De l’information mais pas que !
L’histoire d’Inf’OGM fut et est toujours celle de la production d’une information sur les OGM et les semences. Mais, au fil des années, Inf’OGM s’est également dotée d’une mission d’explication et d’éducation à destination des plus néophytes. Un travail mené en permanence avec l’idée que chacune et chacun a le droit à la parole dans ce débat de société.
L’anecdote est aussi vieille que le dossier OGM : quiconque a voulu participer à une consultation publique sur une demande d’autorisation commerciale ou d’essai en champ s’est vu confronté à un dossier technique, scientifique, rempli de notions inconnues sur les séquences génétiques, les résultats d’analyse de toxicologie ou autre description moléculaire. Que faire dans ce cas-là ?
Les règles du jeu doivent changer
La situation est d’autant plus incongrue que ceux ayant malgré tout pris la peine de répondre avec leurs mots, leurs convictions et visions de société ont pu justement voir leur réponse non prise en compte car non formulée scientifiquement. En d’autres termes, « vous n’êtes pas scientifique ? Passez votre chemin ». Durant les dernières vingt années, Inf’OGM a alimenté ce débat scientifique mais dans un objectif de vulgarisation et d’explication. L’idée animant ce travail d’explication des questions scientifiques comme celui de vulgarisation du domaine juridique ou d’autres domaines spécialisés fut et a toujours été que chacun comprenne les jeux d’acteurs et leurs arguments. Notre travail vise encore aujourd’hui à produire une information critique. Mais, et c’est probablement là un des paradoxes de l’association, un tel travail n’a jamais visé à maintenir les citoyens enfermés dans un débat aux termes imposés.
Une conviction fermement ancrée qui devint une valeur de l’association au tournant des années 2010 sous l’impulsion de Frédéric Jacquemart, Président d’Inf’OGM et du Groupe International d’Études Transdisciplinaires. Il était alors publiquement énoncé qu’Inf’OGM « considère que le débat technique a tendance à éclipser le débat social. Or, les défis actuels – crise environnementale, sociale, climatique, etc. – demandent une vision globale, incompatible avec le réductionnisme technique qui s’attache à régler les problèmes à court terme » [1].
L’objectif poursuivi est bel et bien que, d’une part, chaque citoyen retrouve sa liberté de parole. Et que, d’autre part, les termes d’un débat comme celui des OGM ne soient plus imposés puisqu’ils conditionnent de fait la réponse fournie. Un débat qui pose une question scientifique appelle une réponse scientifique : il enferme donc le débat dans cette seule question.
Une sortie qui reste à trouver
En 2019, Inf’OGM doit-elle faire un constat d’échec sur cette question de paradigme ? Si l’objectif était de changer les choses comme le veut l’expression consacrée, force est de constater que les débats et discussions en cours dans la société reprennent encore et toujours ces fameux termes d’un débat imposé. Le dernier exemple en date est l’incroyable capacité des communicants à faire adopter l’expression « édition du génome » par nombre de personnes, journalistes, politiques, citoyens et même quelques opposants aux OGM, plutôt que de parler de « modification génétique » comme le voudrait le cadre législatif européen lui-même !
Le dossier aujourd’hui publié pour les vingt années d’existence d’Inf’OGM montre une certaine diversité dans les motivations à avoir fondé et à utiliser l’information d’Inf’OGM. Mais, selon plusieurs retours reçus au cours de ces années, la diffusion de ces informations a pu aboutir à un sentiment de ras-le-bol de nos lecteurs face à la complexité du débat qui leur – qui nous – est imposé. Imposé par des auditions parlementaires réclamant que chaque affirmation soit renseignée scientifiquement mais imposé également par les règles de l’OMC qui ne reconnaît que les législations basées sur une « bonne science » comme légitimes…
Durant vingt années, Inf’OGM a donc travaillé à assurer une information pour toutes et tous. Une information qui s’est finalement avérée parfois capitale pour des acteurs de filières professionnelles, des représentants politiques, du monde associatif et certains citoyens investis qui faisaient, tous, face aux affirmations pas toujours de bonne foi des entreprises de biotechnologie au lobby très bien organisé. Pour les vingt années à venir, Inf’OGM continuera à produire ces informations, sans perdre du vue que le débat de société sur les OGM doit s’ouvrir à toutes les expressions, sensibilités, sans hiérarchie aucune !