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Nombreux essais d’arbres GM : bientôt des autorisations commerciales ?
Aux Etats-Unis, l’entreprise ArborGen a déposé une demande d’autorisation commerciale pour la mise en culture d’eucalyptus génétiquement modifiés pour contenir moins de lignine, résister au froid et avoir une période de floraison décalée. Ces arbres sont destinés à la production de papier et d’agrocarburants. ArborGen attend une réponse des autorités pour 2010 aux Etats-Unis, et 2012 au Brésil [1].
D’autres projets, un peu partout dans le monde, attendent aussi leurs autorisations commerciales. En voici quelques exemples.
En Floride, des citronniers, modifiés génétiquement pour résister à des attaques de champignons ou bactéries provoquant le chancre ou le verdissement des citronniers, ont été mis en culture dans le cadre d’essais en champs par l’entreprise Southern Garden Citrus [2]. Et début septembre, le ministère états-unien à l’Agriculture (USDA) a annoncé la prochaine autorisation commerciale de la papaye transgénique X17-2, après avoir évalué favorablement les données scientifiques existantes [3]. Cette papaye transgénique, résistante au virus des anneaux nécrotiques (« ringspot virus »), sera commercialisée par l’Université de Floride.
En Russie, l’Institut sibérien de Physiologie et de Biochimie végétale travaille sur des trembles, des peupliers ou encore des pins cembro (ou pins des Alpes) transgéniques. Ces arbres sont modifiés pour produire une hormone de la famille des auxines, hormone induisant une croissance plus rapide, afin de permettre aux producteurs de bois d’augmenter leur production [4].
En France, l’Inra expérimente aux champs des peupliers GM au taux de lignine modifié pour la production d’agro-énergie [5], jusqu’en 2012.
En mai 2009, la Belgique a également autorisé la mise en place d’essais en champs de peupliers transgéniques [6], peupliers modifiés également pour produire moins de lignine.
Au Royaume-Uni, une demande de l’Université de Southampton datant de 2008 d’essais de peupliers transgéniques en champs n’a toujours pas abouti, faute officiellement, d’après la Commission britannique des forêts, de « procédure pour répondre aux demandes d’autres organisations de conduire des essais en champs d’arbres GM sur les terrains de la Commission des forêts » [7].
Enfin, en Chine, plus d’un million de peupliers GM furent plantés commercialement mais actuellement personne n’est capable de dire où ils se trouvent [8].
Face aux risques, des scientifiques rassurants
Rappelons que le développement des arbres transgéniques soulève de nombreux problèmes [9]. Comme celui de la contamination par reproduction sexuée (le pollen, disséminé sur plusieurs centaines de kilomètres) ou végétative (par les racines par exemple). Ou encore, le problème de la teneur moins forte en lignine, qui entraîne notamment la fragilité de tels arbres. Comme nous l’écrivions alors, « ces arbres transgéniques sont plus sensibles, non seulement aux dégâts consécutifs aux orages et autres tempêtes, mais également aux attaques par des insectes, des champignons et des bactéries dont les populations risquent de s’accroître. D’où un problème crucial si cette propriété s’étend aux arbres forestiers indigènes ». Enfin, mais cela est vrai pour toute monoculture intensive à grand échelle, le problème du déséquilibre des écosystèmes, de la concurrence avec d’autres cultures, notamment vivrières, et celui de la compétition pour les facteurs naturels (eau, minéraux, etc.), en ajoutant, pour le cas de l’eucalyptus, l’inhibition de la croissance d’autres plantes [10].
Certains scientifiques défendent les arbres GM avec notamment deux arguments : le fort potentiel des biotechnologies appliquées aux forêts pour répondre aux problèmes environnementaux (exemple du changement climatique) [11], d’une part ; et le fait que les travaux aujourd’hui effectués sur les arbres portent sur des gènes non étrangers à la plante mais issus de la plante elle-même (gènes endogènes, travail sur le contenu en lignine par exemple…), d’autre part. Ces deux éléments seraient à leurs yeux suffisants pour que l’on considère le seul produit final et non le procédé : voilà qui nous fait revenir quelques années en arrière, du temps du débat sur l’étiquetage ou non des huiles issues d’OGM, où, suite à la transformation poussée, l’on ne retrouvait pas trace d’ADN. Dans ce cas, le législateur avait bien retenu la provenance transgénique (donc le procédé d’obtention) pour étiqueter.
En privilégiant le résultat au procédé, les arbres GM ne seraient pas considérés comme des PGM… Ironie de la dialectique, les plantes mutées sont elles, exclues du champ d’application de la législation européenne sur les OGM du fait justement du procédé !
[10] cf. note 1