Actualités
Veille juridique Inf’OGM du 8 au 29 septembre 2025
FRANCE
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Assemblée nationale
La loi Duplomb entre dans la « phase d’après »
Le 16 septembre, plusieurs députés écologistes (Delphine Batho, Benoît Biteau et Cyrielle Chatelain, du Groupe Écologiste et Social) ont déposé une proposition de loi visant à abroger la loi Duplomb et à demander l’interdiction définitive des néonicotinoïdes. Alors que l’adoption de cette loi, promulguée le 11 août, avait été expédiée en commission mixte paritaire sans véritable examen à l’Assemblée nationale, la commission des affaires économique (CAE) a décidé à l’unanimité, le 17 septembre, d’examiner la pétition contre cette loi, qui avait recueillie 2,1 millions de signatures. La CAE a finalement acté la tenue d’un débat en séance plénière. Dans le même temps, le gouvernement a malgré tout produit plusieurs décrets d’application, dont certains portent sur la simplification des procédures pour les élevages classés ICPE (« Installations classées pour la protection de l’environnement »), avec notamment un assouplissement des obligations de concertation et de réunions publiques.
Cette « phase d’après » confirme que la loi Duplomb reste au cœur d’une forte polarisation. Alors que ses partisans la présentent comme un levier de compétitivité et de simplification administrative, certaines ONG alertent sur le risque d’une aggravation des questions environnementales et d’affaiblissement des normes censées protéger les écosystèmes et la santé publique. La Confédération paysanne y voit un texte taillé pour les grands acteurs agricoles, au détriment des paysans et de la transition agroécologique. L’association Générations futures salue de son côté cette décision de réexamen et espère que le débat permettra de rappeler le bien-fondé de l’interdiction française des insecticides néonicotinoïdes, de demander leur interdiction sur le plan européen et d’appeler à une abrogation de la loi.
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Conseil économique social et environnemental
Loi sur la participation du public aux décisions impactant l’environnement
Le 24 septembre, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a voté un avis affirmant la nécessité d’adopter une loi organique pour sécuriser le droit à la participation du public en matière d’environnement. Le CESE rappelle qu’une telle participation « vise à améliorer la qualité des décisions et à en renforcer l’acceptation », or cette participation est en crise précise-t-il. L’institution constate en effet « d’une part, une faible participation aux enquêtes publiques et, d’autre part, les récentes modifications législatives et réglementaires tendant à la réduire au nom de la simplification et de l’accélération de la mise en œuvre des projets dans un contexte de transition écologique (ex : éoliennes), d’implantation d’activités économiques stratégiques, etc. ». Pour y remédier, le CESE formule 24 préconisations. Elles visent notamment à stabiliser le cadre juridique, former élus et porteurs de projets, inclure les publics éloignés, soutenir associations et autorités environnementales, et renforcer la transparence. Elles encouragent aussi un meilleur accompagnement des projets, un rôle accru des intercommunalités et l’extension du champ d’action de la CNDP (Commission Nationale du Débat Public). Enfin, elles appellent à prévenir et gérer les contentieux par la médiation, l’accélération des procédures et le rétablissement de certaines garanties juridictionnelles.
Cet avis souligne le droit légitime du public à prendre part au processus décisionnel démocratique et à encourager les acteurs politiques à accélérer les initiatives liées à la transition écologique et au développement économique. En proposant une loi organique, le CESE cherche à stabiliser un droit souvent affaibli par des réformes ponctuelles. L’implication réelle du public, au-delà des dispositifs formels, reste cependant un défi. Il faudra pour ce faire une pédagogie adaptée et une volonté politique forte d’intégrer les contributions citoyennes, à défaut de quoi la participation risque de rester perçue comme un simple obstacle plutôt que comme une ressource pour améliorer les décisions.
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UNION EUROPÉENNE
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Commission européenne
Consultation publique sur la sécurité des aliments
Le 16 septembre, la Commission européenne a lancé une consultation publique dans le cadre de son « train de mesures omnibus sur la simplification », concernant la « sécurité des denrées alimentaires destinées à l’alimentation humaine et animale ». Les parties prenantes, dont les citoyens et ONG, peuvent soumettre des contributions jusqu’au 14 octobre. Cette initiative de la Commission européenne vise à « accroître la compétitivité des agriculteurs de l’UE et de l’industrie de l’alimentation humaine et animale ainsi qu’à réduire la charge administrative pesant sur les autorités des États membres en ce qui concerne les autorisations de mise sur le marché des produits ». Selon la Commission, ces mesures permettront « un accès plus rapide des substances et produits de protection biologique au marché de l’UE » et « la simplification et la clarification des exigences réglementaires relatives aux produits phytopharmaceutiques [NDLR : les pesticides], aux produits biocides, aux additifs pour l’alimentation animale, à l’hygiène alimentaire et aux contrôles officiels, ainsi que d’autres mesures visant à simplifier la législation alimentaire de l’UE ».
Présentée comme une démarche pour réduire les charges administratives, cette simplification peut toutefois aussi susciter des inquiétudes importantes. Elle peut, en effet, se traduire par un affaiblissement des contrôles sanitaires et environnementaux, au détriment de la traçabilité et de la gestion des risques, notamment dans les dossiers liés aux OGM où elles sont particulièrement complexes. Parmi les mesures de simplification ciblées, on notera les « clarifications relatives au statut juridique des produits de fermentation fabriqués à l’aide de micro-organismes génétiquement modifiés (MGM) » ou l’ « application plus ciblée des pesticides [NDLR : les ARN interférents (ARNi) en font partie] par des drones, dans des conditions sûres ».
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Nouveau report du règlement sur la déforestation
Le 23 septembre, la Commission européenne a, via un courrier de Jessika Roswall (commissaire européenne chargée de l’Environnement, de la Résilience en matière d’eau et d’une Économie circulaire compétitive) adressé au Parlement, annoncé qu’elle envisageait reporter à nouveau d’un an la mise en œuvre du règlement sur la déforestation (dit RDUE) adopté en 2023, et devant entrer en vigueur initialement en décembre 2024. Ce texte, qui devrait donc, après ce nouveau report, entrer en vigueur fin 2026, interdit la mise sur le marché de produits issus de la déforestation après décembre 2020, tels que le cacao, le café, le soja, l’huile de palme… La commissaire à l’environnement Roswall a justifié ce délai par des difficultés techniques à rendre opérationnel le « système informatique» de surveillance des forêts « étant donné la quantité d’informations que nous mettons dans le système ».
L’annonce du report de la mise en œuvre de ce règlement, vivement critiqué par les États-Unis, le Brésil et l’Indonésie, intervient peu après la conclusion d’un accord de libre-échange avec ce dernier pays. Cette loi avait déjà été contestée par l’administration étasunienne, qui a signé avec l’Union européenne un accord commercial fin juillet. « La Commission ne sait plus comment cacher les concessions faites aux lobbies sur les enjeux environnementaux. Prétexter le report d’une loi pour des soucis informatiques est du jamais vu, et une injure faite à l’ensemble des démocrates. Ursula von der Leyen se moque littéralement du monde », dénoncent les eurodéputés Verts. De son côté, l’association Canopée souligne que le règlement européen « est le meilleur outil dont nous disposons pour mettre fin à la déforestation et à la dégradation des forêts. C’est pour cela que les lobbys se déchaînent. L’an dernier, ils ont obtenu un report d’un an. Désormais, ils veulent aller plus loin : annuler purement et simplement cette loi, au nom d’une prétendue “simplification” ».
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INTERNATIONAL
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Organisation des Nations unies
Le Traité sur la haute mer entre en vigueur
Le 16 septembre, le Traité des Nations Unies sur la biodiversité marine au-delà des juridictions nationales (BBNJ) a atteint le seuil des 60 ratifications nécessaires à son entrée en vigueur. Cet accord, qui entrera en vigueur le 17 janvier 2026, est l’aboutissement de vingt années de négociations. Il prévoit la création d’aires marines protégées, des règles d’accès et de partage des bénéfices liés aux ressources génétiques marines, et des mécanismes de gouvernance internationale. Il prévoit notamment la réalisation d’études d’impact environnemental pour les activités humaines risquant d’avoir des effets néfastes dans les eaux internationales, comme la pêche industrielle ou les activités minières.
Tout en saluant une avancée historique, des ONG rappellent que les enjeux de mise en œuvre de ce traité restent forts. « Nous ne pourrons véritablement mesurer le succès de l’Accord BBNJ qu’avec sa mise en œuvre », observe Fabienne McLellan, directrice générale d’OceanCare. La Deep Sea Conservation Coalition, coalition d’ONG, d’associations de pêcheurs et d’instituts met aussi en garde contre les activités destructrices telles que l’exploitation minière en eaux profondes et le chalutage de fond sur les monts sous-marins, et autres écosystèmes marins vulnérables. Notamment, la demande croissante en ressources marines destinées à l’alimentation et aux médicaments subissent déjà une forte pression à laquelle le traité propose de répondre en instaurant un mécanisme d’accès aux ressources génétiques marines et prévoit le partage des bénéfices issus de leur utilisation. Il encourage également le transfert de technologies marines vers les pays en développement.
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Australie
Demande d’autorisation pour une tomate transgénique
Le 8 septembre, l’Office of the Gene Technology Regulator (OGTR) australien a invité le public à soumettre des observations sur la version consultative de l’évaluation des risques et du plan de gestion des risques concernant une tomate violette enrichie en anthocyanes pour obtenir une couleur violette. Ceci fait suite à la demande de licence de la société australienne All Aussie Avocados Pty Ltd (opérant sous le nom commercial All Aussie Farmers) pour la culture commerciale de cette tomate développée par l’entreprise britannique Norfolk Plant Sciences. Présentée comme plus bénéfique pour la santé, cette tomate est issue d’un programme de recherche universitaire et fait désormais l’objet d’une procédure d’évaluation par les autorités australiennes.
Cette tomate violette fait l’objet depuis quelques années d’un parcours commercial particulier. Protégée par brevet aux États-Unis, où la filiale Norfolk Healthy Produce la commercialise, cette dernière a demandé et obtenu en 2024 son retrait du catalogue de l’association Baker Creek, qui la proposait également à la vente. En Europe, bien que ne faisant l’objet d’aucune autorisation, des échantillons de cette tomate ont été rendus disponibles, ce qui a fait l’objet d’un communiqué de presse de Norfolk Plant Sciences. A notre connaissance, aucun suivi particulier de la circulation en Europe n’est en cours, et les ONG de consommateurs et environnementales pourraient y voir une stratégie de banalisation progressive des plantes transgéniques.
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