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OGM et semences : les réponses de Jean-Luc Mélenchon (Union populaire)
Réponses de Jean-Luc Mélenchon (Union populaire) au questionnaire d’Inf’OGM sur les OGM, les semences et les brevets.
Si vous êtes président, quelle sera votre politique en matière d’OGM ?
Nous refusons les OGM, que ce soient les OGM obtenus par la technique historique de la transgenèse, les « OGM cachés » (variétés rendues tolérantes aux herbicides issues de mutagénèse in vitro…) ou les nouvelles techniques génomiques (NBT).
Nous interdirons à la fois la culture de ces OGM en France, mais également l’importation de produits OGM, puisque nous souhaitons appliquer nos normes de production aux produits importés.
Nous défendrons le principe de non-brevetabilité du vivant pour empêcher l’appropriation d’organismes végétaux ou animaux par des entreprises privées.
La Commission européenne souhaite exclure certains OGM des requis de la loi actuelle (étiquetage notamment). Comment vous situez-vous dans ce débat en cours ?
Nous sommes contre la dérégulation des OGM au niveau européen. Tous les OGM, y compris les NBT – qui présentent les mêmes risques économiques, sociaux et environnementaux que les OGM « traditionnels » et des risques spécifiques –, doivent se conformer à la réglementation européenne sur les OGM. Les États membres doivent en outre conserver leur droit de restreindre ou d’interdire la culture d’OGM sur leur territoire. Nous nous opposerons donc aux volontés de la Commission européenne d’exclure certains OGM du cadre réglementaire européen actuel.
La France a adopté un moratoire sur la culture des maïs transgéniques. Cependant, des plantes OGM, issues de la mutagénèse sur cellules isolées cultivée in vitro sont cultivées sur le territoire français (colza Clearfield, et tournesol Clearfield+, par exemple). Suite à l’arrêt de la CJUE, le Conseil d’État a jugé que la mutagénèse aléatoire in vitro donnait des OGM à réglementer selon la directive 2001/18. Allez-vous donc étendre le moratoire sur les maïs transgéniques à l’ensemble des OGM ?
Oui, nous étendrons le moratoire sur les maïs transgéniques à l’ensemble des OGM. Nous nous conformerons à la décision de la CJUE du 25 juillet 2018 ; en ce sens nous appliquerons enfin les injonctions du Conseil d’État du 7 février 2020.
La France importe plus de quatre millions de tonnes de soja transgénique, cultivé notamment au Brésil, pour nourrir son bétail. Que pensez-vous de cette situation ? Allez-vous exiger l’étiquetage de tous les produits issus d’animaux nourris aux OGM ?
Cette situation est un non-sens écologique, paysan, social et économique. D’une part, elle encourage l’utilisation massive de pesticides en Amérique du Sud, détruisant les écosystèmes et empoisonnant la population locale. D’autre part, elle bloque les éleveurs français dans un cercle vicieux de dépendance à l’égard du soja importé pour nourrir leur bétail. Puisque nous nous opposons à la culture d’OGM en France et à une alimentation animale contenant des OGM, et que nous souhaitons appliquer nos normes de production aux produits importés, il ne devrait pas y avoir besoin d’étiqueter les produits issus d’animaux nourris aux OGM puisqu’ils seront logiquement interdits sur le sol français. En revanche, si une période de transition est nécessaire pour certaines filières « tendues », nous exigerons évidemment l’étiquetage de tous les produits issus d’animaux nourris aux OGM. La priorité est avant tout de faire évoluer nos systèmes de productions alimentaires vers une agriculture écologique et paysanne pour mettre fin à la dépendance aux importations de soja transgénique. Pour cela, nous voulons favoriser le développement de systèmes d’élevage herbagers et autonomes, et également diminuer la consommation de produits carnés. C’est pourquoi nous proposons de :
renforcer, notamment par les aides couplées de la PAC, le soutien à la production de légumineuses à destination de l’alimentation humaine et animale ;
renforcer via la PAC (triplement du budget des mesures agro-environnementales et climatiques gouvernementales – MAEC) le financement des systèmes d’élevage herbagers ;
doubler le budget consacré à la conversion et au maintien en agriculture biologique (OGM interdit pour l’alimentation animale dans le cahier des charges bio) ;
interdire les fermes-usines, planifier la sortie de l’élevage intensif au plus tard en 2027 et réduire la production de protéines animales, en accompagnant les agriculteur·ices dans la transition (soutien PAC) ;
fixer un objectif de réduction de 50 % de la consommation moyenne de protéines animales.
Les semences paysannes ne sont toujours pas réellement encouragées. Elles sont pourtant un outil pour augmenter la résilience des cultures dans le cadre du changement climatique et autres phénomènes environnementaux. Souhaitez-vous leur développement ? Si oui, que proposez-vous pour cela ?
Nous défendons une agriculture écologique et paysanne : nous souhaitons donc évidemment favoriser le développement des semences paysannes. Il est indispensable de libérer les paysans de la mainmise des multinationales sur les semences. Nous serons donc à l’écoute des propositions des représentants du monde paysan pour faire évoluer la situation en ce sens.
Actuellement se déploie l’idée d’une agriculture 2.0, basée sur la robotique, la numérisation (big data), la génétique. Faut-il encourager le développement de cette agriculture ou au contraire revenir à une vision plus paysanne de l’agriculture ?
Nous sommes opposés à la vision d’une agriculture 2.0, dans laquelle les agriculteurs sont toujours plus dépossédés de leurs savoirs-faire et autonomie sur leurs moyens de production. L’agriculture paysanne est à la base de notre projet de bifurcation écologique pour l’agriculture. Nous souhaitons accompagner l’ensemble des agriculteurs dans cette transformation de nos systèmes agricoles et alimentaires, notamment grâce à une réforme en profondeur de la PAC (voir chapitres 3, 4 et 5 du livret Agriculture).
Nous souhaitons par ailleurs libérer la recherche agronomique du poids des lobbys privés au moyen d’un financement public à 100 % des activités de l’Institut national de la recherche agronomique et environnementale (INRAE), des universités et autres institutions publiques de recherche travaillant dans le domaine agricole (IRD, etc.).
Est-il acceptable de pouvoir déposer des brevets sur des organismes vivants ? Dans le cas de l’agriculture et de l’alimentation, ne voyez-vous pas une contradiction avec l’autonomie alimentaire et l’indépendance des paysans ?
Nous défendons le principe de la non-brevetabilité du vivant, y compris pour les OGM et toutes les plantes et animaux issus de techniques de manipulation du génome. Nous interdirons donc les dépôts de brevet sur les organismes vivants pour empêcher l’appropriation d’espèces animales ou végétales par des entreprises privées, souvent au détriment des communautés locales et indigènes.
Il est pour nous évident que la souveraineté alimentaire que nous défendons, basée sur une agriculture écologique et paysanne, n’est pas compatible avec un système où le vivant est brevetable.