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OGM : la production d’ARN double brins n’est pas évaluée

Par Eric MEUNIER

Publié le 10/06/2013

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Certaines plantes sont aujourd’hui génétiquement modifiées non pour produire une protéine issue d’un ADN transgénique, mais pour produire un ARN double brins. Les ARN, sous forme double brins, interviennent dans la régulation de l’expression génétique. Or, les gouvernements du Brésil, Nouvelle-Zélande et Australie n’évaluent pas, ou de manière incomplète, ces molécules, alors qu’elles soulèvent de nombreuses questions, a révélé une équipe de scientifiques dans un article publié dans la revue Environment international [1].

Dans un interview à GM Watch [2] en mars 2013, le Pr. Heinemann, de l’Université de Canterbury en Nouvelle-Zélande, dénonce les « négligences systématiques des gestionnaires de risques sanitaires et environnementaux quant aux problèmes de sécurité que posent ces plantes génétiquement modifiées et les nouveaux produits contenant des molécules appelées ARN double brins ». Pour le scientifique, « toutes les plantes GM [modifiées pour exprimer une protéine transgénique ou de l’ARN] devraient être évaluées par rapport à la présence non voulue d’ARN double brins ». Après avoir épluché les travaux des comités d’experts du Brésil, d’Australie et de Nouvelle-zélande, le scientifique explique qu’il n’y a jamais eu « pour des PGM commerciales, d’analyses de toxicité aigüe ou chronique faites qui auraient pu détecter un quelconque effet dû aux molécules d’ARN double brins […] potentiellement exprimable par ces PGM ». Et de préciser qu’aucune procédure d’analyse ni de lignes directrices internationales n’existe pour conduire de telles analyses.

Pour le Pr. Heinemann, ces analyses ne devraient pas être évitées au prétexte que l’on en consomme tous les jours sans pour autant tomber malade. Ce qu’avance pourtant le comité d’experts néo-zélandais, dans une réponse publiée en mai 2013 [3] : « les petits ARN double brins sont présents partout dans l’environnement et les différents organismes que nous consommons, incluant les végétaux et animaux. Ce qui établit une longue histoire de consommation sans risque par l’humain ». Les experts ajoutent également que « les auteurs ont sous-estimé la capacité de l’évaluation conduite à détecter des effets inattendus, dont ceux pouvant provenir du phénomène d’extinction des gènes » (ndlr, un phénomène lié à la présence d’ARN). En clair, pour les experts néo-zélandais, le constat porté par le Pr. Heinemann dans son article n’est pas valable.

En Europe, la question des ARN avait été abordée suite à la publication d’un article de scientifiques chinois en 2011 qui montrait que de petits ARN provenant de la nourriture pouvaient interférer avec le fonctionnement génétique d’animaux et d’humains ayant ingéré ces aliments, même cuits [4]. Suite à une question de l’eurodéputée Sandrine Bellier, l’Agence européenne de sécurité des aliments (AESA), mandatée par la Commission européenne, répondait qu’il s’agissait d’un problème « d’importance générale concernant les impacts sanitaires de l’alimentation humaine et animale » mais qu’il ne fera pas l’objet d’une évaluation avant autorisation pour toutes les plantes transgéniques ! Ainsi, cette évaluation se limitera « aux plantes GM dont les modifications d’expression de gènes auront été obtenues par utilisation d’ARNmi  », ignorant ainsi toutes les autres PGM. Par ailleurs, aucune information sur le contenu même de cette évaluation n’était fournie par l’AESA et aucune suite n’a été donnée, au moins publiquement. La non réponse aux questions des députés est décidément une habitude bien établie de l’AESA [5].

[1Heinemann, J.-A., and al., « A comparative evaluation of the regulation of GM crops or products containing dsRNA and suggested improvements to risk assessments », 2013, Environment international, vol55, p.43-55

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