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Attentats : la réaction de membres d’Inf’OGM
Un média français a été la cible d’un attentat, le 6 janvier [1]. Des personnes ont été tuées pour ce qu’elles représentaient : la liberté d’expression. Les administrateurs et salariés d’Inf’OGM [2], en tant que citoyens, mais aussi parce que nous sommes un organe de presse, sont choqués, bouleversés qu’un événement qui nous semblait « impossible » survienne là, à deux pas. Qui d’entre nous pensait que l’année 2015 allait débuter par deux tueries, une course poursuite dans les rues de Paris, puis des actions violentes contre des symboles de la culture musulmane ? Scène de guerre ? Scène de film ?
Tout d’abord, nous souhaitons apporter toute notre compassion à Charlie Hebdo, aux familles et amis des victimes du XXe et de la Porte de Vincennes. Nous pensons aussi aux blessés et aux témoins.
Ensuite, au-delà de la tristesse et de l’émotion, il nous faut rester vigilant car amalgames et raccourcis, mauvaises explications et mesures liberticides et sécuritaires risquent d’obscurcir encore ce crime odieux.
Ainsi, nous souhaitons que cet état de choc ne fasse pas oublier que la peur est l’ennemie de la liberté et qu’elle favorise l’intolérance, la méfiance et le mépris. A l’opposé, la liberté ne peut s’épanouir que dans la diversité et la reconnaissance d’un droit fondamental à la contestation, la critique sous toutes ses formes, du moment qu’elle respecte autrui et qu’elle se fasse selon les principes de la non-violence.
Charlie Hebdo résiste aux intégrismes de tous horizons par la satire et la caricature. Ses dessins et ses articles sont l’expression de la liberté. Ce sont des contre-pouvoirs qu’il nous faut préserver, coûte que coûte. La démocratie est à ce prix. Il ne s’agit pas d’être en accord avec tout mais simplement de laisser exister des choses avec lesquelles on pourrait ne pas être d’accord !
Enfin, les musulmans de France sont sous le choc de ces assassinats barbares revendiqués au nom d’Allah. Comme nous tous, ils accusent le coup. Cette revendication religieuse qui tourne en boucle sur les écrans de télévision sème le trouble dans la société. Or, aucune religion, aucune idéologie ne peuvent justifier le meurtre et la violence. Mais la violence n’est pas que le fait de ces individus fanatiques, aveuglés par leur haine de l’autre. Elle est aussi le fait d’États. Cette violence légale orchestrée par des gouvernements est un terreau fertile pour le terrorisme. La violence prend racine dans l’oppression économique, la domination et l’occupation. Elle tient dans des situations d’oppression extrême, de négation de l’autre induisant la négation d’un quelconque futur, et ainsi elle séduit des personnes qui n’ont aujourd’hui rien à perdre tant elles ont été, elles-mêmes, pillées, violentées, terrorisées.
Nous refusons que cet événement fasse le lit du racisme, de la xénophobie… Au contraire, cet événement doit nous permettre de voir plus que jamais à quel point la liberté d’expression est précieuse : elle est une force pour exprimer des multitudes de points de vue, d’accords et de désaccords et offrir la possibilité à chacun de penser par lui-même.
Certes, ces meurtres ont été commis par des personnes. Mais au-delà de ces bras qui ont manié les armes, il nous faut nous interroger sur les causes et chercher toutes les responsabilités, directes ou indirectes. Nous devons désormais nous intéresser aux racines profondes qui alimentent la haine, l’obscurantisme, le refus de l’altérité, ou le repli sur soi pour tenter, autant que faire se peut, que de telles abominations ne se reproduisent plus, ici comme ailleurs autour du monde. Chacun a sa part de responsabilité et chacun peut donc devenir un artisan de la liberté, de la paix, de la solidarité et de la justice.
[1] Ce texte a été initié le lendemain de cet événement. Les aller/retour au sein d’Inf’OGM ont pris du temps. D’où une publication tardive. Or, en une semaine, la déflagration liée à ces meurtres a engendré des prises de position, actions, marches, etc. que nous n’avons pas pris le soin d’analyser ni d’intégrer.
[2] Ce texte n’est pas un texte officiel de l’association. Pour des raisons diverses et variées tous les administrateur(trice)s et salarié(e)s n’ont pas voulu signé. D’autres ne se sont pas encore exprimés.