FRANCE : une transparence bien opaque
Le registre des cultures commerciales de maïs génétiquement modifié (GM) a été publié sur le site du ministère de l’Agricul-ture (1). Les surfaces y sont données par canton. Un dispositif “en rodage” qui en mécontente plus d’un…
Le 4 juillet, on apprenait que 19 815 ha de maïs GM MON810 – le seul maïs GM autorisé à la culture dans l’UE – avaient été déclarés. Le 10 juillet, le ministère actualisait le registre annonçant 1 358 ha de plus. Fin juillet, la surface progressait encore pour atteindre 21 686,35 ha. Selon le ministère, ces ajustements sont dus à des transmissions tardives de données par ses services déconcentrés et parfois par les agriculteurs.
Pourquoi ce registre ? Un décret du 19 mars 2007 prévoit de rendre publique la localisation des cultures GM, sans plus de précision. C’est dans un communiqué de presse que le ministère de l’Agriculture annonçait que ces informations seraient agrégées par canton. Le registre a été établi sur la base des déclarations des exploitants qui devaient être transmises aux DDA (Directions Départe-mentales de l’Agriculture) ou SRPV (Services Régionaux de Protection des Végétaux) avant le 15 mai, ce qui, semble-t-il, n’a pas toujours été le cas. Ce registre est jugé insatisfaisant par nombre d’acteurs du monde agricole. En l’absence de localisation précise et d’obligation d’information du voisin, les agriculteurs conventionnels ou bio peuvent difficilement éviter une contamination de leur récolte…
A cet égard, une décision de justice souligne le caractère ubuesque de la situation. Le 12 juillet, la Cour d’appel d’Agen a statué sur la demande des époux Coudoin, apiculteurs dans le Lot, de détruire ou castrer les cultures de maïs MON810 d’un agriculteur voisin, en prévention d’une contamination de leur miel. La Cour a rejeté cette demande, déclarant que “le trouble invoqué dépend dans une large mesure de l’attitude de l’apiculteur” qui a la possibilité de transhumer (2)… Mais dans un canton où sont cultivés 170 ha de maïs GM, où transhumer ? Pour la production de miel biologique, la réglementation oblige les apiculteurs à s’éloigner des sources potentielles de pollution du miel, y compris des plantes GM (PGM). Mais comment s’en éloigner lorsqu’on ne sait pas où sont cultivées ces PGM ? En outre, un apiculteur n’est pas libre de mettre ses ruches où il veut et la transhumance impose des accords pré-alables avec les propriétaires des terrains.
En Allemagne, la localisation parcellaire des cultures GM est accessible à tous, par voie électronique et lorsqu’un cultivateur souhaite cultiver des OGM, il doit en informer ses voisins deux mois avant la mise en culture.
Plusieurs Conseils Régionaux (Aquitaine, Bretagne, Bourgogne, Midi-Pyrénées, Pays de la Loire, Rhône-Alpes) ont immédiatement réagi à la publication du registre. Avec 500 ha de cultures déclarées, la Région Poitou-Charentes a décidé “de prendre en charge le coût des analyses de détection”. Dans ce cadre, elle a lancé un appel à projet à destination des agriculteurs bio et conventionnels situés à proximité d’une des 55 parcelles de PGM. Une procédure de passation de marché est engagée : elle permettra de prendre en charge le coût des prélèvements, des frais d’huissier, et des analyses de détection (3).
Dans le cadre de sa mission d’information, Inf’OGM a demandé, mi-juillet, à la Direction Générale de l’Alimentation (DGAl) la communication de la localisation parcellaire. En l’absence de réponse de la DGAl, Inf’OGM a saisi mi-août la Commission d’accès aux documents administratifs.
Dernière minute : la DGAl vient de nous préciser que l’absence de déclaration est sanctionnée par six mois de prison et 30 000 euro d’amende. Actuellement aucune procédure n’a été engagée, malgré le constat de certaines irrégularités par les associations.