OGM dans l’UE : quelle information disponible ?
Dans les années 90, les critiques sur son opacité ont conduit l’Union européenne (UE) à introduire de la transparence dans le processus décisionnel. L’accès aux documents devait permettre aux citoyens de comprendre les étapes dans la prise de décision, et ainsi conférer une légitimité à ces décisions. Mais il existe une tension entre les informations disponibles et la capacité des citoyens à les trouver et à les comprendre. Cela est particulièrement le cas en matière d’OGM.
Dans les années 90, les critiques sur son opacité ont conduit l’Union européenne (UE) à introduire de la transparence dans le processus décisionnel. L’accès aux documents devait permettre aux citoyens de comprendre les étapes dans la prise de décision, et ainsi conférer une légitimité à ces décisions. Mais il existe une tension entre les informations disponibles et la capacité des citoyens à les trouver et à les comprendre. Cela est particulièrement le cas en matière d’OGM.
En Europe, le législateur a décrété que pour : « disposer d’un cadre législatif complet et transparent, il est nécessaire de garantir que le public soit consulté par la Commission ou les États membres dans le cadre de la préparation de mesures, et soit informé des mesures prises ». Qu’il s’agisse de mise en culture expérimentale d’OGM, d’autorisation commerciale ou de surveillance de l’environnement, des informations doivent être rendues publiques.
Recevoir les documents de la Commission ? C’est possible !
Chacun peut adresser à la Commission européenne une demande d’accès aux documents qu’elle possède sur un sujet et une période donnée. Les documents communiqués (courriers électroniques, papiers de position, notes aux commissaires…) sont par définition écrits, non couverts par une exception de confidentialité et bien souvent en anglais ou en langue nationale.
Réservé uniquement aux anglophones…
Pour le domaine commercial, commençons par les procédures d’autorisation. Pour remplir leurs obligations légales, les autorités comptent sur pas moins de dix pages Internet. L’Autorité européenne de sécurité des aliments (Aesa) met en ligne la partie publique des dossiers de demande d’autorisation déposés, ses avis et résultats de consultations publiques, dossier par dossier. Les dossiers mis en ligne sont une version courte des dossiers déposés par les entreprises, de nombreuses informations étant considérées comme confidentielles, voire non rendues publiques spontanément comme les données complètes des analyses d’impacts. Mais, réservés aux anglophones uniquement…
La procédure de vote, gérée au niveau européen, est renseignée sur six pages Internet avec proposition d’autorisation, vote et décision finale. Dernier site consultable : le site du Centre Commun de Recherche, qui recense l’ensemble des méthodes de détection fournies pour chaque évènement autorisé. Un site uniquement en anglais, tout comme le registre des OGM autorisés commercialement…
Enfin, les essais en champ sont décrits par la Commission européenne sur une seule page, mais encore et toujours uniquement en anglais. Leur localisation précise est quant à elle rendue publique par les États membres concernés [1].
… et aux personnes connectées
Dans le domaine commercial, les produits contenant ou produits à partir d’OGM doivent être étiquetés comme tels. Mais pas les produits issus d’animaux nourris aux OGM (lait, viande…) ni ceux servis en restauration collective.
Ensuite, les plans de surveillance environnementaux après commercialisation sont obligatoires pour tout OGM autorisé à la culture depuis 2001. L’entreprise effectue elle-même cette surveillance et soumet ses rapports à la Commission européenne, qui les met en ligne.
Les cas de contamination connus dans l’Union européenne font l’objet d’une information rendue publique sur Internet sur le site des « Alertes de sécurité alimentaire ». Ce site permet de connaître les cas de contamination déclarés et les suites données. Pour plus de détails, il faut se plonger dans les comptes-rendus de réunions des États membres au sein du Comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale.
Paradoxe : la transparence prévue par la législation est une construction unilatérale de la transparence, sans faire appel aux citoyens. Car, si beaucoup d’informations doivent être mises à la disposition du public, encore faut-il que ce public soit connecté et anglophone. On notera ici que d’après l’Eurobaromètre de 2012, seuls 38 % des européens sondés parlaient assez bien anglais pour tenir une conversation…
Outre la mise à disposition des informations en langues nationales pour permettre à toutes et tous d’y avoir accès, une autre information, inexistante pour le moment, mériterait d’être rendue publique pour accroître la transparence des institutions : quel pays vote quoi sur quelle décision.
[1] , « France : une information sur les OGM incomplète », Inf’OGM, 18 octobre 2017