Nouveaux OGM mais vieux débats
En 1996, les premiers cargos étasuniens arrivent en Europe remplis de soja transgénique. Associations environnementalistes, syndicats agricoles et une foule de citoyens anonymes se mobilisent et exigent que ces plantes modifiées génétiquement (PGM) soient évaluées et étiquetées. En 2016, les entreprises espèrent commercialiser rapidement de nouveaux OGM… tout en espérant échapper à la législation actuelle sur les OGM, jugée trop contraignante.
Pendant plusieurs milliers d’années, les paysans ont pratiqué la sélection massale qui consiste à choisir dans une population à fécondation libre les grains qui seront utilisés comme semences l’année suivante. Les populations de plantes ont une très grande variabilité génétique.
Un développement technologique qui s’accélère
Au XIXe siècle, Vilmorin commence à travailler sur des plants individualisés. Avec le développement de la génétique, les semenciers mettent alors au point des lignées pures, qu’ils croisent ensemble pour obtenir des hybride F1. Développés en Europe après la seconde guerre mondiale, ces semences F1 ne sont plus reproductibles à l’identique mais sont censées être plus vigoureuses. Dans les années 1960, les premières plantes modifiées par mutagénèse aléatoire font leur apparition, puis trente ans après, les plantes transgéniques sont commercialisées. A partir de 2007, la Commission européenne lance le débat sur les « nouveaux OGM ». Ces nouvelles techniques sont dans la droite ligne de l’approche génétique qui a cours depuis un siècle.
La Commission joue le suspense…
Depuis 2007, les citoyens et États membres de l’Union européenne sont dans l’attente de l’analyse promise par la Commission européenne quant au statut « OGM » ou non des plantes ou des animaux obtenus avec ces nouveaux procédés. Pendant ce temps, le lobby des entreprises s’intensifie à Bruxelles.
Mais ce lobby fait resurgir des vieux arguments. Philippe Joudrier (Inra) affirmait ainsi en 2004, qu’avec « les techniques transgéniques, un an suffit [pour créer une variété] et l’on est sûr du résultat. On connaît parfaitement la construction génétique qui a été faite ». Ce chercheur estimait « qu’en toute logique, toutes les nouvelles variétés – qu’elles soient transgéniques ou conventionnelles – devraient être évaluées selon les mêmes critères », donc ne nécessitaient pas de cadre OGM particulier car « ces modifications génétiques sont plus précises et bien mieux maîtrisées que lorsqu’il s’agit de créations conventionnelles »… Une argumentation que l’on retrouve aujourd’hui pour ces nouvelles techniques qui permettront encore « d’améliorer » les plantes pour résoudre la faim dans le monde et lutter contre le changement climatique. Les OGM transgéniques ont échoué ? Vive les nouveaux OGM ! Quand changera-t-on de paradigme ?