n°157 - novembre / décembre 2019

Le Traité Trans Pacifique ouvrira-t-il la porte à la culture d’OGM au Chili ?

Par Lucía Sepúlveda Ruiz, Plate-forme « Chili meilleur sans le TLC »

Publié le 30/12/2019

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Le Chili est en passe d’adhérer à un accord de libre échange, le Traité Trans Pacifique [1] (TTP).

Ce dernier regroupe 10 pays (depuis le désengagement des États-Unis en 2017) de trois continents (Asie, Amériques et Océanie) : Brunei, Nouvelle-Zélande, Singapour, Australie, Canada, Japon, Malaisie, Mexique, Pérou et Viêt-nam. Approuvé à une courte majorité en avril 2019 par la Chambre des députés chilienne, il sera soumis au vote dans peu de temps au Sénat [2].

La question des OGM a été l’un des axes de la protestation citoyenne et du débat houleux contre le TTP sur les questions relatives aux semences, à la transgenèse et à l’alimentation, car c’était la première fois que la biotechnologie était incluse dans un accord de libre-échange. La plate-forme pour un « Chili meilleur sans le TLC » [3] a souligné que le TTP rendrait difficile pour le Chili le maintien de l’interdiction des cultures GM telles que le maïs, les fruits et les légumes destinés à la consommation intérieure. La plate-forme souligne que cela implique un double danger : celui lié à l’altération génétique des semences ; et celui de l’immense quantité de pesticides utilisés dans les cultures, y compris d’éventuels pesticides cancérigènes et extrêmement dangereux tels que le glyphosate, dont les militants demandent l’interdiction au Chili.

Lever les « obstacles au commerce »

Le TTP crée un groupe de travail sur la biotechnologie chargé « d’échanger des informations sur des questions liées au commerce de produits biotechnologiques modernes, y compris des lois et réglementations, ainsi que des politiques et propositions en cours » et exige l’homogénéisation de la législation interne [4]. De même, le chapitre sur les obstacles techniques au commerce pourra être utilisé, comme cela a déjà été le cas dans certains pays, pour prévenir ou éliminer des réglementations assimilées à des « obstacles au commerce  » : moratoire sur les OGM, étiquetage des aliments génétiquement modifiés ou encore avertissement d’un risque chronique sur l’étiquette de pesticides très dangereux (tels que le glyphosate ou l’association de glyphosate et de dicamba), utilisés dans les cultures de maïs, de soja ou de canola génétiquement modifiés.

Par ailleurs, le TTP exclut pour ses membres toute sanction en cas d’expéditions de semences conventionnelles présentant une faible présence de semences transgéniques, ce qui est souvent arrivé ces dernières années. Ces contaminations présentent donc un risque lorsque les semences conventionnelles sont exportées vers des pays à tolérance zéro pour les OGM transgéniques.

Le TTP va aussi contre les revendications socio-environnementales, qui visent à renforcer les économies locales et à les guider vers la sauvegarde et la culture de semences traditionnelles sur leurs territoires, dévastés par les monocultures forestières et de l’agro-industrie. 
Si le TTP est approuvé, le Chili sera obligé d’appliquer l’UPOV 91 en votant immédiatement une nouvelle loi sur les semences qui abroge la précédente [5]. Or l’UPOV 91 permet aux sélectionneurs, c’est-à-dire à ceux qui possèdent des variétés de semences enregistrées, de considérer que toutes les variétés « similaires » à celles qu’ils ont déjà enregistrées leur appartiennent. Et l’UPOV interdit l’utilisation gratuite des semences enregistrées : les paysan.nes doivent acheter ces semences pour chaque nouvelle saison de culture. 
Le TTP permet également de breveter des produits dérivés des semences, ce qui signifie affaiblir les économies locales et les processus de création de valeur ajoutée réalisés par les communautés paysannes et autochtones, en lien avec la gastronomie ou les utilisations associées à la médecine traditionnelle.

[1Connu aussi sous son sigle anglais TPP pour «  Trans-Pacific Partnership  »

[3Voir , « Le Chili : un exportateur de semences transgéniques », Inf’OGM, 30 décembre 2019

[4
À l’instar d’autres accords comme le CETA où ces discussions vers une harmonisation sont également prévues, 
voir : https://www.infogm.org/6608

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