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États-Unis : autorisation d’un cochon OGM à la consommation
Aux États-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) a autorisé le 14 décembre 2020, un porc génétiquement modifié pour la consommation humaine et pour un usage thérapeutique. Il s’agit donc du deuxième animal OGM autorisé pour la consommation humaine, après le saumon transgénique.
Un porc génétiquement modifié vient d’être autorisé aux États-Unis par la Food and Drug Administration (FDA), qui s’en félicite dans un communiqué publié le 14 décembre 2020 : « cette toute première autorisation d’un produit de biotechnologie animale à la fois pour l’alimentation et comme source potentielle d’utilisation biomédicale représente une étape importante pour l’innovation scientifique« [1].
Lutter contre une allergie…
Nommé GalSafe, et développé par l’entreprise Revivicor Inc. (actuellement propriété de United Therapeutics Corp), ce cochon a été génétiquement modifié pour que ses cellules ne contiennent plus de sucre alpha-gal (galactose-alpha). Depuis 2009, un phénomène d’allergie à cette molécule a été renseigné, d’abord aux États-Unis, puis en Australie et désormais en Europe. Selon wikipedia, « l’allergie à l’alpha-gal semble toujours initiée par une piqure de tique (dont plusieurs espèces prolifèrent depuis les années 1970 dans de nombreuses régions du monde) et elle survient un peu plus souvent suite à la consommation d’abats que de viande rouge ».
Concrètement, la modification consiste à détruire la fonction d’un gène appelé GGTA1, qui code pour une enzyme appelée glycoprotéine galactosyltransférase alpha-1,3, qui est responsable de la production des sucres alpha-gal. Ceci a été réalisé en ciblant l’insertion du transgène nptII dans le gène GGTA1, détruisant ainsi sa fonction normale.
… en neutralisant l’action d’un antibiotique ?
Or le trangène nptII est un gène de résistance à la néomycine, un antibiotique. L’OMS alerte régulièrement sur l’augmentation problématique des cas de bactéries devenues résistantes à un ou plusieurs antibiotiques. La présence d’un tel gène pourrait participer à une augmentation de ces résistances. La FDA dans son rapport d’autorisation rejette cette possibilité. Elle précise cependant que « même si cette augmentation [de résistance aux antibiotiques] se produit, elle ne devrait se produire que dans l’environnement local (c’est-à-dire le sol où sont épandus le fumier, les carcasses ou autres restes d’animaux provenant des porcs GalSafe®)« . L’autorisation est d’ailleurs limitée à un site de production dans le nord de l’Iowa (avec une limite de 1000 porcs GalSafe par an) et à un abattoir dans le Dakota du Sud. Ces sites seront inspectés par le ministère de l’Agriculture, est-il encore précisé. La FDA précise clairement que tous changements, comme par exemple « une augmentation du nombre de porcs élevés par an, nécessiteraient le dépôt et l’examen d’une demande supplémentaire ».
Une autorisation uniquement pour l’alimentation humaine
Question innocuité, le Center for Food Safety souligne que l’entreprise n’a pas testé cette viande sur des personnes allergiques, mais uniquement sur des personnes saines. Comme le souligne GMWatch, même si ce type d’allergie augmente, le nombre de personnes atteintes de ce syndrome reste faible. Il n’y a donc pas de réel marché pour ce genre de cochon GM. À l’origine, ces travaux visaient le développement de cochon destiné à la production d’organes pour les humains (en vu de ce qu’on appelle une xénotransplantation). En effet, la molécule alpha-gal est une des causes des rejets par l’homme des transplantations dérivées du porc. Mais ce n’est pas la seule cause de rejet. Des tentatives de xénotransplantations sur des babouins, d’organes issus de porc génétiquement modifié pour ne pas produire cette molécule, se sont avérées être des échecs à long terme. La FDA précise dans son autorisation « que ces porcs n’ont pas été évalués en vue de leur utilisation comme produits de xénotransplantation pour la transplantation ou l’implantation sur des sujets humains. Les développeurs de tels produits médicaux humains doivent d’abord soumettre une demande à la FDA et obtenir son approbation avant que ces produits puissent être utilisés en médecine humaine ». Demande qui pourrait être rejetée du simple fait de la présence d’un gène de résistance à un antibiotique …
Fournir des produits thérapeutiques pour l’humain
Interrogée par Inf’OGM sur la notion de « produit thérapeutique », la FDA nous répond que « les porcs GalSafe pourraient potentiellement fournir une source de matériaux à base de porc pour fabriquer des produits médicaux humains exempts d’alpha-gal détectable. La raison de l’utilisation du mot « potentiel » est que les promoteurs de tels produits médicaux humains doivent d’abord (…) obtenir une autorisation [de la FDA] avant que ces produits puissent être utilisés en médecine humaine. Parmi les exemples de produits, on peut citer l’héparine ou le collagène, un médicament qui fluidifie le sang. Les porcs GalSafe pourraient également être une source appropriée de tissus et d’organes pour la transplantation d’organes de porcs à l’homme. En général, la présence du sucre alpha-gal dans les cellules, tissus ou organes animaux transplantés provoque des réponses immunitaires hyperactives à médiation IgG, IgM ou IgE chez les personnes (pas seulement celles atteintes du syndrome alpha-gal) et le rejet ultérieur de la transplantation. (…) Là encore, de telles utilisations nécessiteraient (…) une autorisation ». La FDA profite de cette réponse pour préciser qu’elle a déjà autorisé de tels animaux d’une part, et les molécules thérapeutiques ensuite. En 2009, une chèvre génétiquement modifiée puis une molécule destinée à la médecine humaine (Atryn), en décembre 2015 [2], un poulet transgénique, puis la molécule Kanuma (sébélipase alfa), ou encore en 2019, un lapin transgénique et ensuite la molécule nommée Sevenfact en tant que tel.
Pourquoi cette entreprise a-t-elle demandé une autorisation pour un usage autre que celui prévu originellement et pour un si petit nombre d’animaux ? Interrogée, l’entreprise n’a pas répondu à nos questions…
Il semble fort probable que ces autorisations sont un premier pas vers des autorisations plus larges bénéficiant de cette première expérimentation à échelle réduite augmentant l’acceptabilité sociale de ces modifications génétiques.