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BELGIQUE – Feu vert pour l’essai de peupliers transgéniques

Par Christophe NOISETTE

Publié le 06/05/2009, modifié le 27/02/2025

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La ministre flamande de la Science et de l’Innovation, Patricia Ceysens, du VLD (parti Open Vlaamse Liberalen en Democraten, Libéraux et démocrates flamands) a planté, le 6 mai 2009, le premier peuplier génétiquement modifié à Zwijnaarde, près de Gand. Il s’agit d’un essai en champ obtenu par le Vlaams Instituut voor Biotechnologie (VIB) qui comporte, en tout, 448 peupliers. Ces arbres sont répartis sur deux lignes de 120 arbres transgéniques chacune, entourées par des peupliers non modifiés. Les peupliers génétiquement modifiés sont censés produire 20% de lignine en moins, une matière collante qui dérègle la transformation en bioéthanol, et 17% de cellulose en plus, une substance qui peut être transformée en carburant. La première récolte est prévue pour dans trois ans, les arbres seront alors coupés en copeaux, lesquels seront transformés en bioéthanol.

Nature & Progrès, association de promotion de l’agriculture biologique, rappelle que les ministres avaient motivé leurs refus de cet essai, notamment à cause de la présence d’un gène marqueur de résistance à un antibiotique. Dans son communiqué, l’association conclut donc que les ministres ont simplement « oublié » leurs motifs.
L’opposition n’est pas que nationale. Une coalition internationale a, dès le lendemain de cette annonce, réagi fermement et dénoncé ces essais en champs qui risquent de contaminer largement les populations endogènes de peupliers. Comme le précise le Dr. Miguel Lovera, Président de la Global Forest Coalition : « Il existe plus de 30 espèces de peupliers qui vivent sous une multitude de climats, du nord de l’Europe et du Canada jusqu’aux zones sous tropicales. Leur pollen et leurs semences peuvent se diffuser sur des centaines de kilomètres. Ils peuvent aussi se propager de façon asexuée, via la multiplication végétative, et peuvent donc repousser à partir de la souche si l’arbre est abattu ». Par ailleurs, cette coalition, présente via ses membres dans 45 pays, estime que les agrocarburants non seulement ne sont pas une solution au changement climatique, mais encore ont un impact négatif sur la sécurité alimentaire mondiale. Les agrocarburants non alimentaires comme les arbres vont monopoliser des terres, soit prises sur les surfaces agricoles destinées à l’alimentation, soit gagnées sur les forêts.

Le peuplier GM augmentera l’effet de serre

Enfin dernier grief exposé par la coalition vis-à-vis de cet essai : la crainte que la dissémination de la modification génétique, à savoir la faible production de lignine, endommage les forêts environnantes, rendues plus vulnérables. La lignine, qui représente de 15 à 36 % du bois, assure trois fonctions, selon l’Inra [1] : « elle permet d’imperméabiliser les parois des vaisseaux et rend ainsi possible le transport de la sève sur de grandes distances, des racines jusqu’aux branches. La lignine influe également sur les propriétés mécaniques des fibres de bois, nécessaires à l’édification du tronc et au soutien de l’arbre. D’autre part, la lignine aide l’arbre à se défendre contre l’attaque des champignons et des insectes. Ainsi toute modification de la lignine du bois entraîne potentiellement des répercussions importantes sur la croissance et le développement des arbres ». Enfin, une étude, publiée en 2007 dans The New Physiologists [2], précise que les peupliers génétiquement modifiés à taux de lignine réduit stockent 30% de moins de carbone que les variétés conventionnelles et 70% de moins de carbone dans les sols. Enfin, ces arbres pourrissent plus vite, et ainsi relâchent plus rapidement leur carbone dans l’atmosphère. Ainsi, pour la coalition, les arbres GM sont loin d’être une réponse au changement climatique. Et elle conclut en précisant qu’on ne pourra pas convertir notre actuelle consommation énergétique (issue majoritairement du pétrole) et qu’il faut en premier lieu réfléchir à limiter les gaspillages, réduire notre consommation énergétique globale et ensuite chercher des voies durables pour la produire et la transformer pour un usage quotidien.

[2« Biomass partitioning and soil carbon formation in response to altered lignin biosynthesis in Populus tremuloides », Hancock JE et al., Plant growth, New Phytol. 2007, 173(4), 732-42

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