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Relaxe des 58 faucheurs de Pointville : un jugement fort !

Par Anne FURET

Publié le 05/06/2008, modifié le 27/02/2025

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Le 5 juin, le tribunal correctionnel de Chartres a relaxé 58 faucheurs. Après le jugement d’Orléans de 2004, il s’agit du deuxième jugement dans ce sens dans l’histoire des Faucheurs volontaires.

En août 2007, à Pointville, 58 personnes ont détruit un essai de maïs GM en plein champ, de Monsanto. Comme en 2004, le Tribunal a justifié la relaxe par l’état de nécessité, qui constitue en droit pénal, un fait justificatif d’infraction. La caractérisation de cet état de nécessité est conditionnée par l’existence d’un danger actuel et imminent, et par la proportionnalité entre la gravité de la menace et les moyens mis en oeuvre pour la prévenir.
Très largement motivé (une vingtaine de pages de motivation), ce jugement reconnaît la légitimité de l’action de désobéissance civile des faucheurs, en usant de justifications sévères à l’encontre de Monsanto.
Pour caractériser le danger imminent que représentait la parcelle de maïs GM, les juges se sont appuyés, de manière plutôt inhabituelle, sur des notions scientifiques. La motivation repose en effet en grande partie sur l’avis de janvier 2008 du comité de préfiguration de la Haute autorité sur le MON810 [1] : la « réelle dissémination des pollens de maïs sur des distances de plusieurs kilomètres » , « la diffusion incontrôlée des gènes modifiés dans l’environnement » et « irréversible », la proximité de huit ruches par rapport à l’essai, la « possibilité d’effets toxiques avérés à long terme sur les lombrics », « l’identification de résistance sur certains ravageurs cibles »… Le juge conclut que ces éléments constituent un danger pour « le libre choix des agriculteurs et des consommateurs entre différents types d’exploitations agricoles », et ce d’autant plus que ces derniers ne peuvent prétendre à aucune assurance en cas de contamination. Le juge ajoute au passage « il ne peut plus être omis que l’action de « désobéissance civile » a contribué à la prise en compte de cette question des OGM dans le cadre du Grenelle de l’environnement ».
Sur la nécessité de l’action et sa proportionnalité, le juge souligne que l’autorisation d’essai a été délivrée sur la base d’une directive mal transposée, et que « Monsanto a porté directement atteinte au droit de propriété des autres paysans sur leurs productions et plus largement au droit de tout citoyen à un environnement sain ». Dans ces circonstances, le fauchage d’une parcelle n’a que des « conséquences limitées au regard du principe de précaution et de la nécessaire protection de l’environnement reconnue constitutionnellement ».
D’autre part, et à remarquer car il s’agit là d’une première, le tribunal ne contraint pas les faucheurs à payer les dommages et intérêts subis par Monsanto… car Monsanto se trouve être « le responsable du danger qui a permis de caractériser l’état de nécessité »…
Poursuivi également pour refus de se soumettre au prélèvement ADN, l’ensemble des prévenus a été relaxé [2].
Le Parquet et Monsanto ont d’ores et déjà fait appel.

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