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ETATS-UNIS – La littérature scientifique sous l’influence de l’industrie des OGM
Septembre 2012, Gilles-Eric Séralini et son équipe publient dans le journal Food and Chemical Toxicology (FCT) une étude de deux ans qui met en doute l’innocuité sanitaire du maïs NK603 et de l’herbicide associé, le Roundup. Cette étude a engendré une tempête internationale et une campagne de dénigrement avait été orchestrée par le Science Media Center [1] afin que le journal se rétracte. Parmi les scientifiques les plus virulents dans cette campagne, nombreux avaient des liens très étroits avec l’industrie des OGM. Finalement, le journal Food and Chemical Toxicology a maintenu la publication. Mais, quelques mois après, au début de l’année 2013, le Comité de rédaction de ce journal a intégré un nouvel « éditeur associé pour les biotechnologies » [2], un certain Richard E. Goodman. Il s’agit d’un nouveau poste, au sein de la revue, qui semble avoir été créé spécialement pour Goodman. Or ce professeur à l’Université du Nebraska, en charge des recherches sur les allergies alimentaires, a travaillé pour l’entreprise Monsanto entre 1997 et 2004. Il a publié en 2004 une étude (Goodman et Leach, 2004) qui affirmait que les OGM ne provoquaient aucun problème d’allergie. Et dans un autre article publié en 2011, Goodman s’est positionné en faveur d’un allègement des « exigences » officielles en matière d’évaluation allergologique [3].
Par ailleurs, Goodman a travaillé de façon continue avec l’organisation de lobby de l’agro-alimentaire, l’International Life Science Institute (ILSI) dont un certain nombre de membres siègent au sein de l’Agence européenne de sécurité alimentaire (AESA) [4]. L’ILSI développe et réussit à introduire dans les législations des méthodes d’évaluation extrêmement favorables à l’industrie [5].
Enfin, cette nomination est d’autant plus surprenante que cette revue a déjà dans son comité de rédaction un expert en sécurité sanitaire des OGM avec José L. Domingo, professeur de toxicologie et santé environnementale. Malheureusement pour l’industrie, dans deux études (Domingo 2007 ; et Domingo et Bordonaba 2011), il a exprimé son scepticisme par rapport à l’innocuité sanitaire des OGM.
Cette nomination pose de nombreuses questions quant à l’objectivité de cette revue. Monsanto a désormais une bonne courroie de transmission au sein de la revue pour décourager la publication d’études qui seraient contraire à ses intérêts économiques.
[1] , « Etude Séralini – Médias : entre scoop et critique radicale », Inf’OGM, 27 novembre 2012
[2] en anglais Associate Editor for biotechnology
[3] Goodman R.E. and Tetteh A.O. (2011). Suggested improvements for the allergenicity assessment of genetically modified plants used in foods. Curr Allergy Asthma Rep. 11(4):317-324)
[4] , « UE – L’AESA et l’industrie : des relations incestueuses renouvelées », Inf’OGM, 21 mai 2013
[5] , « Expertise des OGM : l’évaluation tourne le dos à la science », Inf’OGM, 9 octobre 2012