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États-Unis – Monsanto ne poursuivra pas les agriculteurs contaminés par moins de 1% d’OGM
Une contamination génétique, aux Etats-Unis, peut-elle donner lieu à des poursuites pour violation du droit de la propriété industrielle ? Réponse en demi-teinte de la justice étasunienne…
Le 10 juin 2013, la Cour d’appel fédérale à Washington (U.S. Court of Appeals for the Federal Circuit) a confirmé [1] le jugement en première instance et rejeté la demande [2] d’une cinquantaine d’agriculteurs biologiques, de semenciers indépendants et d’associations agricoles, qui souhaitaient que Monsanto ne puisse les attaquer pour violation de brevet en cas de présence fortuite d’un transgène de Monsanto dans leur production.
En mars 2011, un collectif de cultivateurs « sans OGM » dont de nombreux agriculteurs biologiques ou des semenciers indépendants, a cherché à démontrer que ses membres n’avaient aucune intention ni aucun intérêt à cultiver les semences de Monsanto, et qu’ils avaient pris des mesures pour éviter de le faire. Cependant ils craignent de devenir les cibles de contentieux si jamais des modifications génétiques, propriétés de Monsanto, sont retrouvées dans leurs maïs, soja ou dans leurs autres cultures.
Entre 1997 et 2010, Monsanto a en effet intenté 144 procès et a négocié 700 arbitrages pour atteinte à la propriété intellectuelle arguant que ses semences GM étaient cultivées sans payer de redevances. Les plaignants demandaient donc à la Justice de les protéger des poursuites éventuelles de Monsanto si jamais des transgènes brevetés étaient retrouvés dans leurs champs ou silos [3].
Néanmoins, selon les juges, Monsanto a pris des engagements [4] assez clairs qui empêcheront toute poursuite des utilisateurs et des revendeurs de semences contenant moins de 1% de semences GM Monsanto. « Les plaignants n’ont avancé aucune intention concrète ni aucune activité les menant à utiliser ou vendre plus que des traces de semences GM, et ainsi ont échoué à prouver tout risque d’être poursuivis sur cette base ». Selon les juges, même si Monsanto a refusé de signer une convention avec les agriculteurs qui l’engageait à ne pas les poursuivre, les déclarations accessibles sur le site Internet de l’entreprise sont des garanties suffisantes.
Néanmoins que se passerait-il si plus de 1% de semences GM étaient retrouvé ? Cette probabilité n’est pas négligeable, puisqu’aux États-Unis environ 50% des exploitations agricoles utilisent des semences GM…
Selon Dan Ravicher, directeur exécutif de la Fondation pour des brevets publics, qui représentait les agriculteurs biologiques lors du procès, cette décision est une victoire partielle. Auparavant, les bio ne cultivaient pas une partie de leurs terres, par peur d’être poursuivis par Monsanto pour atteinte au droit de propriété intellectuelle. Monsanto s’est maintenant engagé juridiquement à ne pas poursuivre les plaignants. La récente découverte d’un blé GM dans l’Oregon confirme que la maîtrise absolue d’une filière étanche est un leurre.
[3] Fin 2012, Monsanto avait empoché plus de 23 millions de dollars (18 millions d’euros) de dommages et intérêts de la part de fermiers américains, après avoir intenté pas moins de 142 procès pour violation des brevets contre 410 agriculteurs et 56 petites entreprises agricoles. Mi-février, un rapport du Center for food safety intitulé « Les géants des semences contre les fermiers américains » expliquait que l’entreprise emploie 75 personnes et un budget de 10 millions de dollars pour ces poursuites judiciaires. Ce contrôle tenace inquiète aussi les agriculteurs qui n’ont pas acheté de semences Monsanto, mais dont les champs, entourés de cultures OGM, sont susceptibles de se faire contaminer, voir http://www.lemonde.fr/planete/article/2013/05/17/des-etats-unis-a-l-europe-a-qui-appartiennent-les-plantes-cultivees_3235181_3244.html