1, 2, 3 gènes : la fuite en avant
Le phènomène d’acquisition de résistance est naturel, au sens où tout être vivant confronté à une pression sélective, s’adapte ou meurt. Confrontés aux pulvérisations d’insecticides, certains insectes ont donc évolué en devenant “résistants” aux biocides. En quoi les PGM renforcent-elles ce phénomène ?
Une exposition permanente
Peu d’études déterminent avec précision la quantité de toxine insecticide émise dans l’environnement par une plante transgénique Bt. D’après les travaux non publiés du Pr. Darvas, “cela représente près de deux mille fois la quantité de toxine utilisée dans le cadre des traitements conventionnels des plantes”. Greenpeace Allemagne ajoute, suite à l’analyse de 600 échantillons de maïs Bt, que la quantité de protéine insecticide produite par la plante Bt varie d’une plante à l’autre, d’un facteur de 1 à 100 et que ces concentrations sont différentes de celles déclarées par Monsanto, soulignant que ce maïs a donc été autorisé sans avoir une connaissance précise de la quantité de protéine Bt synthétisée et donc présente dans les champs [1]. Et l’Inra elle-même reconnaît [2] que “la pression de sélection est ainsi moindre [dans le cas d’épandage d’insecticide par l’homme, ndlr] que dans le cas des plantes Bt qui administrent une forte dose d’une toxine unique pendant toute la saison et ceci à l’abri des UV. La résistance devrait donc se manifester bien plus fréquemment et bien plus rapidement avec des plantes Bt qu’avec des traitements au Bt”.
Des résistances réelles
Si à plusieurs reprises des articles scientifiques ont noté l’apparition d’insectes résistants aux protéines Bt, que ce soit en Chine, en Inde, ou aux Etats-Unis, dernièrement une nouvelle étude, réalisée par l’équipe du Pr. Tabashnik (Université d’Arizona) établit non seulement que, dans les Etats d’Arkansas et du Mississipi, certains papillons (Helicoverpa zea) ont acquis une résistance à la protéine produite par le coton Bt [3], mais surtout que pour la première fois un insecte a franchi un seuil quantitatif de résistance à une PGM. Autrement dit, la résistance s’est suffisamment développée au sein de la population d’insectes pour ne pas être réversible. Et les repousses de PGM renforcent ce phénomène (cf. ETATS-UNIS – De gros problèmes à venir avec le maïs Bt ?.
Stratégies contre les résistances
Le Pr. Tabashnik constate cependant que cette résistance n’a pas entraîné d’échec particulier des cultures de coton Bt. En effet, ce phénomène ne concerne pas tous les insectes et la protéine Bt provoque encore entre 48 et 60% de mortalité chez les insectes parasites. Pour les vers résistants, des insecticides ont été aspergés sur les champs. Et deux stratégies ont permis de réduire l’apparition des résistances : l’obligation de cultiver des “zones refuges” avec du coton non GM pour “diluer” l’acquisition de résistance ; et la mise sur le marché de coton Bt doté de deux transgènes, ce qui augmente le spectre de toxicité. En Europe, trois maïs à plusieurs transgènes sont en cours d’autorisation (cf. ) et, l’Isaaa affirme que “37% de toutes les plantes biotech aux USA en 2007 étaient des produits, contenant des empilements de deux ou trois caractères, qui apportaient des avantages multiples”. Critique implicite des PGM de première génération. N’en doutons pas : une nouvelle technologie condamnera à son tour bientôt ces empilements de gènes.
[3] « Insect resistance to Bt crops : evidence versus theory », Tabashnik BE et al., Nature Biotechnology. 2008, Février ; 26(2):199-202