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Risque allergique des aliments transgéniques : stratégies de prévention

Par Denise-Anne Moneret-Vautrin

Publié le 26/11/2002

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Les aliments d’origine végétale comme animale sont une source importante d’allergènes et de maladies allergiques. Il est donc nécessaire d’envisager le risque potentiel d’allergénicité des aliments transgéniques. Les problèmes théoriques sont le risque d’allergénicité croisée d’une protéine transgénique avec des allergènes existants, le risque de modification d’allergénicité de cette protéine par modification de son métabolisme dans la plante transgénique, le risque de modification d’allergénicité des protéines propres de la plante transgénique, le risque de néo-allergénicité de la protéine transgénique, enfin la possibilité pour une protéine transgénique d’être sensibilisante par dissémination aérienne, avec une conséquence potentielle d’induire une allergie alimentaire. Les méthodes d’évaluation de ces risques, proposées en 2001 par le Comité d’Experts FAO/OMS se disposent selon un algorithme en trois étapes : recherche d’homologie significative de la séquence de la protéine transgénique avec des allergènes connus de la même plante dont est issu le gène, ou de même groupe botanique, et recherche de séquence de six acides aminés identique aux épitopes connus, puis recherche de liaison aux sérums de sujets allergiques à cette plante ou aux allergènes de même groupe, enfin étude de la dégradation de la protéine par digestion in vitro. Le recours à des modèles animaux pour la recherche d’une néo antigénicité n’est pas encore formalisé. Une surveillance post-commercialisation est recommandée. Celle-ci présuppose une structure adéquate, des moyens d’action, le ciblage de groupes à risque dont la surveillance sera prioritaire. Le risque allergique doit être mis en balance avec les risques actuels des modifications d’allergénicité des aliments, induites par les technologies actuelles d’une part, et d’autre part avec les bénéfices attendus de cette biotechnologie pour l’élaboration de variétés hypoallergéniques qui permettront l’institution d’immunothérapies spécifiques et de réactogénicité atténuée.

Les OGM sont le produit d’un transfert de gène codant pour une protéine, d’une espèce végétale (ou bactérienne) à une autre. La plante ainsi modifiée est appelée Organisme génétiquement modifié.

Les protéines transgéniques couramment transférées jusqu’ici confèrent aux plantes génétiquement modifiées une résistance aux herbicides, pesticides, insectes nuisibles. L’amélioration des caractéristiques agronomiques se poursuivra par la création de plantes alimentaires résistant à la sécheresse, à la salinité, au gel et au dégel, amélioration de la fermeté permettant l’augmentation du temps de stockage, etc. La seconde génération des OGM porte sur l’amélioration de la valeur nutritionnelle des aliments : protéines transgéniques permettant de modifier le métabolisme des acides gras, de développer la synthèse d’arômes, de diminuer la teneur en acide phytique (ce qui autorise une absorption accrue de micro-éléments tels que fer, zinc etc.). D’autres OGM sont enrichis en provitamine A, en amino-acides soufrés essentiels etc. La création d’ »alicaments » se dessine : aliments enrichis en protéines ou en peptides d’activité fonctionnelle utile (interféron alpha, lysozyme, betalactoglobuline, …), aliments-vaccins contenant des antigènes viraux, (antigène HBs, entérotoxine d’E. Coli) etc. Dans le domaine immuno-allergologique, l’insertion dans une plante comestible d’épitopes T vaccinants d’allergènes majeurs, de cytokines ou de peptides immuno-régulateurs orientant vers une activité Th1 préférentielle est encore une vision futuriste. Toutefois deux autres directions ont déjà été explorées : création d’un riz appauvri en allergène majeur grâce à l’insertion de gène anti-sens, et tout récemment d’un soja « knock out » pour le gène codant pour l’allergène majeur, ou création par mutagenèse dirigée sur site de variétés d’arachide exprimant des allergènes majeurs modifiés à faible affinité de liaison avec les IgE spécifiques. Plus que la création d’aliments consommables, il s’agit de la création de variétés pouvant servir de base à des extraits pharmaceutiques permettant des immunothérapies efficaces et dénuées de risque [1-3].

On envisagera ci-dessous les problèmes de l’allergénicité potentielle des OGM, car ce sujet suscite particulièrement les craintes du public, et parce que, d’autre part, la constante progression des allergies alimentaires ne peut faire négliger le risque des OGM promis à participer de façon croissante à l’alimentation humaine [4, 5]. Les OGM commercialisés ou en voie de l’être concernent en effet des aliments qui sont la base de l’alimentation : soja, maïs, colza, pomme de terre, tomate [6]. Les caractéristiques physiopathologiques de l’allergie alimentaire et les connaissances actuelles sur les allergènes alimentaires seront brièvement exposées, avant de détailler les inconvénients soulevés par les OGM, et les moyens d’évaluation de leur allergénicité, en insistant sur les interrogations actuelles mais également sur les arguments rationnels plaidant pour leur acceptabilité.

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