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QUEBEC – Etiquetage des OGM : c’est à nouveau non pour le gouvernement
Le gouvernement québécois refuse de prendre en compte une nouvelle pétition qui demande l’instauration d’un étiquetage obligatoire des produits contenant des OGM.
Deux pétitions, signées, au total, par 14 554 citoyens québécois, ont été déposées à l’Assemblée nationale le 16 février 2012 : elles demandaient que le gouvernement québécois impose, sans délai, l’étiquetage obligatoire des produits contenant des OGM. Cette pétition s’appuie sur les recommandations de la Commission parlementaire sur la sécurité alimentaire qui, en 2004, préconisait un tel étiquetage obligatoire [1]. Cette pétition est parrainée par le député Eric Caire et c’est sous le nom du nouveau parti de M. Caire, la Coalition Avenir Québec, qu’elle a été présentée à l’Assemblée nationale.
Le gouvernement vient de répondre par la négative à cette pétition. Dans cette réponse qu’Inf’OGM s’est procurée, le ministre de l’Agriculture, Pierre Corbeil, déclare que « rendre obligatoire l’étiquetage des aliments contenant des organismes génétiquement modifiés est une opération fort complexe […] qui va bien au-delà de la simple apposition d’une étiquette sur un produit. De plus, l’obligation de cet étiquetage aurait des impacts non seulement sur les grandes industries mais également sur certaines de nos petites entreprises de transformation alimentaire ». Il ajoute : « Le ministère de l’Agriculture […] doit agir avec prudence et prendre en considération non seulement les attentes des consommateurs mais également celles de l’industrie et de ses partenaires commerciaux ».
Le ministère québécois de l’Agriculture argumente aussi que le Québec ne vit pas dans une bulle, qu’il peut difficilement s’autodiscipliner si ses concurrents ne se soumettent à aucune règle du genre. « Si le Québec imposait l’étiquetage obligatoire des aliments avec OGM, il serait le premier et le seul en Amérique du Nord à adopter et à appliquer une telle réglementation ». Le ministre souligne divers facteurs à prendre en compte et à étudier rigoureusement si le Québec s’engage seule dans cette réglementation, comme « la compétitivité des entreprises québecoises », « l’absence de douanes entre les provinces canadiennes » ou encore « la diminution de l’offre des produits aux consommateurs ».
Or, ce que réclament les associations, c’est que le Québec, en s’engageant en faveur de l’étiquetage des OGM, entraîne avec lui l’ensemble du continent nord-américain.
La réponse du ministre se termine par un argument fallacieux. Il affirme qu’au Québec, très peu d’aliments sont concernés : les aliments consommés par les Québécois qui contiennent des dérivés d’OGM représenteraient « environ 3% du panier d’épicerie ».
Interrogé par Inf’OGM, Eric Darier, de Greenpeace Québec, explique : « Il se base sur la présence d’OGM dans le produit final qui souvent ne sont pas détectables. On sait que 70% des aliments transformés vendus au Canada contiennent du maïs, du soja, du colza ou du sucre (issu de betterave GM ou de fructose de maïs) qui sont OGM, selon les chiffres du ministère canadien à la Santé. Mais le tour de passe-passe est plus subtil : pour arriver à ce pourcentage, l’étude prend en compte l’ensemble du panier d’épicerie, et inclut les fruits et légumes frais qui ne sont pas génétiquement modifiés. L’étude exclut, en revanche, la viande, considérant qu’aucun animal génétiquement modifié n’est commercialisé. Cependant, le lait, le fromage, les oeufs et la viande qu’on mange proviennent d’animaux nourris aux OGM. Autre problème : les tests effectués portaient sur les aliments qu’on retrouve dans les supermarchés. Cette approche garantit qu’on ne détectera qu’une partie des OGM dans l’alimentation puisque dans certains cas, comme l’huile de canola, il est difficile de détecter l’ADN de l’OGM et ceci, même si plus de 95% des champs de canola sont OGM ! Il aurait été plus judicieux de faire des tests sur les ingrédients bruts avant leur transformation ».
Mais Eric Darier va plus loin et précise que « beaucoup de gens souhaitent l’étiquetage des OGM non seulement parce qu’ils ne veulent pas en manger, mais aussi parce qu’ils ne veulent pas encourager la culture d’OGM, pour des raisons environnementales ».