions », a déclaré Jeremy Rifkin, auteur du Siècle Biotech. Il demande aussi qu’une législation interdise aux employeurs et aux compagnies d’assurance toute discrimination fondée sur les gènes.
Le Monde, Libération & Humanité, 24-26 juin 2000, AFP, 20 juin 2000