Actualités

Veille juridique Inf’OGM du 5 au 19 mai 2025

Par Denis MESHAKA

Publié le 20/05/2025

Partager

FRANCE

La loi Duplomb entend « lever les contraintes au métier d’agriculteur »

Les 13 et 14 mai, la Commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale a examiné le projet de loi  « Duplomb », proposé en janvier par le Sénat et prétendant « lever les contraintes au métier d’agriculteur ». Cette loi serait le pendant technique de la loi d’orientation agricole (LOA), promulguée en mars (voir Veille juridique du 24 mars au 14 avril 2025). Le texte prévoit plusieurs dispositions concernant la réglementation environnementale, notamment la possibilité de réintroduire, à titre dérogatoire, l’acétamipride, un pesticide de la famille des néonicotinoïdes interdit en France depuis 7 ans. Il prévoit aussi un allègement des procédures d’autorisation pour des projets sensibles, comme les retenues d’eau ou les élevages intensifs. Ce projet de loi sera débattu par l’Assemblée nationale en séance plénière le 26 mai prochain.

Reprenant plusieurs revendications de syndicats agricoles, notamment la FNSEA et les JA, ce projet de loi est perçu par les organisations environnementales comme une régression du droit de l’environnement. L’ONG Pollinis dénonce un « non sens historique », la perspective d’un retour de pesticides interdits affaiblissant les protections acquises pour les pollinisateurs, les écosystèmes et la population. En facilitant l’installation ou l’extension de projets agricoles industriels sans renforcement des contrôles, le texte ouvre la voie à une intensification des impacts sur l’eau, les sols, l’air et le climat. En pleine urgence écologique, il incarne un choix politique qui privilégie la dérégulation plutôt que la transition agroécologique, pourtant proclamée comme priorité nationale.

Lien ici.

UNION EUROPÉENNE

Une PAC davantage simplifiée et plus flexible sur la question environnementale

Le 14 mai, la Commission européenne a proposé de nouvelles mesures de simplification de la politique agricole commune (PAC) « ciblant la charge administrative, les contrôles, la mise en œuvre, la réaction aux crises et les besoins d’investissement du secteur ». A la satisfaction d’Annie Genevard, ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, ces propositions reprennent plusieurs demandes françaises, telles que l’allègement de certaines obligations déclaratives et de contrôle pour les agriculteurs, ainsi qu’une plus grande flexibilité sur les questions environnementales. Les modifications législatives proposées par la Commission sont regroupées sous les intitulés suivants : « Régime de paiement simplifié pour les petits agriculteurs », « Exigences et contrôles environnementaux simplifiés », « Renforcement de la gestion des crises et simplification des procédures pour les administrations nationales » et « Compétitivité accrue et numérisation ». La proposition va être soumise au Parlement et au Conseil pour adoption.

Ces annonces de « simplification » inquiètent les défenseurs de la transition agroécologique et de l’agriculture paysanne. C’est le cas de la Confédération paysanne, qui estime que ces mesures « ne répondent pas aux principales difficultés du monde agricole : elles ne garantissent pas un meilleur revenu pour les paysan·nes et ne réduisent pas la complexité administrative ». Si les Verts estiment que « certaines mesures vont dans le bon sens, notamment la reconnaissance automatique des pratiques bio ou l’allègement des démarches pour les petites exploitations », le parti écologiste européen dénonce «une tendance inquiétante à détricoter les exigences environnementales, tout en laissant aux États une liberté accrue d’adapter les règles, au risque d’accentuer la fragmentation de la Politique Agricole dite Commune ». Ces propositions de la Commission s’inscrivent dans une tendance plus large de régression environnementale qui s’éloigne des engagements du Pacte vert européen, et qui interroge sur la capacité de l’Union européenne à maintenir ses objectifs climatiques et de préservation de la biodiversité.

Lien ici.

Modification des règles sur les aides d’État pour garantir l’accès à la justice environnementale

Le 12 mai, la Commission européenne a modifié ses règles encadrant les aides d’État afin de renforcer l’accès du public, et notamment des ONG, à la justice en matière environnementale. Cette révision fait suite aux conclusions du comité de conformité de la Convention d’Aarhus, qui avait estimé en 2021 que l’Union européenne contrevenait à cette convention en bloquant toute contestation citoyenne des aides d’État incompatibles avec le droit de l’environnement. Le nouveau mécanisme permet aux citoyens et ONG remplissant certains critères de demander un réexamen interne des décisions d’aide d’État lorsque celles-ci sont soupçonnées de violer les normes environnementales de l’UE.

Cette réforme offre aux ONG un nouvel outil juridique pour déclencher un réexamen de la Commission sur la base d’une argumentation fondée. Si la procédure n’impose pas aux ONG de prouver pleinement la violation, elle exige qu’elles identifient précisément les dispositions environnementales concernées et démontrent que l’activité subventionnée leur est « indissolublement liée ». Le succès de ce mécanisme dépendra donc de la capacité des ONG à formuler des requêtes solides, mais aussi de la volonté de la Commission et, en cas de contentieux, de la Cour de justice de l’Union européenne, à se saisir de ces recours de manière rigoureuse et impartiale.

Lien ici.

INTERNATIONAL

Le litige sur la propriété des droits de brevets sur Crispr/Cas9 est relancé

Le 12 mai, la Cour d’appel fédérale des États-Unis a accepté de revoir un cas opposant les chercheuses Jennifer Doudna et Emmanuelle Charpentier au Broad Institute au sujet des droits de brevets sur la technologie Crispr/Cas9. La Cour avait décidé, en mars 2022, que les deux scientifiques, honorées du prix Nobel, ont découvert le système Crispr/Cas9 chez les organismes procaryotes (bactéries), alors que le Broad Institute l’a fait dans les cellules eucaryotes (animales, végétales, humaines). C’est précisément cette extension de la technique aux cellules eucaryotes qui est au cœur du conflit, en raison de son importance stratégique et commerciale.

Ce nouveau rebondissement s’inscrit dans la continuité d’une bataille juridique de plus d’une décennie, suivie de près par les acteurs du monde scientifique, industriel et institutionnel. Au delà de la paternité des différentes découvertes sur Crispr/Cas9, il rappelle les débats sur la légitimité de brevets couvrant des méthodes de modification du génome fondamentales, issues en grande partie de la recherche publique.

Lien ici.

Actualités
Faq
A lire également