Pas de souveraineté alimentaire sans participation citoyenne
Comment concrétiser l’ensemble des droits humains, et notamment le droit à l’alimentation et à la nutrition ? Ce rapport annuel de « L’observatoire du droit à l’alimentation et à la nutrition » [1]) tente de répondre à cette question avec un ensemble de textes multithématiques (pêche, semences, OGM, genre…) et multigéographiques. Une certitude s’en dégage : rien ne se fera sans un recours aux connaissances des populations acquises à travers leurs luttes quotidiennes pour préserver leurs moyens d’existence.
Dans cet ouvrage, les mouvements sociaux présentent la souveraineté alimentaire comme une alternative aux politiques qui reproduisent l’exclusion sociale, la discrimination et génèrent la faim, notamment au sein des communautés rurales. La souveraineté alimentaire repose sur les droits humains, le droit à l’autodétermination, ainsi que les droits à la terre, aux territoires et aux autres ressources naturelles.
L’engagement proactif de la société civile est mis en évidence comme étant essentiel à la proposition d’alternatives aux politiques dominantes destructrices. Le droit humain des personnes à participer à la prise de décisions portant sur la concrétisation du droit à l’alimentation revêt un caractère tout aussi important que leur droit à être protégés de toute répression lorsqu’ils protestent en public. L’indivisibilité des droits humains à cet égard est démontrée chaque jour.
L’investissement privé, parfois légitime, exclut souvent les acteurs de la société civile de la planification et de la mise en œuvre des projets. Des études de cas montrent clairement que l’adoption de modèles participatifs constitue le meilleur moyen de garantir la concrétisation du droit à l’alimentation et à la nutrition pour toutes et tous.
Deux contributions intéresseront plus particulièrement nos lecteurs : d’une part, celle de Marcos Arana Cedeño (entre autres chercheur à l’Institut mexicain national de nutrition), sur la résistance aux OGM dans la région Maya du Mexique, qui illustre bien la nécessité de mobiliser le public pour faire appliquer les instruments juridiques de manière effective, dans le but de stopper les menaces actuelles à la diversité culturelle et biologique de la région maya ; d’autre part, un texte de Guy Kastler (administrateur d’Inf’OGM), Antonio Onorati et Bob Brac, tous trois spécialistes des semences, intitulé « semences et autonomie paysanne », dans lequel ils affirment que « les paysans ne peuvent apporter leur indispensable contribution à la conservation et au renouvellement de la biodiversité sans la reconnaissance et le respect de leurs droits de ressemer, conserver, protéger, échanger et vendre leurs semences ». Malheureusement, ces droits sont remis en question au niveau mondial par les lois sur la propriété intellectuelle. L’Observatoire appelle à l’instauration d’un droit collectif des paysan-ne-s sur les semences, et plaide pour que ces derniers jouissent d’un accès à toutes les semences, libres de tout droit de propriété intellectuelle et pour que les paysan-ne-s prennent part à l’élaboration des règles et règlementations régissant les systèmes semenciers.
[1] Cet ouvrage, intégralement et gratuitement disponible sur le web, est édité par les ONG Brot für die Welt (Pain pour le monde), FIAN et ICCO Coopération. L’observatoire du droit à l’alimentation et à la nutrition (www.rtfn-watch.org), coordonnateur de ce rapport annuel, regroupe un consortium d’une quinzaine d’ONG de différents pays « du Nord » (États-Unis, Suisse, Italie, Danemark, Espagne…) mais aussi « du Sud » (Malaisie, Égypte, Équateur, Bénin…), travaillant sur les droits humains.