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SUISSE – Graines viables de colza OGM importées avec du blé canadien

Par Christophe NOISETTE

Publié le 07/09/2015

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Après Lugano, c’est dans la région bâloise, toujours aux alentours des voies ferrées et de la zone portuaire, que du colza génétiquement modifié (GT73 résistant à l’herbicide Roundup) a été découvert en 2012. Ce colza GM est illégal en culture sur le territoire suisse, et son importation pour l’alimentation humaine et animale est également interdite. Trois ans après, des chercheurs suisses expliquent que ce colza vient des importations de blé canadien.

Les chercheurs de Biome, une agence d’expertises environnementales, ont testé 136 plantes, dont 29 se sont révélées transgéniques. Ils précisent dans un communiqué de presse [1] que « le colza GM a été introduit dans l’environnement lors du déchargement de bateaux ou de trains de marchandises ». Greenpeace a remis aux autorités de Bâle-Ville et de Bâle-Campagne certains de ces plants contaminés.

Ce nouvel épisode d’une contamination à grande échelle prouve, une fois encore, que le colza est une plante dont la dissémination dans l’environnement est quasiment impossible à contrôler. Les chercheurs soulignent en effet : « le colza est pollinisé par les insectes qui peuvent transporter son pollen sur plusieurs kilomètres ; ses graines sont très petites et se dispersent facilement tout en gardant un pouvoir germinatif sur dix ans ; le colza peut se croiser avec différentes espèces sauvages apparentées comme la moutarde brune (Brassica juncea) ou la Ravenelle (Raphanus raphanistrum) ce qui rend possible une dispersion du transgène dans la flore sauvage ».

A la suite de la révélation de cette contamination, Greenpeace et l’association StopOGM demandent « aux importateurs de renforcer leurs contrôles de qualité lors de l’importation de semences, de fourrages et de denrées alimentaires. Les Ports Rhénans suisses et les autorités cantonales doivent également revoir leur surveillance environnementale pour garantir que du colza GM ne poussera plus sur des terrains leur appartenant. Les coûts engagés pour maintenir un environnement sans OGM sont supportés par toute la collectivité. Et cela alors qu’une large majorité de la population s’oppose fermement à toute production transgénique, comme des sondages et des votations l’ont montré à maintes reprises. En fin de compte, le responsable de tous les cas de contamination avec du colza transgénique dans le monde est le producteur du colza GT73, c’est-à-dire Monsanto. Greenpeace examine actuellement les possibilités de placer Monsanto face à ses responsabilités ».

Le blé canadien : vecteur de la contamination

Le 25 juin 2015, quatre chercheurs suisses publiaient dans la revue Environmental Science and Pollution Research [2] un article qui explique la présence de ces colzas génétiquement modifiés en Suisse. Ils ont noté que le port rhénan de Bâle était une des portes d’entrée du blé dur en Suisse et qu’en 2010 et 2013, « 19 % de l’ensemble du blé importé en Suisse venait du Canada ». Or au Canada « 90 % des colzas cultivés étaient génétiquement modifiés ». Ils ont alors émis l’hypothèse que les impuretés de colza pouvaient venir des importations de blé. Pour vérifier cette hypothèse, ils ont analysé des échantillons de déchets recueillis pendant le nettoyage mécanique du blé canadien dans deux moulins suisses, Jewa (Wildegg) et Swissmill (Zurich) dont les blés transitent par Bâle. Ils ont non seulement trouvé du colza, mais du colza capable de germer (le taux de germination a été évalué entre 16 et 34%) et bien entendu transgénique (la proportion OGM est entre 47 et 67%). Ils ont aussi établi qu’il y avait en moyenne 0,005 % de colza dans le blé importé. En remontant la chaîne des causalités, ils ont aussi établi que ces impuretés venaient d’une rotation culturale très répandue outre-Atlantique, car recommandée par le Canola Council of Canada (Conseil du colza au Canada). Le colza, plante à petites graines dont une partie tombe au sol lors de sa récolte, repousse facilement d’une année sur l’autre.

La Suisse a importé, entre 2010 et 2013, 77 512 tonnes annuellement de blé (dur et tendre confondus). Les chercheurs estiment donc que la Suisse a importé à son insu plusieurs dizaines de millions de semences de colza transgénique viables…

Le fait que ce colza GM a débarqué dans ce pays via le blé explique que cette présence n’a pas été détectée. Car premièrement, le blé GM n’existe pas : les importations de blé sont donc rarement soumises à des analyses PCR ; et deuxièmement, le nettoyage mécanique du blé élimine aussi les impuretés.

[2Schulze & al., « Low level impurities in imported wheat are a likely source of feral transgenic oilseed rape (Brassica napus L.) in Switzerland », Environ Sci Pollut Res, 2015, http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26109224

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