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Cantines vraiment sans OGM : la Bretagne s’y met progressivement

Par Pauline VERRIERE

Publié le 18/03/2016

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Du « sans OGM » dans les cantines scolaires de Bretagne ? Une enquête du réseau Cohérence constate un intérêt croissant des gestionnaires de cantines pour le « sans OGM » dans l’élaboration des menus. Le Réseau propose différentes pistes d’actions pour faciliter l’introduction de ces produits.

Depuis sa création en 1998, le réseau Cohérence [1] s’est prononcé pour une Bretagne sans OGM et il est à l’origine d’un guide pour consommer sans OGM en Bretagne [2], qui a fait des émules dans plusieurs autres régions françaises [3]. Récemment, Cohérence a publié une étude [4] qui dresse un état des lieux sur le choix du ’’sans OGM’’ dans les cantines scolaires de Bretagne. Forte de cette étude, l’association travaille désormais à la mise en place des recommandations qu’elle avait formulées.

Écoles primaires, collèges et lycées relèvent de la responsabilité des communes, départements et régions. Ces collectivités accompagnent les gestionnaires, personnel de l’éducation nationale, dans la gestion des cantines scolaires. Les achats nécessaires au fonctionnement de ces établissements, que se soit pour des stylos ou des yaourts, doivent faire l’objet de marchés publics. Sur la base de critères sélectionnés, et dans le cadre de la loi, des appels d’offre sont ainsi lancés. À la question du prix, peuvent être ajoutés d’autres critères, par exemple de qualité, de proximité… Les fournisseurs répondant aux critères peuvent ainsi candidater à ces appels d’offre. Dans ce cadre, il existe différentes possibilités de gestion des cantines scolaires [5].

Seulement sept groupements d’achats, mais des pratiques différentes

L’étude du réseau Cohérence détaille ainsi le modèle d’approvisionnement fonctionnant en région Bretagne et comment la question des OGM est intégrée progressivement aux préoccupations des acteurs bretons de la restauration collective.

Dans cette région, la quasi totalité des collèges et lycées a rejoint un des sept groupements d’achats mis en place sur le territoire [6]. Ces groupements permettent de mutualiser les achats dans des marchés publics communs et de réaliser ainsi des économies. Ils permettent également de donner plus de points à la mise en place de certains critères comme par exemple l’introduction de produits « sans OGM ». Les producteurs seront d’autant plus enclins à changer leurs pratiques que les commandes seront importantes. Les établissements sont libres de participer ou non à un marché, et peuvent rester autonomes sur certains achats, auquel cas, ils s’occupent de leur propre marché public.

Sur la question des OGM, ces sept groupements se disent « très attentifs à ce sujet ». Un intérêt qui se répercutait en 2014 différemment dans leur cahier des charges. Quatre groupements excluaient les produits étiquetés comme contenant des OGM (ils ne concernent donc pas les produits animaux nourris avec des OGM), la cité scolaire La Perousse n’acceptait que du porc exclusivement nourri sans OGM et le groupement Pays de Saint Malo proposait du « sans OGM » pour l’ensemble des filières « viande ». Enfin, le groupement du Finistère n’avait pas à l’époque d’exclusion spécifiée dans son cahier des charges.

Malgré ces différences de critères dans les cahiers des charges, l’étude du réseau Cohérence constate, de façon plus générale, une homogénéité dans les procédures d’achats des sept groupements. Ils utilisent tous la procédure de « marché de fourniture et de livraison de produits alimentaires », pour se fournir en denrées brutes. Il n’y a en revanche pas de marché de gestion concédée. Les cantines de la région ne sont pas prises en charge par des entreprises extérieures.

C’est entre les établissements que les différences sont plus importantes. Notamment, lorsqu’un établissement souhaite ajouter certains critères (par exemple produits locaux), les établissements ont tendance à faire leurs achats en dehors du groupement. Les produits sous signe de qualité (Label Rouge, Agriculture biologique) sont encore peu présents dans les « catalogues » des groupements, mais ces derniers tentent peu à peu d’introduire des marchés spécifiques pour des produits bio.

Si la viande provient majoritairement de France, les groupements font état d’une réelle difficulté dans la mise en place de critères « nourris sans OGM », principalement en ce qui concerne le contrôle de la véracité de l’étiquetage. Car s’il est facile de vérifier directement l’étiquette des produits végétaux (la mention OGM doit y être inscrite en toute lettre si c’est le cas), la tâche est plus ardue pour les produits animaux, et ce, pour deux raisons : la majorité des animaux d’élevage consomment des aliments à base d’OGM ; et l’étiquetage de cette pratique n’est pas obligatoire. Seule possibilité offerte aux éleveurs ne donnant pas d’OGM à leurs animaux : la possibilité, depuis juillet 2012, d’apposer une étiquette « nourris sans OGM » [7].

L’approvisionnement en lait « sans OGM » est impossible compte tenu de l’absence de filière française spécifique sur ce créneau (hormis en agriculture biologique). L’étude constate que la demande en lait des établissements publics de la région Bretagne est suffisamment importante en volume pour « stimuler la création de filière par les opérateurs bretons ». Avec le risque, si les opérateurs bretons ne s’adaptaient pas à cette demande, que « ce marché leur échappe au profit de fournisseurs allemands ou autrichiens ».

Vers une harmonisation des cahiers des charges pour le « sans OGM »

Avec cet état des lieux, le réseau Cohérence propose plusieurs outils à développer pour permettre à la restauration collective de s’engager plus facilement dans le « sans OGM ». L’association propose tout d’abord une harmonisation du cahier des charges des sept groupements d’achat pour exclure à la fois les produits contenant des ingrédients génétiquement modifiés, mais également les produits issus d’animaux nourris aux OGM. Une information accrue doit également être réalisée à destination des fournisseurs et des acteurs de la restauration collective, par exemple les communes en charge des cantines du primaire. L’objectif est de mieux leur faire connaître l’existence de l’étiquetage « sans OGM » et de convaincre les uns d’intégrer ces produits dans les cantines, les autres de choisir ce mode de production. Enfin, il est également préconisé la mise en place de contrôles aléatoires auprès des fournisseurs.

Depuis juillet 2015, plusieurs groupements, accompagnés par le réseau Cohérence, accentuent leurs efforts sur trois produits particuliers : poulet, viande fraîche de porc et œufs. Trois produits pour lesquels la mention «  issus d’animaux nourris sans OGM » est désormais inscrite dans les critères de passation de marchés publics.

Concernant la viande de porc, les fournisseurs ont pu répondre au « sans OGM » au même prix parfois que la viande conventionnelle habituellement achetée. Des réponses positives ont également été reçues pour les lots « Poulet Label Rouge ». En revanche, pour les œufs, aucun fournisseur en décembre 2015 n’avait encore répondu à l’appel d’offre. Le réseau Cohérence souligne l’importance de donner le temps au marché de se structurer. Il est nécessaire que les groupements montrent leur intérêt pour les produits « sans OGM » auprès des coopératives ou autres fournisseurs, pour que ceux-ci, à terme, ajustent leur production.

La mise en place progressive de ces exigences est nécessaire pour assurer une transition douce tant pour les gestionnaires de cantines que pour leurs fournisseurs…

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