RIR et chocs à Ouagadougou
RIR, et non pas rires, encore que ces rencontres très sérieuses se soient déroulées dans la bonne humeur. Alors en fait « RIR OGM » pour Rencontres Internationales des Résistances aux OGM. Les RIR OGM, premier événement du genre se déroulant sur le sol africain, ont été initiées par le Collectif Citoyen pour l’Agro-écologie en partenariat avec Ingalañ, une association bretonne qui, depuis 2004, fait la promotion d’un commerce équitable local et international exigeant, et Napam Béogo. Il s’est tenu à Ouagadougou, capitale du Burkina Faso, du 22 au 24 avril. Jacques Dandelot, administrateur d’Inf’OGM et Faucheur volontaire, y était.
Les rencontres ont réuni environ 200 personnes, venues de 10 pays (Algérie, Argentine, Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, France, Guinée Conakry, Mali, Niger, Togo). Elles ont eu lieu essentiellement à Napam Béogo, espace culturel et structure d’accueil et de réinsertion socio-professionnelle dans l’artisanat et l’agro-écologie au Burkina Faso. Ingalañ et Napam Béogo mènent un programme multi-actions nommé « Tinga-Neere » qui s’intéresse à l’agroforesterie, au développement du soja biologique, au compostage, au Système de Riziculture Intensive et au maraîchage biologique.
CHOC 1 – choc thermique – 1
Départ de Roissy Charles de Gaulle, mercredi 20 avril 16h15, 14°C… 5h30 plus tard et à plus de 4000 km… aéroport de Ouagadougou, 41°C…
CHOC 2 – choc culturel
Première impression sur le sol africain : de l’aéroport à Napam Béogo… Sept km ambiance nuit, pas ou peu d’éclairage public, brouillard de poussière, feux domestiques au bord de la route… un autre monde existe !
CHOC 3 – la brakina
Première bière fraîche bue à Napam Béogo lieu de séjour et également de déroulement des RIR
CHOC 4 – LE CHOC DES RIR
Il y a de beaux et bons chocs ! Les rencontres faites d’atelier, de témoignages, de prises de décisions, de déclaration finale et de motions de soutien ont été d’une très grande richesse. Le débat autour de la culture du coton génétiquement modifié est très vif. Suite aux pertes financières subies depuis plus de dix ans de culture du coton Bt, les cotonculteurs n’en veulent plus du tout. Les sociétés cotonnières quant à elles demandent des indemnités à Monsanto – pour elles bien sûr, pas pour les paysans – mais sont prêtes à commercer à nouveau avec cette « entreprise bienfaitrice » qui promet déjà de nouvelles variétés de coton GM très productives, avec des fibres longues et qui seraient aussi résistantes au Roundup ! La classe quoi ! Richesse assurée mais pour qui ? Des cotonculteurs et éleveurs burkinabés en grandes difficultés financières ont avec force et dignité raconté leurs déboires et affirmé leur opposition définitive aux OGM. Un autre temps fort a été le témoignage de Sofia Gatica. Cette mère de Cordoba (Argentine), qui a perdu un enfant suite aux épandages de Roundup, témoigne sur le combat des familles contre ces pratiques criminelles (voir encadré ci-dessous). Des représentants de quasi tous les pays d’Afrique centrale et de l’Ouest ont expliqué la menace qui pèse sur l’agriculture paysanne de cet arc africain. La complicité entre les gouvernements, les multinationales et les richissimes bienfaiteurs à l’instar de la Fondation Bill & Melinda Gates qui veulent nourrir le monde oblige les opposants à une lutte permanente et difficile. La participation à de telles rencontres où on est en présence de paysans et de citoyens en prise directe avec la catastrophe « OGM » donne une autre dimension et recharge nos batteries pour ce combat partout ailleurs. La difficulté est de coordonner et de poursuivre ces luttes communes. Une suite des RIR est en cours de préparation pour le forum des peuples qui aura lieu en même temps que le tribunal Monsanto prévu en octobre 2016 à la Haye aux Pays-Bas. Il y a beaucoup de difficultés à surmonter mais rendez-vous en octobre, on n’a pas fini de RIR.
CHOC 5 – CHOC THERMIQUE – 2
Départ Ouagadougou… 42°C, arrivée Paris… 4°C
Sofia Gatica rencontre les femmes burkinabées
À la suite des RIR-OGM, des rencontres ont été organisées entre des femmes de la région de Dande et Bama en zone cotonnière, Sofia Gatica, militante argentine et Najet, Faucheuse volontaire. Ces femmes burkinabées sont inscrites dans un programme de la Fédération Nationale des Organisations Paysannes (FENOP) et du Réseau d’appui à la citoyenneté des femmes rurales d’Afrique de l’Ouest et du Tchad (RESACIFROAT). Elles étaient présentent lors des RIR-OGM pour promouvoir leur campagne « Nous sommes la solution ». En effet, pour elles, la solution serait de leur donner la possibilité de promouvoir l’agriculture familiale, de former d’autres femmes rurales aux techniques agro-écologiques adaptées à la région mais aussi être présentes dans des instances décisionnaires du mode d’agriculture. Accueillies sous l’arbre à palabre par une cinquantaine de femmes, Sofia a raconté la situation catastrophique liée à l’épandage d’herbicides sur les champs de soja GM en Argentine, récit accompagné des photos très parlantes des blessures des manifestants en lutte contre l’installation d’une nouvelle usine de Monsanto. Elle a aussi évoqué les enfants, victimes de malformations mystérieuses dans la région de Cordoba (Argentine) où le soja transgénique est cultivé. Najet a présenté le collectif des Faucheurs volontaires. L’idée que certaines personnes plantent des OGM et que d’autres les coupent n’a pas manqué de faire rire. Nous avons ensuite pu voir le chantier école, c’est-à-dire un potager où il se teste des rotations de cultures maraîchères. Promis, nous continuerons à échanger.