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Le Pérou décrète un moratoire de dix ans sur les OGM
Mardi 7 juin, le Parlement péruvien a voté en plénière, à une large majorité [1] « un moratoire de dix ans pour empêcher l’entrée sur le territoire national d’organismes vivants modifiés (OVM) à des fins de culture, d’élevage ou d’autres objectifs » [2]. Les OVM sont des organismes génétiquement modifiés (OGM) qui peuvent se reproduire. Ce terme a été introduit avec le Protocole de Cartagena et exclut de son champ d’application les produits dérivés d’OGM (par exemple les farines).
Reste à savoir si la loi péruvienne suit précisément la définition onusienne. La loi n’étant pas encore enregistrée au Journal officiel, Inf’OGM communiquera ultérieurement sur les arguments utilisés dans la loi et cherchera à en apprécier la compatibilité avec les règlements de l’OMC.
Ce moratoire vient consolider un état de fait : le Pérou est un des rares pays d’Amérique latine, avec la Guyana, le Surinam, l’Équateur et le Vénézuela, à ne pas cultiver, du moins officiellement, des plantes transgéniques. Mais Antonietta Gutiérrez Rosati, de l’Université nationale d’Agriculture La Molina, a annoncé avoir découvert du maïs transgénique dans la région de Barranca, annonce qui a déclenché une bataille judiciaire avec un autre chercheur péruvien [3].
Ce moratoire est l’une des premières décisions prises par le nouveau gouvernement de Ollanta Humala, nouveau président de la coalition de gauche, élu le 5 juin dernier, mettant fin à la présidence libérale de centre droit de Alan García [4]. Le 15 avril 2011, l’ancienne majorité avait adopté une loi sur la biosécurité plutôt favorable aux OGM [5]. Un décret du ministère de l’agriculture était venu compléter le dispositif juridique [6], décret qui autorisait l’importation et la culture des OGM sur le territoire national. Ces deux textes avaient alors déclenché une levée de bouclier de la part du ministre de l’Environnement, d’organisations paysannes et religieuses, de scientifiques, et de l’association médicale péruvienne. Puis les opposants aux OGM au Pérou avaient gagné une première victoire : le 13 mai 2011, le ministre de l’Agriculture, Rafael Quevedo, favorable à l’introduction des OGM au Pérou, avait démissionné, après que furent révélés ses liens avec les entreprises qui les commercialisent [7]. Rappelons enfin que le 28 avril 2011, la ville de Lima s’était déclarée officiellement « zone sans OGM », rejoignant aussi d’autres régions : Cusco, Lambayeque, Huanuco, Ayacucho, San Martin et Cajamarca [8].
[1] 56 voix pour, zéro contre et deux abstentions
[3] PEROU – Entre polémique scientifique et diffamation : y a-t-il ou non contamination des maïs péruviens ?
[4] Un président de Gauche controversé, comme le souligne un article de Stéphane Fernandez, publié dans Basta Mag : http://www.bastamag.net/article73.html
[5] Reglamento interno sectorial de bioseguridad para actividades agropecuarias o forestales, http://sinia.minam.gob.pe/admDocume…
[6] Décret suprême n°003-2011